Abdelmoumène Khalifa, le principal accusé
Tout au long de ces auditions, les sommes prononcées par les P-dg provoquaient l’effarement du public.
Dans une salle presque vide, le défilé des témoins se poursuit au procès d’El Khalifa Bank. Au terme de cette 21e journée, le juge Antar aura entendu huit témoins, pour la plupart d’anciens accusés dans cette affaire, devenus des témoins après avoir bénéficié d’un non-lieu. Leurs témoignages serviront à apporter plus de lumière sur l’établissement des responsabilités, notamment dans la prise de décision de dépôts de fonds à El Khalifa Bank.
Ainsi, Sayes Nacer, directeur de la compagnie d’assurance Cash, niera la relation entre le dépôt de 56 millions de dinars à El Khalifa Bank et la convention de réduction signée auprès de Khalifa Airways. Il ajoutera que la décision de dépôt a été prise sans résolutions du conseil d’administration, et que le ministre du Travail avait la possibilité de l’annuler.
Pour sa part, Kisset Abdelaziz, directeur général de la Société des travaux aux puix, filiale de Sonatrach, indique avoir donné la directive à son directeur financier de déposer la somme de 100 millions de dinars à El Khalifa Bank. Il explique que sa société jouissait de l’autonomie de gestion et n’avait pas à en référer à la direction générale de Sonatrach. Il précisera que le conseil d’administration était avisé de cette opération, au même titre que le commissaire aux comptes. Il explique que les intérêts étaient très avantageux pour l’entreprise.
A ce moment, le procureur général fait rappeler au témoin qu’aucune filiale de Sonatrach n’avait remis ses fonds à El Khalifa Bank. Le témoin répondra qu’en vertu de la loi, et sous l’effet de l’autonomie de gestion, rien ne pouvait l’empêcher de concrétiser cette opération. Lui succédant à la barre, Hassaim Madjid, directeur général de l’Entreprise nationale des peintures (Enap) à Lakhdaria parle de deux dépôts de 200 millions de dinars à El Khalifa Bank, agence El Harrach, à un taux de 10,5%. Suite à quoi, il avoue avoir reçu deux formulaires d’adhésion au centre de thalassothérapie, mais qu’il n’avait ni rempli ni signé. Chose que le procès-verbal du juge d’instruction confirme. Il ajoutera qu’une tentative de retrait de cette somme n’avait abouti qu’à l’établissement d’un chèque de banque de la part d’El Khalifa Bank Ce dernier s’est avéré sans provision, et avait fait l’objet d’un dépôt de plainte.
Pour Ouridane Hocine, directeur de la Société générale des opérations boursières, les dépôts de 13 millions de dinars à El Khalifa Bank à un taux d’intérêt de 9,75%, était justifié par les faibles taux des autres organismes financiers. Il explique que l’agence d’El Harrach offrait un taux préférentiel. Il avoue avoir signé la convention avec El Khalifa Bank, pour une durée de 13 mois, et que les fonds n’ont jamais été récupérés. Même scénario pour Lahbib Mehdi, directeur du Fonds de garantie pour les micro-crédits. Selon lui, statutairement, le Fonds de garantie était tenu de travailler avec les banques qui domiciliaient les dossiers des micro- crédits. Dans ce sens M.Mehdi précise que la décision de cette convention était du ressort du conseil d’administration, lequel avait opté pour confier à El Khalifa Bank un mouvement de 1,250 milliard de dinars. Il niera être intervenu pour le poste que sa fille avait obtenu au sein de l’agence El Harrach.
Par ailleurs, le témoignage le plus marquant a été celui du directeur d’agence d’El Khalifa Bank à Koléa. Il apporte un nouvel élément d’analyse qui avait engendré une forte confusion lors des auditions précédentes. Il s’agit de la différence à faire entre la caisse principale de la direction de la trésorerie, et la caisse principale de l’agence Chéraga. Chadi Noureddine révèle que les transferts de fonds se faisaient au crédit de la caisse principale, supportés par des écritures entre sièges, et non pas destinés à la caisse de l’agence principale. Le fait que les deux caisses se trouvaient au même endroit avait prêté à confusion. Et par conséquent, les inspections ne pouvaient trouver trace de certaines opérations, du fait que les recherches étaient orientées vers la mauvaise caisse.
Le juge Menouar Antar accélère le rythme des auditions durant l’après-midi, et reçoit à la barre, le P-dg de l’hôtel El Aurassi, ElAmri Abdelkader. Ce dernier avait déposé 170 millions de dinars à El Khalifa Bank, le directeur de l’Opgi de Mostaganem, M.Khezmet, pour un dépôt de 200 millions de dinars, le P-dg des minoteries de Mezghena, un dépôt de 300 millions de dinars. Tous diront que leurs conseils d’administration étaient avisés de ces opérations, et nieront avoir reçu des avantages.
Par ailleurs, l’audition des témoins aura apporté des confirmations et des précisions aux témoignages précédents. Il va sans dire qu’au long de ces auditions, la salle d’audience ne pouvait qu’être effarée par les montants évoqués dans cette affaire.