Qui peut contester aujourd’hui les bienfaits des technologies de l’information et de la communication?
Qui n’en profite pas quotidiennement?
En tout cas, pas les vieilles femmes des villages algériens qui voient leur quotidien se métamorphoser avec l’arrivée en force des moyens de communication dans leurs foyers, notamment les téléphones portables ou mobiles.
«Depuis l’arrivée des portables et des télévisions, notre vie dans ce village a changé de visage. Ce n’est plus comme il y a quinze ou seize ans. Nos fils, qui ne rentraient à la maison jadis que la nuit pour dormir, n’en sortent plus. Ils sont toujours branchés sur la télévision», a avoué, Nna Tassaâdit, une vieille femme, à Imezgharen, village relevant de la commune de Frikat dans la wilaya de Tizi Ouzou.
Dans ce village, où la vie est très simple, le téléphone portable (le fixe n’existe pas encore), est d’une grande utilité pour les habitants. Les jeunes ne s’appellent plus les uns les autres devant leurs maisons.
Il suffit d’une communication de quelques secondes pour fixer un rendez-vous. Si l’accord est préalablement établi, il suffit juste d’un bip. C’est dire à quel point ce moyen a facilité la vie des villageois.
«Pour réparer une panne de mon véhicule, je ne suis plus obligé de marcher plus de cinq cents mètres de chez moi pour aller chercher le mécanicien de notre village chez lui. Aujourd’hui, je peux juste l’appeler pour savoir quand est-ce qu’il sera disponible et l’affaire est réglée», argue Farid A. habitant du même village.
Plus encore, Nna Tassaâdit ajoute que les femmes, dont les fils, une fois majeurs, quittent le village à la recherche d’un autre destin dans les grandes villes algériennes et même à l’étranger, ont les yeux fixés sur le portable, espérant qu’il sonne d’un moment à l’autre pour avoir de leurs nouvelles. Si l’on tient juste à ce dernier moyen de communication pour constater comment il a transformé la vie des gens, l’on constatera que la société algérienne en est devenue presque dépendante au point où les citoyens ne peuvent plus s’en passer.
Ils sont tellement nombreux les services que rend le mobile que ses inconvénients apparaissent très minimes, voire dérisoires.
Et ce n’est certainement pas Malika I., cette quinquagénaire d’Oumaden, village de Kabylie maritime ou les millions de clients de la téléphonie mobile qui diront le contraire.
Partout comme chez soi
Tassadit I. est une jeune fille de 19 ans qui habite à Tizi Ouzou et est hospitalisée au service d’ophtalmologie, à l’hôpital de Bab El Oued, à Alger.
Son séjour à l’hôpital est devenu «supportable» grâce au téléphone.
«Parfois quand je parle avec tous mes frères, ma mère et mon père à partir de mon lit, j’oublie ma peine et je me sens comme à la maison. Heureusement qu’il y a ce moyen sinon vous imaginez combien ce serait dur d’être dans l’hôpital et n’avoir aucun contact avec ses parents», confie-t-elle.
Ses parents venant souvent de Tizi Ouzou lui rendre visite, ne peuvent certainement pas dire le contraire de ce qu’avance leur fille.
«Dieu merci, ça nous soulage énormément de lui parler chaque matin et chaque soir et ça nous rassure», souligne sa maman, Nadjia.
Il n’y a pas uniquement les hospitalisés à se rapprocher des leurs grâce à cette technologie de l’information et de la communication.
Les vieilles femmes dans les villages et leurs fils émigrés à l’intérieur comme à l’extérieur du pays n’éprouvent plus le poids de l’éloignement et de la séparation.
Le téléphone participe, de ce fait, à donner au monde la dimension du «village planétaire».
«Depuis que j’ai cet appareil, je ne me sens plus éloignée de mon fils qui travaille à Oran. Il m’appelle chaque matin pour me dire bonjour et je le sens à mes côtés», avoue Nna Malika.
Saliha A., originaire de Tizi Ouzou et enseignante à Alger, ne pense pas le contraire. Elle estime que le téléphone a brisé son éloignement avec sa famille et éliminé la distance qui la sépare d’elle.
«A chaque fois que je sens que ma mère me manque, je prends le téléphone et je l’appelle et peu importe le prix», dit-elle. Même constat pour Mourad S., étudiant à Alger et dont les parents sont de Tébessa.
Grâce à ce moyen de communication, il ne se sent guère coupé de ses parents ni obligé de leur raconter son quotidien dans des lettres. Tout se raconte en direct et sans peine.
«Imagine que le téléphone n’existe pas. Avant, nos parents vivant à Alger étaient complètement coupés des leurs mais aujourd’hui ce n’est plus le cas.
Les 800 kilomètres qui nous séparent sont devenus un simple mur de quelques centimètres qui empêche juste nos yeux de se regarder», a-t-il soutenu.
Des citoyens utilisent, en outre, ce moyen de communication pour régler des affaires «en urgence» sans pour autant se déplacer ou trop se casser la tête. Le téléphone «sauve» ses utilisateurs dans plusieurs situations délicates.
Attention à l’utilisation malintentionnée!
Malgré tous les bienfaits de ce moyen moderne de communication, il n’en demeure pas moins que certaines défaillances ou anomalies sont à signaler.
Certains clients des opérateurs de la téléphonie mobile se plaignent de quelques carences qu’ils ont constatées en matière de prestations. «Je pense que les opérateurs doivent améliorer leurs prestations, notamment en matière de couverture réseaux», souligne, Mourad S., expliquant que dans certaines régions aucune couverture téléphonique n’est disponible.
«D’autres fois même si on est dans une zone couverte, la communication s’interrompt brusquement et la connexion ne revient que quelques minutes plus tard, ce qui fait que la communication perd, dans certains cas, son utilité», a-t-il ajouté.
Un autre utilisateur a mis en avant la défaillance du service clientèle pour critiquer les opérateurs.
«On vous demande d’appeler le service clients, mais quand tu appelles, tu trouves que l’appel n’aboutit pas», souligne pour sa part, Samir M, photographe de profession.
Les appels masqués ne sont pas en reste des critiques que formulent certains clients.
Arezki A. agriculteur de son état, en a même fait une mauvaise expérience. «Un jour, j’ai reçu un appel inconnu. Quand j’ai répondu, mon interlocuteur, que je n’ai jamais reconnu et dont je ne connaîtrai peut-être jamais l’identité, m’a inondé d’insanités et de gros mots», a-t-il raconté. Notre interlocuteur a ajouté qu’il a déposé une plainte contre X au niveau de la Gendarmerie nationale, mais celle-ci n’est pas parvenue à confondre le «malfaiteur». Résultat du risque: plusieurs clients ne répondent pas quand l’appel est masqué. Mais là encore, doit-on reconnaître, la faute n’incombe pas à ceux qui ont inventé cette technologie mais à ceux qui l’utilisent maladroitement et à de mauvaises fins.
Karim AIMEUR