Par petites doses, le pouvoir affiche une volonté claire d’étouffer l’expression des voix discordantes s’agissant de ses choix stratégiques. Qu’il s’agisse de l’élection présidentielle ou de la révision de la Constitution, le régime, qui a le monopole des moyens de l’Etat multiplie à son service exclusif les pratiques d’antan. Pas une voix et encore moins d’une action publique qui sorte des rangs n’est tolérée.
Des journalistes qui ont eu l’outrecuidance de vouloir tenir un petit rassemblement pour dire leur opposition- en tant citoyens- à un quatrième mandat du président Abdelaziz Bouteflika ou la «transmission héréditaire du pouvoir», l’ont vérifié à leurs dépens. Ils se sont pourtant donnés rendez-vous à la place de la «liberté de la presse», située rue Hassiba Ben Bouali à Alger-centre. Mais, c’était compté sans la détermination des autorités à interdire toute action qui ne s’inscrirait pas dans le discours du pouvoir.
La place de la «liberté de la presse» qui symbolise les sacrifices de la corporation durant les années rouge avec prés d’une certaine de victimes, a été prise d’assaut tôt le matin par un «bataillon» de CNS, prêts à user de leurs matraques contre des journalistes qui n’ont que la plume et la voix pour s’exprimer. Il n’y a donc pas de liberté d’expression dans ce lieu dédié pourtant aux professionnels de la presse. En désespoir de cause, les quelques dizaines de journalistes ont dû se réfugier à la Maison de la presse Tahar Djaout, en cette symbolique journée commémorative des événements sanglants du 5 octobre 88. Alger est ainsi devenu une grande caserne où il n’est plus possible de bouger y compris pour une petite manifestation pacifique.
Parole aux seuls laudateurs Affolé, le régime ferme toute forme d’expression qui risquerait de le montrer dans sa nudité. Faut il souligner que le rubicond à été franchi mercredi dernier quand des représentants de 15 partis politiques agrées, ont été chassés comme des malfrats de l’hôtel Essafir où ils devaient animer une conférence pour dire «non» à un 4ème mandat et s’opposer aussi à la révision de la Constitution. Pendant ce temps, n’importe quelle Association ou comité de soutien à Bouteflika peut organiser à volonté des activités. La seule condition est que l’action vise à réaffirmer l’allégeance des organisateurs à «Fakhamatihi» ou encore de farder son bilan. Comme ce fut le cas pour le sulfureux président de «l’association de la réconciliation nationale», qui a eu droit à la tribune du Forum du journal El Moudjahid pour dresser un constat incroyablement positif de la politique de Bouteflika.
Il va de soi que ces pratiques indignes d’un régime qui se gargarisent de démocratie, entament déjà la crédibilité des prochaines échéances politiques qu’il s’apprête à organiser. Comment, en effet, prétendre jouer les règles démocratiques, quand on impose un monologue en guise de débat politique ? Pourquoi les opposants à un 4ème mandat et la révision de la Constitution voire même à la personne du président Bouteflika n’auraient pas le droit d’exprimer leurs points de vue dans leurs pays et par amour de leur pays ? A moins de considérer l’Algérie comme une entreprise familiale, rien ne justifie cette chape de plomb qui s’abat sur ceux dont le discours empêche de réfléchir en rond.
Hamid Merakchi