Près de 500.000 personnes l’ont accompagné à sa dernière demeure,Chérif Kheddam repose face au Djurdjura

Près de 500.000 personnes l’ont accompagné à sa dernière demeure,Chérif Kheddam repose face au Djurdjura

Un hommage grandiose a été rendu à l’artiste

L’artiste, indéniablement celui qui a le plus donné à la chanson kabyle, a été, le long de sa vie, humble, généreux et travailleur…

Jamais dans l’histoire, le village de Boumessaoud, à Aïn El Hamman, n’a connu pareille marée humaine. Ils étaient des centaines de milliers de personnes hier à accompagner le géant de la chanson kabyle à sa dernière demeure. C’est dans l’antre du Djurdjura qu’il a si merveilleusement chanté, que Chérif Kheddam repose pour l’éternité. L’homme est parti mais son oeuvre est immortelle. Ses centaines de milliers de fans étaient tristes mais dignes de leur maître qui les a bercés par ses mélodies. Ils étaient de toutes les catégories et de toutes les générations.

L’artiste, indéniablement celui qui a le plus donné à la chanson kabyle, a été, le long de sa vie, humble, généreux et travailleur… Il y avait des citoyens de tous les domaines. Des artistes venus de toute l’Algérie, des représentants du monde politique, du monde sportif. Il y avait surtout des anonymes par milliers en procession.

Tôt dans la matinée, d’hier, la petite bourgade de Boumessaoud située sur les cimes du Djurdjura n’avait plus d’espace pour accueillir un aussi grand monde. Les petits sentiers ne pouvaient plus contenir des dizaines de milliers de véhicules. Les embouteillages se formaient déjà sur des dizaines de kilomètres. Tous convergeaient vers la demeure où a été déposée la dépouille de Cherif Kheddam. Aux alentours du centre du village, la procession avançait lentement. Les visiteurs voulaient voir, pour une dernière fois, le visage de l’homme qui a donné toute sa vie à l’art.

Aux environs de midi, les organisateurs éprouvaient d’énormes de difficultés pour orienter tout ce monde. Sur le chemin menant vers la dépouille, la procession avançait lentement. Ni la place du village ni même toute la journée n’auraient suffi pour voir une dernière fois l’artiste. Hélas! il a été enterré avant que tous ne puissent le voir.

Mais, qu’importe, tous étaient venus jusqu’à Boumesaoud, village natal de cet homme qui a illuminé toute l’Algérie et le monde artistique. Chapeau bas! l’artiste et repose en paix! semblaient dire les milliers de gens en communion. Chérif Kheddam est parti mais son oeuvre intemporelle enchantera éternellement les vivants.

L’homme connu pour son humilité, selon témoignages, n’est jamais resté seul. Jusqu’à sa dernière demeure, l’homme a été accompagné par des milliers d’amis. Chérif Kheddam a gagné l’estime de tout le monde et toutes les générations. A son enterrement, il y avait des représentants du monde artistique et ses amis qui l’ont côtoyé à la Radio nationale. Le wali de Tizi Ouzou, Abdelkader Bouazgui s’est rendu dans la maison du défunt, accompagné d’une délégation de la wilaya de Tizi Ouzou. Le président de l’Assemblée populaire de wilaya, Mahfoud Belabès, lui aussi a tenu à lui rendre un hommage. De son côté, le député, M. Saïd Lakhdari, a tenu également à rendre hommage à l’artiste et transmettre un message de Abdelaziz Belkhadem à la famille du regretté. Devant la demeure, il y avait le président de l’UDR, Amara Benyounès ainsi que des représentants de plusieurs partis politiques à l’instar du FFS.

Sur les lieux, ils étaient nombreux les artistes venus rendre un dernier hommage au maître. Amour Abdenour, Dahmani Belaïd, Hacene Ahrès, Kamel Hammadi ainsi que les jeunes talents qui émergent dans la chanson kabyle. Il y avait aussi des écrivains et des éditeurs à l’instar de Amine Zaoui, Mohand Ouramdane Larab et Brahim Tazaghart. Jusqu’à hier soir, des processions affluaient encore sur Boumessaoud.

