L’affaire Khelil, le tweet du Premier ministre français et la relation pouvoir-opposition ont été les principaux points évoqués par l’ancien chef de gouvernement.
Lors d’une conférence de presse animée au siège de son parti, Ali Benflis, président de Talaie El Houriyet, a réagi à la publication par le Premier ministre français, Manuel Valls, d’une image de Bouteflika très affaibli par la maladie, se demandant ironiquement : «La crise du pays est celle d’un régime ou d’une image ?!» Et d’enchaîner que «la souveraineté de l’Algérie, sa grandeur et la force de son peuple sont plus immunisés qu’ils soient souillés par une quelconque photo». Il en profitera aussi pour répondre aux accusations d’Ahmed Ouyahia contre l’opposition : «Le danger vient de ceux qui n’agissent pas. Non pas de l’opposition qui se réunit pour chercher les moyens de sortie de la crise», assène Benflis, dénonçant «les affabulations de traîtrise» véhiculées par la pouvoir pour s’attaquer à l’opposition.
Enfin, le président de Talaie El-Houriyet a appelé «à un consensus entre le pouvoir et l’opposition» pour sortir le pays de sa crise, en organisant des élections libres et transparentes, suivies de l’élaboration d’une Constitution consensuelle et de la formation d’un gouvernement d’union. Sur le plan économique, Benflis a critiqué l’emprunt obligataire lancé par le gouvernement, et ce, après la tentative «échouée» de bancarisation de l’argent de l’informel. «C’est un passage d’une amnistie fiscale pénalisée à une amnistie fiscale rémunérée.»
Affaire Khelil : «Le pouvoir a discrédité la justice»
A une question sur le retour au pays de l’ancien ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, Benflis accuse le pouvoir en place d’avoir discrédité l’appareil judiciaire en Algérie. «La justice se trouve, aujourd’hui, entre le marteau du pouvoir et l’enclume des lois.» «La justice a reçu un coup dur de la part du pouvoir politique.» Benflis, qui répondait à une question concernant le retour, en Algérie, de l’ancien ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil a évité de tirer sur la personne en question, préférant pointer du doigt le rôle que devait jouer le pouvoir judiciaire. «Nous n’avons jamais dit que cet homme a volé. C’est bien la justice qui, au début, a parlé de corruption.
Mais elle n’a rien dit à la fin», a-t-il déclaré, en allusion au mandat d’arrêt international lancé auparavant contre l’ancien ministre, suivi du silence des instances judiciaires depuis son retour des Etats-Unis. Pour lui, le «coup» asséné à la justice «l’a réduite à un appareil dépendant du pouvoir et orienté selon les calculs et intérêts de ce dernier». Sans pour autant le dire, le conférencier semble pointer ce «changement» de traitement vis-à-vis de l’ancien ministre qui, après avoir été l’homme à abattre, reçoit les honneurs des zaouias et le soutien des partis du pouvoir.
La justice, soutient l’ex-candidat malheureux à la présidentielle du 17 avril 2014, «est entre le marteau du pouvoir et l’enclume des lois et de la conscience». Benflis, qui dit «ne pas être un juge, ni un procureur», a appelé à «libérer la justice pour qu’elle s’autosaisisse dès lors qu’une affaire est éclatée». «Il y a une grande criminalité financière, une surfacturation, un trafic, une révision douteuse des enveloppes allouées aux projets, une évasion fiscale…», a lâché le président de Talaie El Houriyet, non sans lier la faiblesse de l’appareil judiciaire «au régime autoritaire qui n’accepte pas la séparation des pouvoirs». D’ailleurs, c’est dans le même sens que Benflis a construit sa réponse concernant le scandale planétaire «Panama Papers». «Il faut un pouvoir légitime capable de faire face à la grande criminalité. Une justice indépendante et des organes de lutte contre la corruption libérés « , a-t-il soutenu.
Par Aïssa Moussi