Dans deux mois débutera le procès Sonatrach 2. En Italie. Avec les quatre accusés italiens, trois Algériens, proches de l’ancien ministre de l’Énergie, Chakib Khelil, et de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, sont inculpés dans cette affaire. Pour l’heure en fuite et sous le coup d’un mandat d’arrêt international, il est peu probable qu’ils se présentent, le jour venu, à l’audience.
L’intérêt, pour les Algériens, de cet événement est qu’ils pourront suivre le déroulement d’un procès pour corruption dont ils sont les victimes. Puisque, si les faits à l’origine de cette affaire se confirment, il s’agirait d’un cas de détournement massif de deniers publics en intelligence avec des complices étrangers.
Officiellement, une information judiciaire est ouverte en Algérie aussi depuis le début 2013. Les déclarations du président de la République, au lendemain de l’éclatement du scandale, ne devait laisser aucun doute sur l’attention et la célérité dont la justice devait faire preuve dans le traitement de cette affaire. “Je ne peux pas passer sous silence les scandales récemment relevés par la presse et qui touchent à la gestion de Sonatrach”, déclarait-il alors. Il ajoutait que “ces informations soulèvent notre révolte et notre réprobation, mais je fais confiance à la justice de notre pays pour tirer au clair l’écheveau de ces informations, pour situer les responsabilités et appliquer avec rigueur et fermeté les sanctions prévues par notre législation”. De fait, dès le début de l’instruction, le procureur général de la cour d’Alger annonçait que “l’enquête sera accélérée” et que “la justice ira vite et loin”. Puis plus rien, sinon la nouvelle commission rogatoire et une histoire de mandat d’arrêt mal
rédigés…

Entre-temps, l’opinion nationale aura deux grands procès pour corruption à contempler : l’affaire de l’autoroute Est-Ouest et le procès Khalifa bis. Deux procès qui sonnaient comme un rappel à l’ordre : le seuil politique d’impunité est maintenu. Ce n’est pas avec un tel avant-goût qu’on pouvait espérer voir Chakib Khelil s’expliquer sur les soupçons qui pèsent sur lui. Et cette opinion a réagi à ce message comme elle le fait depuis une génération : par le renoncement. Une réaction conforme à la culture de la “réconciliation nationale” : renoncer en espérant avoir la “paix” et en scrutant les retombées d’un ordre rentier qui, peut-être, nous éclaboussera. Renoncer par peur et par avidité.
Maintenant que l’objet de cette avidité s’évanouit, le pouvoir aura besoin de nous faire plus peur. Il a commencé.
Pour nous consoler, il ne nous reste qu’à faire, comme pour la démocratie : regarder à la télévision le spectacle de vraies élections qui se passent ailleurs. Cette fois-ci, l’on pourra suivre, sur les chaînes italiennes, le spectacle d’un vrai procès de la corruption en Algérie.