La subvention des prix de produits de large consommation, est parmi les outils-clés du gouvernement pour assurer la paix sociale, cependant, la réalité montre que cette politique profite aux riches.
La dépense sociale budgétisée représente presque un quart du budget de l’Etat, et 13 % du PIB national. En incluant les subventions non budgétisées, ce taux atteindrait les 30 % du PIB, selon certains experts. Ce n’est pas tout, car ses subventions semblent profiter plus aux riches qu’aux pauvres, un constat qui vient d’être confirmé par la banque mondiale. A cet effet, la sonnette d’alarme est tirée pour une révision efficace de cette politique, mais les risques de perturber la paix sociale reste important. Dans ce cadre, la Banque mondiale vient d’appeler les pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), dont fait partie l’Algérie, à réviser leur système de protection sociale, notamment les subventions des prix, qui » alourdissent les finances publiques, et profitent davantage aux riches « .
Dans un rapport publié à l’approche de sa réunion annuelle, la Banque Mondiale relève que la plupart des systèmes de protection sociale, mis en place dans les pays de la région MENA, dans le but de protéger les plus pauvres, s’assurent une protection insuffisante et laissent un grand nombre de familles dans la pauvreté.
Les subventions occasionnent de grandes fuites en faveur des riches. Citant essentiellement, les subventions générales censées aider les couches pauvres de la population, la BM note que cette catégorie d’aide a pesé lourdement sur les budgets publics, alors même qu’elle profite le plus souvent et davantage aux riches, qu’aux pauvres et qu’elle génère de fortes distorsions économiques diminuant la demande de la main-d’œuvre.
Les subventions générales sont inefficaces avec des impacts relativement faibles sur la pauvreté, et les inégalités qu’elles occasionnent, génèrent des fuites énormes en faveur des riches, affirme cette étude de près de 80 pages. Dans ce contexte, le ministère des Finances a entamé deux réflexions sur les subventions des produits de base et sur les salaires, deux postes représentant des dépenses « très importantes » dans le budget de l’Etat. A indiqué, le 3 avril dernier, un cadre au même ministère. « Il y a une réfle-xion sur le ciblage de la subvention des produits de base pour réaliser des gains », car actuellement « tout le monde, y compris les gros fortunés en profitent », et une autre sur les salaires, a souligné Ferhane Sidi Mohamed, directeur général de la Direction générale de la prévision et des politiques.
Selon M. Sidi Mohamed, les subventions aux produits de première nécessité, se traduisent aussi par « la fuite des produits vers les pays limitrophes ».
Pour sa part, le ministre du Commerce, Mustapha Benbada a indiqué que « la subvention accordée au lait et aux céréales, représentait 80 % du total du soutien de l’Etat à tout le groupe alimentaire qui compte aussi le sucre et l’huile ». Il dévoile que « nous devons nous atteler à étudier ce dossier afin de trouver des alternatives et alléger le budget consacré à ce soutien ».
En marge de la visite du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, dans la wilaya d’Oran, il déclare aussi que « 50 % des quantités de farine subventionnées par l’Etat, ne sont pas utilisées dans la fabrication du pain ». Depuis 2011, le gouvernement est entré dans un cycle vicieux, qui est celui de l’achat de la paix sociale à tout prix, alors qu’en réalité, une paix sociale ne s’achète pas, elle se construit. Cependant, revoir le système de subvention pourrait provoquer des dérapages et une explosion sociale. Rappelons-nous les émeu-tes de l’huile et du sucre du 5 janvier 2011, qui ont failli faire basculer le pays dans le chaos en plein » printemps arabe « .
Dans ce cadre, l’économiste, Salah Mihoubi indique que » les autorités devraient concevoir une autre stratégie de soutien aux populations défavorisées « , donc, « les aides devraient aller uniquement aux personnes nécessiteuses en se basant sur un fichier national des revenus ».
Il est à noter que la subvention des produits de large consommation, est une prérogative qui dépasse le ministère du Commerce, voire même celui des Finances.
Par Nacera Bechar