C’est en effet en enquêtant sur une affaire de corruption à Algérie télécom dans laquelle l’un des principaux accusés du scandale de l’autoroute est impliqué que les enquêteurs sont tombés sur ce dossier. Chani Medjdoub est alors arrêté en septembre 2009 à l’aéroport d’Alger et présenté devant le juge d’instruction qui lui signifie sa mise sous mandat de dépôt. Le procès est prévu pour demain au tribunal criminel près la Cour d’Alger.
Ce n’est pas la première fois que Chani a maille à partir avec la justice. Ses déboires ont commencé lorsqu’il dirigeait le fonds algéro-koweitien d’investissement. Il a transféré 9,3 millions d’euros vers une banque au Luxembourg où il résidait en fait. Il avait été condamné à six mois de prison. Une autre peine de 18 ans de prison lui a été infligée par le tribunal criminel dans l’affaire d’Algérie Télécom, tout comme l’ex-conseiller en communication de cette dernière pour corruption et blanchiment d’argent dans ce qui s’appelait communément des commissions versées, en 2003 et 2004, par ZTE Algérie et Huawei Algérie, deux entreprises chinoises, dont les responsables sont toujours en fuite.
Acteurs secondaires
Dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest, Chani récidive également avec des entreprises chinoises de travaux publics. Outre sa personne, Addou Tadj-Eddine, Mohamed Khelladi, ancien directeur des nouveaux projets de l’Agence nationale des autoroutes, et Salim Hamdane, ex-directeur des nouveaux projets au ministère des Transports, (gendre de l’ancien ambassadeur de l’Algérie au Mali, Ghrieb et membre de l’autorité de lutte contre la corruption), ainsi, que son épouse et la sœur de celle-ci ont été mis en cause dans le cadre d’une affaire de contrat avec les sociétés suisses, Pizzaroti et Garaventa ainsi que l’espagnole Isolux-Corsan, toutes poursuivies pour «association de malfaiteurs, blanchiment d’argent et corruption». Les mêmes chefs d’inculpation ont été retenues contre l’entreprise chinoise CITIC-CRCC et la japonaise Coojal. L’ex-secrétaire général du ministère des travaux publics, en liberté provisoire est également concerné par les accusations.
Toutefois, beaucoup de personnes citées pendant l’instruction par les prévenus ne sont pas inquiétées. A commencer par Amar Ghoul, à l’époque ministre du secteur, dont le nom est revenu fréquemment dans les auditions, a été cité uniquement comme témoin. Son témoignage, il l’a fait par écrit et adressé au juge d’instruction. Un témoignage dans lequel il enfonce ses ex-collaborateurs, et notamment celui dont les révélations ont mené à l’approfondissement de l’enquête, Mohamed Khelladi en l’occurrence. D’ailleurs, la seule plainte qui existe, elle a été déposée contre lui par Amar Ghoul six mois après l’éclatement du scandale.
Ce sont donc 23 personnes qui comparaîtront demain devant le tribunal criminel près la cour d’Alger. Mais les principaux, hauts responsables de l’Etat et des intermédiaires ne figurent pas dans l’arrêt de renvoi de la chambre d’accusation qui a criminalisé l’affaire. C’est le cas de la vedette de « l’Angolagate ». Pierre Falcone, connu dans le dossier actuel de monsieur 9%, c’est de lui qu’il s’agit. Il a joué un rôle assez important, selon les déclarations de Addou Tadjeddine (en liberté provisoire après avoir été incarcéré pendant 13 mois). Falcone représentait le groupe chinois dans les négociations avec le gouvernement algérien via un certain « Sacha ». Il va sans dire que les langues vont se délier lors du procès et l’on peut s’attendre à des révélations fracassantes. L’audience sera gérée par Tayeb Hilali, président de la huitième chambre pénale.
Faouzia Ababsa