Hier le Djurdjura a enterré son fils, ou il l’a plutôt accueilli dans ses bras. Chérif Kheddam était parti jeune vers la capitale avant de débarquer en France. Il avait fait des études coraniques dans sa localité mais l’homme était attiré déjà par l’art, la musique et la chanson. Son talent a été reconnu par les plus grands et son humilité a fait le reste. Les personnes qui ont témoigné insistaient surtout sur ce trait de caractère que seuls les grands parviennent à avoir, l’humilité. L’artiste qui a découvert beaucoup de talents et non des moindres était accessible à tout le monde par son humilité. Ses amis qui ont travaillé avec lui à la radio se souviennent d’un homme dynamique, travailleur, humble et qui aimait aider les autres. N’est-ce pas lui qui répondait à un animateur d’une télévision française que son nom signifiait «travailleur». Oui, Cherif Kheddam a travaillé et a donné à la chanson algérienne ses marques de noblesse. C’est à son honneur. Repose en paix l’artiste.

La dépouille mortelle est arrivée jeudi

La dépouille mortelle du maître de la chanson kabyle Cherif Kheddam, décédé lundi dernier dans un hôpital parisien, est arrivée jeudi soir à l’aéroport international d’Alger Houari-Boumediene à bord d’un avion en provenance de Paris. Etaient présents à l’arrivée de la dépouille du défunt, la ministre de la Culture, Khalida Toumi, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Tayeb Louh, le secrétaire général de l’Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd ainsi que les proches du défunt, des artistes et des hommes de culture. Une grande tristesse et beaucoup d’émotion se lisaient sur les visages des artistes venus nombreux rendre un dernier hommage et partager la douleur de la famille de Cherif Kheddam. «Nous oeuvrons à préserver l’oeuvre de cet homme connu pour sa modestie en vue d’en faire bénéficier les générations montantes», a déclaré la ministre de la Culture. Pour sa part, Abdelmadjid Sidi Saïd a mis l’accent sur «la valeur artistique de l’homme qui oeuvrait à faire connaître la chanson algérienne à l’étranger, mû par son amour pour la patrie». «Le défunt a beaucoup donné à la musique algérienne», a souligné l’auteur compositeur Kamel Hamadi, ami du défunt.

Ils ont dit à chaud

GUERROUDJ RABAH (poète et producteur d’émissions à la radio Chaîne II): «C’est un grand monsieur qu’on vient de perdre. Il a été longtemps mon voisin à Bouzaréah. On se voyait beaucoup à la radio. Il était entreprenant et surtout accessible.

AMOUR ABDENNOUR (Chanteur): «Nous perdons un homme dont la valeur est inestimable. Il a été derrière toutes les réussites de la chanson kabyle. Nous devons être à la hauteur en maintenant la barre très haut, comme il l’a fait. Il faut beaucoup de travail. Son oeuvre restera éternellement une richesse pour la chanson.

DAHMANI BELAID (Chanteur): «Que Dieu ait son âme. Nous lui devons tout. C’est un grand personnage. Je l’ai connu à la radio. Il m’a beaucoup aidé. Nous lui devons ce que nous sommes.»

MOHAND OURAMDANE LARAB (Ecrivain): «C’est un grand monsieur. Nous perdons là quelqu’un de très grand mais il a beaucoup laissé pour les générations futures.»

BRAHIM TAZAGHART (Editeur): «Aujourd’hui en Kabylie, il ne fait pas beau malgré le soleil qui brille. Nous perdons un homme d’une grandeur inouïe. Les générations futures devront fournir beaucoup de travail pour continuer le travail. Aujourd’hui, nous sommes convaincus que tout le monde doit mettre du sien, à l’instar de Chérif Kheddam, pour porter plus haut l’Algérie.»