Les connexions entre Aqmi et Boko Haram confirmées : La coopération pour se prémunir contre le terrorisme
L’Algérie s’emploie à renforcer une dynamique sous-régionale dans l’objectif d’empêcher toute tentative de sanctuarisation des groupes terroristes dans le Sahel, et prévenir les prises d’otages.
C’est demain que le groupe de travail sur le renforcement des capacités de la lutte antiterroriste au Sahel tiendra sa première réunion au palais des Nations, sous la coprésidence de l’Algérie et du Canada. Cette rencontre intervient seulement deux mois après la conférence d’Alger sur le partenariat, la sécurité et le développement au Sahel, tenue les 7 et 8 septembre dernier, soutenue par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Pendant deux jours, un panel d’experts aura à débattre le phénomène du terrorisme, question d’envergure planétaire. Les délégations diplomatiques qui se suivent et viennent à Alger renseignent sur l’implication directe de l’Algérie dans la gestion des crises régionales.
Le rapport récent présenté par le service de recherche du Congrès américain (Congressional Reaserch Service), dépendant directement de cette instance souveraine, a tracé les sillons de toute la démarche sécuritaire actuelle. «L’Algérie est une puissance militaire dominante dans la région», a noté ce rapport.
Au bout de quelques années, la donne a complètement changé. Se bornant à croire et à dire que le terrorisme est « juste » un phénomène régional, les mêmes pays qui ont boudé l’Algérie pendant qu’elle était à feu et à sang durant plus d’une décennie se bousculent, aujourd’hui, pour bénéficier de son expérience de lutte.
S’agissant de la rencontre de demain, il faut souligner que les efforts de l’Algérie pour sensibiliser les pays africains sur les dangers du terrorisme «se déclinent également en direction du voisinage immédiat maghrébo-sahelien», comme l’a annoncé récemment Rezzag Bara, conseiller à la présidence de la République et ancien président de l’Observatoire national des droits de l’homme. En effet, l’Algérie s’emploie à renforcer une dynamique sous-régionale dans l’objectif d’empêcher toute tentative de sanctuarisation des groupes terroristes dans le Sahel et prévenir les prises d’otages. M. Bara a également mis en relief la nécessité du développement économique et social dans le cadre d’un partenariat rénové avec les acteurs extrarégionaux «sans aucune ingérence extérieure». Même si les intérêts des pays sont parfois différents, la coopération internationale est plus qu’indispensable, car le Sahel reste une zone difficilement contrôlée en raison, notamment, des considérations d’immensité géographique.
Du même avis, M. Bara a fait savoir qu’il est important de lutter pour «l’élargissement du consensus international pour la prohibition du paiement des rançons aux groupes terroristes et lutter contre les connexions entre le terrorisme et la grande criminalité organisée».
Quant à M’hand Berkouk, directeur du Centre de recherche stratégique et sécuritaire (CRSS), il avait souligné que le Sahel est une poudrière en termes de sécurité.
Explicite, il précise que cette zone connaît trois types de conflits asymétriques : «terrorisme transnational, incapacité des Etats à s’autogouverner sur le plan sécuritaire, due notamment aux problèmes ethniques dans certains pays comme la Mauritanie, et enfin la conflictualité décisionnelle, en termes de gestion et de prise de décisions sur les questions de sécurité nationale, au Mali et au Niger en particulier».
Au centre des débats figurera la crise libyenne qui est une question centrale pour la sécurité au Sahel. Le pays qui traverse une période de dégradation, celle de la prolifération de la violence, caractérisée par une absence totale de contrôle sur les armes légères et les armements tactiques, constitue une menace pour la région. D’où la nécessité de converger les points de vue et trouver une solution commune.
Fouad Irnatene
Les connexions entre Aqmi et Boko Haram confirmées
La coopération pour se prémunir contre le terrorisme
Parce que sa progression a été rendue possible par l’éclatement, notamment, du conflit libyen, le terrorisme, telle la gangrène, gagne du terrain. Sur le continent africain, cette avancée aurait été encore plus ressentie sans la conjugaison des forces des pays du Sahel et le développement de leur coopération avec les pays occidentaux qui ne ménagent plus leurs efforts et moyens pour circonscrire ce fléau. La forte participation de pays autres qu’africains à la rencontre des 7 et 8 septembre dernier qui s’est tenue à Alger, pour dégager les contours de la nouvelle stratégie de lutte contre le terrorisme, le prouve si besoin est. Mais, aujourd’hui, ce ne sont pas uniquement les pays du champ qui sont sous la menace d’Aqmi, qui a trouvé en la chute du régime libyen une aide providentielle pour s’approvisionner en armes et en hommes. De nouveaux moyens font craindre le pire, car ils ne peuvent que renforcer les capacités de nuisance des groupes armés. Une réalité qui n’échappe ni aux gouvernements des pays du champ ni à ceux de ces puissances militaires qui découvrent que face à cette organisation qu’est Aqmi, c’est la planète entière qui se trouve dans l’obligation de faire bloc face à cet ennemi commun. De mémoire de journaliste, jamais encore les agendas officiels n’ont noté autant de réunions et rencontres consacrées à la lutte antiterroriste. A peine sortis d’une réunion que les responsables chargés du dossier du terrorisme sont tenus de se rendre dans une autre ville, qui parfois se trouve à des milliers de kilomètres. Pour preuve, la réunion d’Alger de demain et jeudi n’est pas encore tenue que déjà une autre est annoncée pour début décembre à Nouakchott. Une réunion dont la nouveauté consistera à élargir le cercle de la participation à de nouveaux pays africains, le Nigeria, le Tchad et le Burkina Faso en l’occurrence, en raison de la forte présomption sur l’existence de liens entre Boko Haram, un Nigérian, et les groupes terroristes agissant dans le Sahel. Des liens confirmés par une étude américaine qui s’est référée aux nouvelles méthodes terroristes de Boko Haram pour apporter la preuve de son constat. Pour le centre américain des études stratégiques Stratfor, qui a réalisé cette étude, l’évolution rapide du mode opératoire des attaques terroristes perpétrées par le groupe nigérian Boko Haram est la preuve irréfutable de l’existence de liens avec les autres groupes terroristes africains, dont Aqmi. Un constat qui en définitive ne fait que confirmer ce que l’Algérie n’a eu de cesse de souligner. Les connexions constatées entre Boko Haram et les groupes terroristes agissant dans les pays du Sahel ne pouvaient que sauter aux yeux pour tout expert de ce dossier. Et si les Algériens ne sont pas du genre à se gargariser en disant « nous vous avons prévenu », il n’en reste pas moins qu’il faut désormais tirer les leçons de la confirmation de leurs propos. Le terrorisme est un fléau destructeur qu’il faut prendre en charge avec toute l’attention qu’il requiert. Car, en face, il y a des groupes armés qui n’ont ni foi ni loi.
Nadia Kerraz