Les cas de malades nécessitant des soins à l’étranger sont légion, mais il ne s’agit souvent pas d’une simple démarche. Car, en fait, il est beaucoup plus facile de mourir que de se faire soigner à l’étranger.
La modernité d’un pays ne se mesure pas seulement à ses richesses matérielles mais aussi et surtout à sa capacité de réaliser des autosuffisances et des développements pertinents qui répondent aux besoins et aux préoccupations de la population. La santé est l’une des préoccupations majeures des Algériens et une modernisation concrète de l’hôpital peine à se réaliser laissant en danger la vie de centaines de malades qui en plus de la négligence se retrouve dans l’incapacité d’être pris en charge pour certaines maladies. Aujourd’hui, le secteur de la santé accuse un énorme retard de compétences et de moyens adéquats en matière de prise en charge de certaines maladies. Tandis que certains services demeurent étroits par rapport au nombre de patients, d’autres spécialités sont totalement inexistantes dans les hôpitaux faute de spécialistes et de plateau technique. Les cas de malades nécessitant des soins à l’étranger sont légion, mais malheureusement, il ne s’agit souvent pas d’une simple démarche pour qu’un souffrant puisse se faire soigner à l’étranger. Car, en fait, il est beaucoup plus facile de mourir que de se faire soigner à l’étranger. Par ailleurs, ce n’est pas seulement la question du coût excessif des soins à l’étranger qui se présente comme un mal nécessaire mais encore la non-collaboration des responsables de la santé à faciliter la tâche aux malades et à leur famille pour avoir le droit de se faire soigner ailleurs avant que cela ne soit trop tard. Pour certains services où les capacités d’accueil sont limitées par rapport au nombre de patients nécessitant la prise en charge, des médecins s’aventurent à soigner des cas sans avoir les moyens ni les compétence qu’il faut. À titre d’exemple, l’Algérie compte seulement quelques services qui soignent les brûlés. L’hôpital de Douera avec ses capacités et moyens très limités est incapable de prendre en charge tous les cas qui viennent des quatre coins du pays. Faute de places, il est impossible d’avoir la chance d’être hospitalisé au service des brûlés. Plusieurs cas sont laissés-pour-comptes et finissent par avoir des complications. Au lieu d’être soignés à l’intérieur des hôpitaux ou orientés à l’étranger, les brûlés se
«soignent» par les amputations… Sur un autre volet, une famille d’un enfant nommé Manil a exposé les difficultés de la prise en charge à l’étranger. Le petit Manil est atteint d’un SCID-X ou DICS qui est un déficit immunitaire combiné sévère lié au chromosome X. Il s’agit d’une maladie héréditaire provoquée par la transmission d’un gène défectueux de la maman aux enfants de sexe masculin les privant ainsi de toutes leurs capacités immunitaires. Son père Mouloud Blidi a formulé une demande à la commission médicale nationale chargée des transferts des malades à l’étranger qui a donné un accord de principe pour la prise en charge de Manil, en France, dans le cadre des conventions intergouvernementales. Malheureusement, les hôpitaux français ont bloqué le dossier, comme c’est le cas d’ailleurs, de plusieurs autres malades algériens. Ce refus a été expliqué par le faite que la Caisse nationale d’assurances sociales (Cnas) n’a pas payé ses dettes ainsi que les frais des soins du nouveau cas. La Cnas rejette cette responsabilité sur la tutelle et cette dernière est aux abonnés absents. La non-transparence dans les transferts des malades est par ailleurs, soulignée par plusieurs observateurs. Le Professeur Mustapha Khaiati, président de la Forem, plaide dans ce sens pour «l’installation d’une commission médicale indépendante chargée des transferts des malades». Car, ce sont seulement les malades pistonnés qui ont le privilège de se faire soigner à l’extérieur, tandis que plusieurs malades se trouvent dans un désarroi total de survivre ou de mourir.
Par Yasmine Ayadi