Ces réfugiés sont considérés comme les invités de l’émir Abdelkader qui avait trouvé refuge en Syrie. Pour le président de la CNPPDH, «l’Algérie a, à travers la présence des ces réfugiés, l’occasion d’honorer et de rembourser une dette morale contractée à l’égard des Syriens».
La situation des milliers de syriens réfugiés en Algérie est désormais prise en charge par les autorités algériennes. «On ne peut pas les laisser ces femmes et enfants, qui sont dans un état de délabrement moral et précaire terrible, livrés à eux-mêmes», nous a déclaré hier Farouk Ksentini, président de la Commission nationale de Promotion et de Protection des Droits de l’homme (CNPPDH). Des propos tenus au lendemain de la réunion interministérielle consacrée à la recherche des solutions pour une meilleure prise en charge de la situation humanitaire de ces réfugiés.
Dans un communiqué du ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales, rendu public hier, il a été souligné que le département d’Ould Kablia et celui de la Solidarité nationale et de la Famille se sont réunis lundi afin d’examiner et de valider les recommandations du groupe interministériel créé à leur initiative, pour apporter les solutions humanitaires adaptées à la situation des réfugiés syriens se trouvant dans notre pays.
Selon le ministère de l’Intérieur, la première phase de ce plan d’action a débuté hier, «par la prise en charge, par chaque wilaya, avec le concours de la Sûreté nationale, du Croissant-Rouge algérien, de la Protection civile, des Scouts musulmans algériens et éventuellement de la société civile, de toutes les personnes qui sont sans abri, pour leur offrir un hébergement décent et l’alimentation nécessaire ». Et au ministère d’ajouter : «Dans une deuxième phase et au terme d’un recensement plus exhaustif qui demandera quelques jours, d’autres mesures déjà envisagées seront mises en œuvre. »
Il est à souligner que Me Farouk Ksentini a indiqué avoir reçu, il y a un mois, un représentant de ces réfugiés lequel est venu lui faire part du drame humanitaire dans lequel se trouvent ses compatriotes, d’autant que ces Syriens, environ 12.000 — le chiffre avancé par le représentant reçu au siège de la CNPPDH est de 25.000 — qui séjournent en Algérie en qualité de touristes risquent l’expulsion à l’expiration de leur séjour légal fixé à 90 jours.
C’est pourquoi, indique Me Ksentini, parmi les doléances soulevées par leur représentant figure celle de ne pas rapatrier ces réfugiés vers la Syrie, a indiqué le président de la CNPPDH. Une doléance qu’il s’est chargé, nous dit-il, de souligner dans le rapport qu’il a transmis au Président de la République. Toutefois, et au regard de l’évolution de ce dossier, l’hypothèse de l’expulsion n’est pas de mise.
En effet, la démarche qui semble avoir été retenue est celle de considérer ces refugiés comme les invités de l’émir Abdelkader qui, lui, avait trouvé refuge en Syrie. Pour le président de la CNPPDH, «l’Algérie a, à travers la présence des ces réfugiés syriens, l’occasion d’honorer et de rembourser une dette morale contractée à l’égard des Syriens». Et même si tel n’était pas le cas, il n’est pas possible, du point de vue algérien, «de demeurer insensible face au drame de ces familles qui se sont réfugiées dans notre pays». Pour le président de la CNPPDH, l’Algérie se doit de les prendre en charge jusqu’à ce que la situation en Syrie aille mieux et que ces familles puissent regagner leur pays en toute sécurité.
Interrogé sur l’information faisant état de la mise à disposition de ces familles des écoles où elles seront provisoirement hébergées, le président de la CNPPDH répond que cette éventualité peut être une solution envisageable dans la mesure où la rentrée scolaire ne se fera qu’au mois de septembre. Selon Me Ksentini, «il faut réagir dans cette situation de la même manière lorsqu’on est confronté à une catastrophe naturelle».
De son côté, le Croissant-Rouge algérien (CRA), fidèle à ses principes fondamentaux, a entrepris d’autres actions humanitaires. Il a pris attache avec ces refugiés pour leur proposer de séjourner dans un centre d’accueil à Sidi Fredj. Contacté hier par téléphone, M. Bouchakour, le SG du CRA, nous a affirmé que des bénévoles se sont rendus auprès des Syriens en vue de les informer que des moyens de transport étaient mis à la disposition de ceux qui étaient désireux de se rendre à ce centre d’accueil. Selon M. Bouchakour, le centre qui relève de Net Com est adéquat et offre de bonnes conditions d’hébergement pour 300 familles. Toutefois, tient à préciser le SG du CRA, les Syriens qui désirent demeurer dans les hôtels sont libres de le faire. «Ce qui compte pour nous, c’est de préserver leur dignité», indique M. Bouchakour.
Et d’ajouter que «cette action humanitaire lancée par son organisme s’étendra aux autres wilayas (Oran, Constantine, Tlemcen…) où d’autres réfugiés syriens ont été localisés». Pour le SG du CRA, il n’est plus possible de laisser les familles qui n’ont plus les ressources nécessaires pour s’assurer un hébergement dans un hôtel, dormir à la belle étoile. En effet, depuis leur arrivée en Algérie, de nombreuses familles n’ayant plus d’argent ont squatté des places publiques. Elles se sont majoritairement regroupées au niveau du square Port-Saïd. C’est le cas de cette mère d’une famille de 6 personnes et dont la détresse saute aux yeux. Cette femme âgée de 31 ans assure que ce n’est pas de gaité de cœur qu’elle, son mari et ses quatre enfants âgés de 15, 12, 8 et 2 ans dorment à même le sol au Square.
«Au début, nous passions la journée ici avec les autres, et à la nuit tombée, nous allions à l’aéroport pour dormir». Mais ces derniers temps, la famille, dont le chef était un commerçant à Alep, reste sur place. A notre question de savoir comment elle vit cette situation, elle répond d’une voix triste qu’avoir quitté son pays «est une déchirure et qu’elle ne vit qu’avec l’espoir d’y retourner le plus vite possible». Une fois que la situation se sera normalisée, précise-t-elle.
Nadia Kerraz
MAE :
“La question des ressortissants syriens séjournant en Algérie est prise en charge”
La question des ressortissants syriens qui séjournent actuellement en Algérie est prise en charge par les autorités algériennes et a fait l’objet de plusieurs réunions interministérielles de coordination, a indiqué mardi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, M. Amar Belani, dans une déclaration. « S’agissant des ressortissants syriens qui séjournent actuellement dans notre pays, je confirme que ce sujet est bien pris en charge par les autorités algériennes et qu’il a fait l’objet de plusieurs réunions interministérielles de coordination », a précisé M. Belani.
« Partant de notre devoir de solidarité à l’égard de ces ressortissants syriens, un dispositif spécifique et des mesures pratiques de soutien et d’assistance seront mis en œuvre incessamment à travers l’implication d’un certain nombre d’intervenants publics ou auxiliaires, dont notamment les services du ministère de la Solidarité nationale et de la Famille et le Croissant-Rouge algérien, dont les comités de wilaya sont déjà à pied d’œuvre », a-t-il expliqué.