Quatre ans de prison pour viol sur un gamin de 13 ans

Quatre ans de prison pour viol sur un gamin de 13 ans

par M. Nadir

Ivre, il reconnaît qu’il l’était, mais il rejette catégoriquement l’accusation selon laquelle il a violé son voisin de 13 ans : «Je l’ai vu en train de tenter de voler ma moto, je l’ai rattrapé et battu mais je ne l’ai jamais violé». A la barre de la cour d’assises d’Oran où il comparaissait, lundi dernier, pour attentat à la pudeur avec violences contre un mineur de moins de 16 ans, L. Tayeb, 29 ans, a nié toutes les charges égrenées par le président d’audience : «Je ne l’ai pas emmené dans la forêt. Je ne l’ai pas menacé avec un couteau. Je ne l’ai pas forcé à boire de l’alcool. Je ne l’ai pas violé», a-t-il répliqué aux questions du juge. En cas de culpabilité, l’homme risquait une peine de 10 à 20 ans, selon ce que prévoit l’article 335, alinéa 2 du code pénal.

Une histoire de moto

Selon l’arrêt de renvoi lu à l’audience par la greffière, les faits de l’affaire remontent 24 août 2016 lorsque M. Naziha, accompagnée de son fils de 13 ans, Mohamed, se présentent à la police de Aïn El Bya, à Bethioua, pour porter plainte contre L. Tayeb que l’adolescent accuse de viol. La victime présumée raconte avoir passé la journée précédente à la plage avec le frère de son prétendu bourreau. Les deux adolescents auraient conclu une transaction portant sur l’achat par Mohamed auprès de son copain d’une moto pour la somme de 12.000 DA: «En fin d’après-midi, alors que je me trouvais près de la maison, Tayeb est passé en moto. Je l’ai arrêté pour demander des nouvelles de son frère et il m’a proposé de m’emmener le voir à la maison. Mais au lieu de se rendre chez lui, il a pris la direction de la forêt», relate-t-il encore. Là, Tayeb aurait sorti un couteau qu’il lui aurait mis sous la gorge, l’a contraint à consommer de l’alcool avant de lui ordonner de se déshabiller. Il l’aurait ensuite violé avant de le menacer de mort si jamais il osait en parler: «Après, aux environs de 22 heures, il m’a déposé près de chez moi ; j’étais dans un état tel que ce sont des voisins qui m’ont conduit jusqu’à la maison». Le lendemain, il portait plainte en compagnie de sa mère.

Interpellé, Tayeb nie toutes les accusations. Il dit avoir passé la journée en question à Mers El Hadjadj, qu’il était revenu en fin d’après-midi en état d’ébriété et s’était assis devant chez lui, dans le village de Chehairia: «J’ai alors vu Mohamed qui tentait de voler ma moto. Je l’ai poursuivi, rattrapé et lui ai donné un coup de pied. C’est tout ce qui s’est passé», répondra-t-il lors des différents interrogatoires et la confrontation avec la victime qui maintiendra ses accusations.

Lorsqu’il examinera Mohamed, le médecin légiste constatera des traces de viol avec violences illustrées par de nombreuses ecchymoses.

Le parquet requiert 15 ans

Lors du procès qui s’est déroulé au tribunal criminel d’Oran en l’absence de la victime et de la partie civile, Tayeb réitèrera ses déclarations et clamera son innocence : «Un pied avant est le seul coup que je lui ai porté lorsqu’il a tenté de voler ma moto», a-t-il encore répété en jurant que l’altercation n’est pas allée plus loin.

Dénégations qui susciteront l’ire de la représentante du ministère publique, auteure d’un violent réquisitoire contre l’accusé : «C’est un acte bestial qui appelle une lourde condamnation. Il faut être implacable», lancera-t-elle en affirmant que le dossier d’accusation comporte suffisamment de preuves accablant le prévenu. Elle s’appuiera sur les déclarations immuables de la victime – dont elle dit douter de sa «capacité à porter à tort de telles accusations»-, et l’examen médicolégal qui a constaté le viol pour requérir 15 ans de réclusion criminelle : «Pourquoi s’en prendre à un gamin ? Il y a le mariage, des maisons closes existent», s’emportera-t-elle à l’adresse de l’accusé.

Loin de s’émouvoir par la violence de la magistrate, l’avocate de la défense s’est engagée dans une longue plaidoirie visant à jeter le discrédit sur les accusations de la victime et innocenter son client. Elle commencera par souligner que son mandant a également maintenu les mêmes déclarations à travers toutes les étapes de l’instruction et qu’il a réitéré son innocence à la barre. Elle déplorera ensuite l’absence de la victime qu’elle dit n’avoir jamais pu interroger, avant de déplorer la démission parentale qui permet à un garçon de 13 ans de passer toute la journée à la plage et de faire des transactions du type de celle qu’il a passée pour l’achat d’une moto contre la somme de 12.000 DA.

«L’examen médicolégal insuffisant»

Elle évoquera ensuite la raison pour laquelle la victime a « inventé l’histoire du viol»: «En ne voyant pas venir le frère de Tayeb, il s’est, sans doute, senti piégé et, par crainte de possibles représailles de sa mère, il a tenté de voler la moto de notre client. Ce qui donne du sens à la version de Tayeb», dira-t-elle. Elle soulignera également que la forêt où la victime dit avoir été violé n’est pas déserte : «Il y a des espaces aménagés qui sont fréquentés par la population», ajoutera-t-elle en s’interrogeant sur l’absence de témoins ayant vu Mohamed grimper sur la moto de Tayeb. L’avocate évoquera, par la suite, l’examen médicolégal qui, dira-t-elle, ne détermine pas si les traces de viol relevées étaient récentes ou anciennes. Elle finira par affirmer que le dossier d’accusation ne comporte pas de preuves matérielles accablantes pour son client et qu’hormis les déclarations de la victime, aucun élément de preuve n’incrimine son client.

Après délibérations, le tribunal criminel d’Oran déclarera L. Tayeb coupable des faits reprochés et le condamnera à quatre ans de prison ferme.