Premier tour des présidentielles post guerre, Les Maliens ont voté massivement

Premier tour des présidentielles post guerre, Les Maliens ont voté massivement
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Après 18 mois de crise, les Maliens se sont rendu massivement hier aux urnes pour élire leur future président. Au moment où nous mettons sous presse, aucun taux de participation n’a été communiqué ni d’ailleurs la tendance générale de ces élections. Mais les Maliens donnent Ibrahim Aboubaker Kaita et Soumayla Cissé comme les favoris pour remporter ce premier tour.

Bamako, la capitale malienne, a vécu hier une journée de fête électorale. Dans les rues, les marchés, l’ambiance «électorale» battait son plein. Hommes et femmes ont sorti leurs habits neufs pour marquer cet événement crucial pour l’avenir du pays. Il était 8 h, heure locale, 9 heures à Alger.

Tous les bureaux de vote de la capitale ont ouvert leurs portes, exception faite pour quelques centres qui ont accusé du retard en raison de problèmes logistiques notamment. Nous nous sommes rendu dès les premières heures de la matinée dans une école de la capitale pour prendre la température électorale de cette matinée de dimanche. L’établissement scolaire faisant office de centre de vote est complètement en ruine, des mares d’eau, des ordures jonchent la cour de l’école.

Au grand portail, un dispositif sécuritaire impressionnant, composé de casques bleus de l’ONU et de l’armée malienne, a été mis en place. Les soldats procèdent minutieusement à la vérification de l’identité des électeurs. Pas question de rentrer sans sa carte NINA (une carte d’électeur) où son badge d’observateur électoral.

A l’intérieur de l’école, c’est carrément la bousculade. Difficile de se frayer un chemin dans une immense foule déterminée et résolue à voter. Des files interminables se sont formées devant les bureaux de vote du matin jusqu’au soir. Plusieurs centaines d’électeurs attendaient de pouvoir voter avant l’heure d’ouverture des bureaux, à 10 heures.

L’un d’eux, Kalifa Traoré, 56 ans, conducteur d’engin, a déclaré : «On est fatigué de la mauvaise gouvernance, j’invite les candidats à accepter les résultats de notre vote». Selon lui, les différents présidents qui se sont succédé ne font qu’aggraver la crise sur le plan politique et surtout économique. «Au Mali, il nous faut un homme neuf qui va travailler pour l’intérêt de tous les Maliens sans exception», dira un autre électeur bamakois.

Invité à s’exprimer sur la crise du Nord, notre interlocuteur dira que les Touaregs sont aussi maliens et il faut dialoguer avec eux et améliorer leurs conditions de vie. Tout est en place, dans le cadre restreint des ambitions affichées par les autorités qui ont suffisamment martelé ces dernières semaines qu’il ne s’agira pas d’une élection parfaite.

Les grands partis ont dépêché des délégués dans les bureaux de vote du pays pour surveiller le déroulement du scrutin. A Kidal, bastion des Touaregs et de leur rébellion dans le nord-est du pays où les tensions entre communautés touaregs et noires sont vives, le vote a commencé en retard dans plusieurs bureaux, a-t-on constaté.

A l’entrée de l’un d’eux, chaque électeur était contrôlé et fouillé par des soldats togolais de la force de l’ONU au Mali, la Minusma. A Gao, plus grande ville du nord du Mali, plusieurs dizaines de personnes faisaient la queue dans le calme pour voter dans un centre électoral installé dans une école près de la place de l’Indépendance.

Le président malien par intérim, Dioncounda Traoré, a affirmé après avoir voté au premier tour de la présidentielle que c’était «le meilleur scrutin » organisé au Mali depuis l’indépendance en 1960. «Je suis très satisfait des conditions générales d’organisation du scrutin.

Je pense que de mémoire de Malien, c’est le meilleur scrutin qu’on organise depuis 1960», a déclaré le chef d’État à des journalistes après avoir voté à Bamako. «J’ai voté pour le candidat qui m’a convaincu pendant la campagne», a-t-il ajouté sans dévoiler son nom. Lui ne se présente pas au scrutin. Ils commenceront à recevoir des estimations vers 22 heures (heure locale).

Si 85% des cartes des 6,9 millions d’électeurs ont été distribuées, plusieurs obstacles au bon déroulement du scrutin subsistent : redéploiement inachevé de l’administration centrale dans le Nord, absence de retour chez eux de 500 000 réfugiés et déplacés ayant fui le conflit et dont la plupart n’ont pas pu voter.

CISSÉ OU IBK, QUI SERA LE FUTUR PRÉSIDENT MALIEN ?

Au départ, ils étaient 36 à vouloir briguer le poste de président du Mali. Au début du mois de juillet, à seulement quelques semaines du premier tour du vote qui s’est tenu hier, la Cour constitutionnelle malienne n’a finalement autorisé que 28 d’entre eux à entrer en campagne et l’un d’entre eux a choisi de se retirer de la course.

Cependant deux candidats se détachent sur les vingt-sept que compte le premier tour de l’élection présidentielle d’hier. Même si les résultats de ces élections ne seront connus officiellement qu’aujourd’hui, les Maliens donnent deux favoris.

IBRAHIM BOUBACAR KEITA

Connu dans le pays par ses initiales IBK, Keita est le poids lourd de cette élection. Il a détenu plusieurs portefeuilles au sein de précédents gouvernements et occupé le poste de Premier ministre de 1994 à 2000. Chef du Rassemblement pour le Mali (RPM), il a également été président de l’Assemblée nationale avant de se présenter deux fois à la présidentielle, sans succès, en 2002 et 2007.

Pendant sa campagne, IBK a promis de restaurer «l’honneur» du Mali. Ayant tenu tête aux syndicats lorsqu’il était à la tête du gouvernement, il a une réputation de fermeté qui joue en sa faveur, beaucoup de Maliens jugeant que cette qualité est nécessaire pour rétablir l’état de droit dans le pays.

SOUMAILA CISSÉ

Originaire de la région de Tombouctou, ingénieur en informatique de formation, Cissé a été secrétaire général de la présidence sous Alpha Oumar Konaré en 1992 puis ministre des Finances dans les années 1990.

Il se présente pour l’Adema (Alliance pour la démocratie au Mali), le parti de Konaré, à la présidentielle de 2002, mais échoue face à Amadou Toumani Touré et crée son propre parti, l’URD (Union pour la République et la Démocratie), avant de présider la commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine de 2004 à 2011 au Burkina Faso voisin.

Soumaila Cissé a gagné ses galons d’économiste même s’il n’a pas été épargné par des accusations de mauvaise gestion. Il a été accusé de corruption par la junte militaire qui s’est emparée du pouvoir en mars 2012.

M.A.M.