Le 10 février Abdelaziz Bouteflika annonce sa candidature pour un cinquième mandat. C’est la première fois, à cette occasion, que l’idée d’une conférence nationale est suggérée officiellement.
« Si vous m’honorez de votre confiance précieuse, le mois d’avril prochain, j’inviterai dès cette année toutes les forces politiques, économiques et sociales de la Nation à une conférence nationale consacrée à la concrétisation du consensus sur les réformes et les changements que notre pays devra engager », avait-il suggéré dans sa lettre.
La candidature de Bouteflika intervient dans une conjoncture de tension telle que la question de la conférence n’est qu’accessoirement retenue par l’opinion. Il faudrait attendre le jour du dépôt de sa candidature le 3 mars, pour qu’Abdelaziz Bouteflika convoque de nouveau cette option politique.
Celle de tenir « juste après l’élection présidentielle, d’une conférence nationale inclusive et indépendante pour débattre, élaborer et adopter des réformes politiques, institutionnelles, économiques et sociales, devant constituer le socle du nouveau système rénovateur de l’Etat national algérien », de même que « l’élaboration et l’adoption par référendum populaire d’une nouvelle Constitution qui consacrera la naissance de la nouvelle République et du nouveau système algériens ». L’acte de candidature intervenu le dernier jour des dépôts au Conseil constitutionnel dans des circonstances de grande tension semble déjà avoir mis le feu aux poudres. Les Algériens sont sortis le vendredi en masse pour exprimer leur refus de l’option du cinquième mandat.
La réaction inattendue de la rue a fait basculer l’Algérie dans une situation de crise. Une situation accentuée par le fait que le Président se trouvait hospitalisé à Genève. Au lendemain de son retour de Suisse, M. Bouteflika accède à la demande populaire, annonce le retrait de sa candidature pour un cinquième mandat et le report de l’élection présidentielle.
Il revient dans le détail sur la préparation de ladite Conférence nationale « inclusive » et « indépendante » qui sera, selon le contenu du message, « une enceinte dotée de tous les pouvoirs nécessaires à la discussion, l’élaboration et l’adoption de tous types de réformes devant constituer le socle du nouveau système que porte le lancement du processus de transformation » de l’Etat.
Mission complexe
La conférence dont l’objectif est particulièrement ambitieux est explicitée : elle « sera équitablement représentative de la société algérienne comme des sensibilités qui la parcourent», note le Président, ajoutant qu’elle « organisera librement ses travaux, sous la direction d’une instance présidentielle plurielle, avec à sa tête un président qui sera une personnalité nationale indépendante, consensuelle et expérimentée». Le jour même Noureddine Bedoui remplace Ahmed Ouyahia au poste de Premier ministre avec Ramtane Lamamra comme vice-Premier ministre. Un duo installé en pleine crise et dont la mission est de mettre en place un gouvernement de transition.
La mission s’avère complexe dans une atmosphère de tension exacerbée. La Conférence nationale, principal cadre politique de la feuille de route du pouvoir, semble toujours en suspens, parasitée par la crise. L’incertitude est d’autant plus aggravée par une situation de déficit de confiance entre le mouvement populaire et le pouvoir. Vendredi 15 mars, les Algériens réfutent la démarche et l’expriment par des manifestations monstres, uniques dans l’histoire de par le nombre de participants.
La crise semble se compliquer. Le 18 mars, à la veille de la fête de la Victoire, le chef de l’Etat adresse aux Algériens un message par lequel il s’engage à ce que cette Conférence se tienne dans un « très proche avenir ». Il annonce son intention d’avancer le calendrier de la tenue de cette assemblée extraordinaire destinée à réunir les Algériens dans leurs diversité pour trouver une issue consensuelle à cette crise politique aiguëe.