Procès des assassins présumés de Matoub « Laissez-nous les juger »

Procès des assassins présumés de Matoub « Laissez-nous les juger »
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«Les deux accusés veulent être jugés.

C’est un droit constitutionnel», a encore ajouté le juge après la grande confusion qui a régné à l’ouverture de l’audience et surtout l’ambiance très tendue qui a marqué le début de la procédure avec les interventions des différentes parties.

Après l’appel à la barre des deux accusés détenus, Medjnoune Malik, 37 ans, et Chenoui Abdelhakim, 46 ans, les avocats de la partie civile ont demandé à prendre la parole. Me Kaci Rahem a annoncé que la partie civile (pour les intérêts de la mère et de la sœur de la victime) a décidé de ne pas se constituer dans l’affaire, vu que ses préoccupations, notamment pour la reconstitution des faits, l’audition de certaines personnes (dont des personnalités politiques de la région) n’ont pas été prises en charge par le complément d’enquête ordonné par le tribunal criminel en juillet 2008.

Un autre avocat a déclaré que le complément d’enquête n’a rien apporté de nouveau. Aussi, estime-t-il, «l’enquête a connu un arrêt de 12 ans». Pour ce même avocat, «les bénéficiaires et les commanditaires de l’assassinat ne sont pas présents dans la salle et ne sont pas cités dans l’arrêt de renvoi». Surpris par cette sortie,

Me Hanoune, l’avocat de Nadia Matoub et de Ouarda et Farida Brahimi, a demandé à consulter ses clientes. Après consultation, il annoncera que «jugeant que ce procès n’est qu’une étape parmi tant d’autres sur le plan juridico-judiciaire, nous avons décidé de participer à ce procès et nous allons revenir avec une plainte contre Belouache Nacer qui a été identifié par Ouarda Brahimi». Pour leur part, les avocats des deux accusés, Medjnoune et Chenoui, ont demandé la tenue du procès pour «mettre un terme à une détention provisoire qui dure depuis 12 ans, ce qui est un grave précédent dans l’histoire de la justice algérienne». Au moment où le procès allait commencer, Malika Matoub, la sœur de la victime, a lancé à haute voix : «Nous n’acceptons pas cette mascarade. Ramenez les vrais assassins.» Les membres de la fondation se lèvent et lancent des «Pouvoirs assassin», «Ulach smah ulach». Craignant un report du procès, Chenoui Abdelhakim pique une crise de nerfs et se met à crier de toutes ses forces. Les forces de sécurité accourent pour tenter de le maîtriser, en vain. Très agité, six policiers ont préféré l’entraîner vers la sortie de la salle d’audience où régnait une anarchie indescriptible. La sœur et la mère du «Rebelle» lancent des accusation ; Ali Medjnoune s’accroche avec les membres de la fondation et demande la libération de son frère, soutenu par le comité de soutien Medjnoune Malik.

Nadia Matoub et ses deux sœurs sont restées assises à leurs places, observant la scène sans prononcer le moindre mot. Le tribunal criminel, qui avait suspendu l’audience, s’était retiré pour évaluer la situation. Au bout d’une demi-heure, les avocats de la défense et de la partie civile sont appelés à les rejoindre. Vers 11h, le tribunal criminel est revenu dans la salle. Le juge a déclaré : «Les deux accusés veulent être jugés et c’est un droit constitutionnel. Alors, s’il vous plaît, laissez-nous les juger, sinon j’appliquerais la loi.» Une menace de tenir l’audience à huis clos.

L’avocate de Chenoui a annoncé alors son retrait de l’affaire pour des raisons indépendante de sa volonté, a-t-elle précisé, réduisant ainsi la défense de cet accusé à un seul avocat. Le calme est revenu et le juge a demandé Malika Matoub à la barre pour faire ses demandes. Celle-ci a demandé qu’il soit précisé qu’il s’agit du procès Chenoui Medjnoune et non de l’affaire Matoub. «Jamais je n’accepterais que le procès de mon frère soit une mascarade. Si Hattab ou ceux cités il y a 13 ans étaient là, j’aurai accepté», a-t-elle ajouté. Au moment où nous mettons sous presse, l’audience se poursuivait dans une ambiance électrique.

D.M