Le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, vient de saisir le Premier ministre Abdelmalek Sellal ainsi que le président du Conseil constitutionnel, Tayeb Belaïz, à propos d’un problème qui risque de provoquer beaucoup de vagues dans les jours à venir : l’application de l’article 80 du code électoral fixant les modalités de désignation du président de l’Assemblée populaire communale.
C’est ce que nous apprenons d’une source très bien informée. «C’est au moment de préparer une circulaire qu’il adressera prochainement aux walis pour expliciter les modalités pratiques de l’élection du président d’APC que régit, désormais, l’article 80 du code électoral du 12 janvier 2012, qu’Ould Kablia découvre la faille.» En fait, le législateur n’ayant pas pris en considération le fait que les Assemblées communales en Algérie sont toutes composées d’un nombre impair de sièges, il devient impossible d’appliquer cet article 80 dans certains cas. Or, que stipule cet article ? «(…) Le candidat à l’élection de président de l’Assemblée populaire communale est présenté sur la liste ayant obtenu la majorité absolue des sièges (…)». Soit. Mais dans une assemblée de 13 membres, de 15 membres, de 17 membres, etc. à partir de combien de membres peut-on s’estimer être en possession d’une majorité absolue ? «La règle est universelle.
Elle est connue : la majorité absolue, c’est 50% plus une voix. Et en l’espèce, il s’agit de sièges et donc de personnes. Comment dégager cette majorité absolue à partir d’un nombre impair ? Pour une assemblée constituée de quinze sièges, par exemple, comment va-t-on fixer la majorité absolue ? L’application de l’article 80 donnerait, pour ce cas de figure, 7,5 membres plus un membre ! Une aberration ! Alors, la seule solution raisonnable serait d’interpréter ces taux en termes humains et, dans ce cas, arrondir les chiffres mais vers le haut. Pour rester dans notre exemple, ce serait 8 plus une voix au lieu de 7,5 plus une voix» ! Mais une telle interprétation ne peut être faite par le seul ministre et nécessite l’avis du gouvernement mais surtout le feu vert du Conseil constitutionnel, une institution qui, pourtant, ne s’implique jamais dans le processus des élections locales.
A en croire toujours notre source, le Conseil constitutionnel n’aura d’autre choix, pour rattraper cette anomalie, que de «revenir aux règles générales contenues dans le code de procédure civile». Ceci étant, et avant de finaliser sa circulaire, Ould Kablia a adressé, hier lundi, une note à l’ensemble des walis auxquels il enjoint d’observer une stricte neutralité par rapport aux élections des P/APC et même des tractations qui les précédent. Le ton de cette note, dont nous avons pu obtenir une copie, est d’une fermeté irréprochable : «En prolongement des instructions déjà données concernant l’attitude à tenir pour la conduite des opérations électorales des élections locales du 29 novembre 2012 (…) et en prévision de tractations politiques entre élus et entre formations politiques pour l’élection du président d’APW, des présidents d’APC et de membres de leur exécutif, honneur de vous demander de veiller à faire observer par l’ensemble des services placés sous votre autorité une attitude neutre et impartiale.»
Le ministre de l’Intérieur insiste sur le devoir pour l’administration de rester à l’écart, «s’abstenant de tout commentaire, fait ou immixtion dans les tractations en cours. Seule l’application de la loi devra guider l’action des services administratifs loin de toute attitude incompatible pouvant être mise à profit pour porter atteinte à la crédibilité de l’Etat et à l’intégrité du dispositif électoral mis en œuvre». Ould Kablia termine sa missive par cette phrase qui a valeur d’une véritable mise en garde dans le jargon administratif «importance particulièrement signalée».
K. A.