Alors que le procureur général du tribunal criminel près la Cour d’Alger a requis lundi une peine de 20 ans de prison ferme et une amende de 5 millions DA à l’encontre du médecin généraliste Khelifa Hanouti, accusé principal dans l’affaire de trafic de bébés vers l’étranger, de même que sa radiation du corps médical pour une durée de 10 ans, le juge l’a condamné à une peine de 12 années de réclusion assortie d’une amende de 2 millions de DA et une privation de 10 années d’exercice.
Six autres accusés, à savoir des Franco-algériens (émigrés ayant adopté les enfants) ont été condamnés par contumace à 10 ans de prison ferme par le juge. Il s’agit de Hadj Ali Aicha, Ibari Boualem, Mouza Alfonso Daniel, Saib Zahia, Derdiche Hakim et Sayad Omar.
Le tribunal a également condamné Saidi Oualid (fils du notaire) à 5 ans de prison ferme et Mekhlouf Dahbia, Hanafi Loundja, Mouzaoui Amel et Abderrahmane Ahmed à 3 ans de prison avec sursis, assortie d’une amende de 500 000 DA contre deux nourrices et un témoin (dans un acte de kafala), alors que Hanouti Hayet (sœur du médecin) a bénéficié de l’acquittement.
Il est à noter que les plaidoiries se sont poursuivies jusqu’en début de soirée et que le verdict a été prononcé en fin de journée. Durant des heures, les avocats ont tenté de casser l’accusation en plaidant l’innocence des mis en cause.
Pour eux, les actes de kafala sont légaux et aucune mère n’a déposé plainte contre eux. Les avocats du médecin ont tous fait son éloge, affirmant qu’il ne faisait que des actes de «bienfaisance», en rendant service à des mères célibataires menacées de mort par leurs familles et en sauvant les bébés dont elles voulaient se débarrasser.
Pour rappel, 13 personnes, dont sept présentes, les autres étant en fuite à l’étranger, sont poursuivies pour association de malfaiteurs, faux et usage de faux en écritures publiques, enlèvement, séquestration et éloignement d’enfants de leur mère, selon l’arrêt de renvoi.
Le tribunal reproche au principal accusé d’avoir accouché, dans son cabinet situé à Aïn Taya (Alger), des mères célibataires sans avoir la formation de gynécologue, dans le but de placer les nourrissons en adoption (kafala), en se faisant payer aussi bien par les mamans que par les familles d’accueil.
Au moins 12 enfants de mères célibataires, dont neuf se trouvent à l’étranger, ont été adoptés par des parents vivant en France.
L’affaire a éclaté en 2009. La première personne appelée à la barre par le juge est Hanafi Loundja, la femme chez laquelle Hanouti plaçait les mères célibataires avant l’accouchement.
Elle a reconnu avoir accueilli trois mères célibataires enceintes, précisant que c’est un acte de bienfaisance. Quant à Makhlouf Dahbia, une autre nourrice, poursuivie déjà pour la mort suspecte d’un nouveau-né placé chez elle en 2004 par le médecin généraliste, elle a déclaré avoir accueilli, dans son chalet à Aïn Taya, six enfants ramenés par le médecin.
De son côté, Abderrahmane Ahmed, l’un des témoins ayant signé un acte de kafala, à Saïdi Walid, fils du notaire (décédé alors qu’il était en détention), et au médecin, a déclaré qu’il témoignait gratuitement et qu’il ne faisait que le bien.
Selon l’arrêt de renvoi, les services de sécurité ont démantelé, en 2009, ce «dangereux» réseau à l’origine du transfert illégal d’un grand nombre d’enfants vers l’étranger. Le réseau, constitué d’Algériens et de Franco-algériens, activait depuis les années 90 en Algérie.
Manal C.