En Algérie, la lutte contre la corruption généralisée et l’obsession du gouvernement à limiter les transferts de devises vers l’étranger plombent l’économie du pays. Selon Noureddine Boutarfa, le PDG du groupe public Sonelgaz (électricité et gaz d’Algérie), ses cadres refusent de signer des documents liés à l’importation de matériels par peur d’être poursuivis par la justice pour corruption.
« Suspicion à tous les niveaux »
« Les gestionnaires de Sonelgaz sont devenus des criminels qui passent leur temps à courir entre les services de lutte contre la fraude des douanes et les tribunaux. C’est incroyable », s’est exclamé mercredi 13 juin Noureddine Boutarfa lors d’une conférence de presse à Alger. « Il faut travailler dans un cadre serein, nous ne pouvons pas continuer à travailler dans un cadre où il y de la suspicion à tous les niveaux », a-t-il dénoncé.
Les services des douanes ont multiplié ces dernières années les enquêtes visant de hauts responsables du géant énergétique algérien, soupçonnés de majoration des importations pour transfert illicite des devises vers l’étranger. Outre Sonelgaz, le groupe pharmaceutique français Sanofi est également victime des douaniers algériens. Le 2 mai dernier, un tribunal d’Alger avait condamné la filiale algérienne du géant français à 20 millions d’euros d’amende et son directeur général Thierry Lefebvre à une année de prison avec sursis pour surfacturation de produits importés. Sanofi a fait appel.
Les armateurs ne veulent plus facturer en monnaie locale
Les armateurs étrangers dont CMA CGM se plaignent aussi des difficultés qu’ils rencontrent pour transférer leur argent d’Algérie en raison de la bureaucratie des douanes algériennes. En représailles, ils ont décidé de ne plus facturer leurs prestations en monnaie locale aux opérateurs algériens.
La douane algérienne est l’une des administrations les plus bureaucratiques et les plus corrompues du pays. « La lutte contre corruption est très mal menée en Algérie à cause de cette espèce de fixation sur les cadres de la nation et parfois les cadres supérieurs », déplore l’avocat Miloud Brahimi.
Pour le gouvernement, accuser des multinationales occidentales de tricherie permet d’éloigner les regards sur la véritable corruption qui gangrène l’économie du pays. Curieusement, les accusations de fraude épargnent les groupes chinois comme CSCEC qui a obtenu, ces dernières années, d’importants contrats de gré à gré dans le BTP dans le pays. Pourtant, CSCEC figure en bonne place sur liste noire des entrerises les plus corrompues établie par la Banque Mondiale !