Interdite pour des considérations sécuritaires, la collecte d’argent pourrait être de nouveau autorisée dans les mosquées d’Algérie. La collecte est évoquée par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs qui a déposé auprès du gouvernement un projet de décret ministériel déterminant les modalités de constitution et d’organisation des associations à caractère religieux.
Le dépôt de ce texte intervient en application de l’article 47 de la loi N° 06-12 du 12 janvier 2012, relatif aux associations qui stipule que «la constitution d’associations à caractère religieux est assujettie à un dispositif particulier», a précisé le conseiller chargé de l’information au ministère des Affaires religieuses, Adda Fellahi, cité par l’APS.
Le projet de décret ministériel consacre, entre autres moutures, «le droit des associations à caractère religieux à la collecte de dons pour mener différentes activités caritatives et culturelles», est-il noté.
Autrement dit, si le texte présenté par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs est adopté, la collecte d’argent au niveau des mosquées pourrait être de nouveau autorisée. Les collectes devraient concerner uniquement les activités caritatives et culturelles.
Les pouvoirs publics avaient précédemment interdit toute collecte d’argent dans ces lieux de culte, de crainte que l’argent ne serve des réseaux de soutien au terrorisme. Il est vrai qu’en Algérie comme dans d’autres pays du monde, y compris l’Angleterre, des collectes d’argent faites dans des mosquées avaient bénéficié directement au Groupe islamique armé (GIA), servant à financer le terrorisme qui sévissait dans notre pays.
Bloquer l’accès des associations religieuses aux terroristes
Le texte engage d’autre part les associations à «respecter l’unité nationale et la référence religieuse de la société» et à «servir les mosquées, l’enseignement coranique, les zaouïas et les rites religieux d’intérêt général». Là également, il est utile de revenir aux années 1990 durant lesquelles des prêches prônés publiquement par des imams pro FIS-dissous avaient épousé la cause du parti de Abassi Madani. Des enseignants et étudiants de zaouïas avaient été assassinés par le GIA.
Tout ce précédent fait que les pouvoirs publics tiennent à s’assurer du non retour à ces dérives avant de «libérer» l’activité associative au sein des mosquées. C’est par une enquête administrative éventuellement que les pouvoirs publics comptent y arriver. C’est ainsi qu’il est noté que le projet stipule que la constitution d’une association à caractère religieux
«est soumise à une déclaration constitutive devant être déposée auprès des directions des Affaires religieuses et des wakfs» qui, jouissant d’un «pouvoir discrétionnaire», examinent les dossiers et prennent les mesures nécessaires. Des listes nominatives des personnes membres de ces associations devraient être adressées à l’administration pour s’assurer qu’elles ne comprennent aucun terroriste.
Des associations non partisanes
L’expérience douloureuse des années 1990 motive les auteurs du projet pour ce qui est également de l’aspect non partisan de ces associations. C’est dans cet esprit que le texte note que les associations religieuses ne peuvent entretenir avec les partis politiques aucune relation, qu’elle soit organique ou structurelle, ni recevoir de financements de leur part, précise le texte.
Il est stipulé, par ailleurs, que pour suivre et évaluer le travail de ces associations, le texte prévoit la création d’une commission locale de suivi au niveau de la wilaya, composée du directeur de wilaya des Affaires religieuses et des wakfs, des directeurs de la réglementation et des affaires générales, de l’inspecteur de l’orientation religieuse et de l’enseignement coranique et du directeur de l’orientation religieuse.
Des mesures coercitives sont prévues contre les atteintes à cette loi si elle venait à entrer en vigueur.
C’est ainsi que le projet de décret ministériel stipule qu’«il est procédé à la dissolution des associations en cas d’atteinte à la souveraineté nationale et à la référence religieuse de la société, d’adoption d’idées extrémistes et intégristes, d’atteinte aux institutions et aux infrastructures religieuses et d’ingérence dans les missions des fonctionnaires des mosquées et des écoles coraniques».
Mounir Abi |