Les gendarmes de Skikda ont réussi à dévoiler cette grosse affaire au bout de quatre ans d’enquête. Encore un autre gros scandale dans le secteur des cimenteries du pays. Trente-trois entrepreneurs viennent d’être arrêtés et présentés, jeudi passé, devant la justice pour une vaste affaire de trafic de ciment à la cimenterie de Skikda.
Ces derniers ont fourni de faux dossiers à l’administration et présenté des projets fictifs et autres «astuces» pour parvenir à bénéficier d’autant de ciment, par dizaines de milliers de tonnes, pour être, par la suite, destinés à la spéculation.
C’est à partir d’une longue enquête menée depuis l’année 2008 par les gendarmes de la Section de Recherches de Skikda que les faits de ce vaste scandale viennent d’être dévoilés, avant-hier, à la justice.
Tout a commencé par cette journée du 21 octobre 2008, lorsque la brigade de Gendarmerie nationale de Bekkouche-Lakhdar avait commencé son enquête sur la base de renseignements. Des renseignements faisant état que des entrepreneurs liés par contrat avec ladite cimenterie procèdent à l’introduction de faux dossiers auprès de l’administration mentionnant des projets fictifs, en vue d’obtenir de grandes quantités de ciment, destinées en fait à la spéculation.
Partant de ces informations judicieuses, les gendarmes ont entamé une série d’investigations sur les entrepreneurs et sur leurs dossiers. Ce n’est pas tout, les enquêteurs se sont intéressés aux administrations au niveau des cimenteries proches de la ville de Skikda, en plus bien entendu de celle de Skikda, là où la mèche de cette affaire a pris le départ.
L’enquête des gendarmes a concerné, aussi, les points de vente de ciment et les grossistes. Ici, les gendarmes ont remarqué que les prix d’un sachet de ciment étaient trop chers par rapport à ceux cédés à la cimenterie de Skikda, ce qui laisse supposer que ces quantités sont le fait d’un grand trafic.
L’enquête avec les entrepreneurs suspects a permis aux gendarmes de localiser et d’identifier 33 d’entre eux qui n’ont jamais bénéficié de marchés dans le cadre des projets de développement des communes. Mieux, lors de nombreux déplacements effectués par les gendarmes sur les lieux où sont inscrits les projets, il s’est avéré qu’il s’agissait de projets fictifs qui n’existent pas et qu’ils sont, finalement, créés sur un simple papier par les entrepreneurs en vue d’avoir du ciment. Et c’est à partir de là, aussi, que les entrepreneurs avaient obtenu ce qu’ils cherchaient.
En quelques années, ces derniers ont réussi à obtenir des tonnes et des tonnes de ciment. De grosses quantités qui seront, par la suite, revendues aux grossistes de vente de ciment. Pis, ces entrepreneurs impliqués dans ce scandale avaient déjà volé plusieurs tonnes de ciment, cela avant l’année 2008, voire la période où les gendarmes avaient débuté leur enquête.
Les gendarmes de la brigade de Bekkouche-Lakhdar ont présenté, avant-hier, devant le procureur de la République près le tribunal d’Azzaba trente-trois (33) entrepreneurs impliqués dans une grosse affaire de faux et usage de faux à la cimenterie de Hedjar Essoud. Vingt-quatre ont été placés sous contrôle judiciaire, deux cités à comparaître à l’audience ce 29 juillet et les sept autres restants ont été relâchés.
UNE CENTAINE D’ENTREPRENEURS ARRÊTÉS EN QUATRE ANS
Durant les quatre dernières années près d’une centaine d’entrepreneurs ont été interpellés pour trafic de ciment, faux et usage de faux et projets fictifs. Ce qui vient de se produire à la cimenterie de Skikda nous rappelle bien l’affaire de la cimenterie «Raïs-Hamidou» où, il y a plus de deux ans plusieurs entrepreneurs avaient été arrêtés pour avoir fourni de faux dossiers techniques, dont le but n’est autre que d’accaparer des tonnes de ciment.
80 000 tonnes de ciment avaient été dérobées en l’espace de quelques mois seulement par plusieurs entrepreneurs, c’est ce qu’avait révélé une enquête de la section de recherche et d’investigation du Groupement de la Gendarmerie nationale de Bab J’did.
En effet, les enquêteurs de cette brigade avaient découvert que de faux dossiers techniques achetés à un million de centimes chacun ont été utilisés pour permettre à certains entrepreneurs de s’alimenter en quantités importantes en ciment auprès de cimenteries. Le procédé est simple, utiliser ces faux documents pour «attester» de l’octroi d’importants projets «fictifs», présenter ces faux dossiers et, ainsi, s’alimenter auprès de ces cimenteries.
Le pot aux roses avait été découvert, en premier lieu, à la cimenterie de Raïs-Hamidou et celle de Sour El Ghozlane. Ici, des entrepreneurs avaient présenté, à travers ces faux dossiers, des projets fictifs de réalisation de logements sociaux et participatifs.
Dans la plupart des cas, ces entrepreneurs avaient présenté de faux contrats avec l’Office de promotion et de gestion immobilière (OPGI). Ce que les enquêteurs ont noté, c’est l’absence de contrôle de la part des services commerciaux des cimenteries concernées par cette affaire.
Des déplacements avaient été effectués par les enquêteurs de la brigade de recherche du groupement de la wilaya d’Alger de la Gendarmerie nationale sur les lieux censés, selon ces faux dossiers, abriter ces projets et avaient découvert qu’aucun chantier n’était installé. Il s’agit de projets fictifs.
L’enquête de la Gendarmerie nationale avait découvert que ces entrepreneurs écoulaient ensuite ces quantités de ciment achetées auprès de ces cimenteries au prix de 280 DA ou 320 DA le sac, à des acheteurs au prix de 400 DA le sac, qui, à leur tour, les revendent à un prix pouvant atteindre 700 DA le sac.
Sofiane Abi