Les ONG font plier Mohammed VI
Les 24 Sahraouis qui ont été condamnés, le 17 février 2013, de deux à 30 années de prison par la cour militaire de Rabat, vont-ils bénéficier d’un nouveau procès?
Une bataille de gagnée pour les défenseurs des droits de l’homme. Les civils ne comparaitront plus devant un tribunal militaire au Maroc. Un projet de loi a été adopté le 14 mars, lors d’un Conseil des ministres présidé par le souverain marocain. «Ce projet introduit des changements profonds visant à promouvoir la justice militaire, en la distinguant du modèle du tribunal d’exception, et de l’inscrire parmi les institutions judiciaires spécialisées, garantes des droits et des libertés.
Il prévoit d’exclure les civils de la compétence du tribunal militaire quels que soient les crimes commis…» rapporte la presse marocaine. Cela a été rendu possible grâce à la pression incessante exercée par les organisations de défense des droits de l’homme sur le pouvoir marocain. Le travail commence à porter ses fruits.
Reste à savoir si les 24 prisonniers politiques sahraouis qui ont été condamnés, le 17 février 2013, de deux à 30 années de prison par la cour militaire de Rabat vont bénéficier d’un nouveau procès. Incarcérés dans la prison locale de Salé (ville jumelle de Rabat), depuis le démantèlement du camp de Gdeim Izik près d’El Ayoun, le 8 novembre 2010, par les forces de répression marocaines, ils avaient comparu devant le tribunal militaire de Rabat le 8 février 2013. Cela «ne répond pas aux normes internationalement reconnues d’un procès équitable» avait indiqué Amnesty International. Un procès «faussé dès le départ», avait fait remarquer l’ONG de défense des droits de l’homme. «Le procès de civils devant un tribunal militaire, ne répond pas aux normes internationalement reconnues d’un procès équitable.
Les 24 accusés doivent être traduits devant un tribunal civil, avec toutes les garanties des droits de l’homme que cela suppose et, en aucun cas, les détenus ne doivent être condamnés à mort», avait déclaré Philip Luther, directeur d’Amnesty International au Moyen-Orient et Afrique du Nord, qui a conseillé aux autorités marocaines d’ouvrir une «enquête indépendante et impartiale sur les événements de Gdeim Izik, qui ont eu lieu il y a plus de deux ans (novembre 2010, Ndlr)». «La plupart des accusés ont déclaré qu’ils avaient été torturés et maltraités au cours de leurs deux années de détention provisoire, certains auraient été contraints de signer des déclarations», avait souligné le document d’Amnesty International.
Un rapport publié le 17 septembre 2012 par Human Rights Watch montre que le Maroc a usé de ces pratiques contre des manifestants. Six militants marocains du Mouvement du 20 février, qui ont été condamnés le 12 septembre 2012 à des peines de prison ferme allant de 8 à 10 mois, seraient passés aux aveux sous la torture.
«Le tribunal a envoyé des manifestants en prison sur la base de confessions qui pourraient avoir été obtenues sous la torture, tout en refusant de convoquer les plaignants pour s’exprimer devant le tribunal», avait déploré Eric Goldstein, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. «Le recours aux tribunaux militaires ou d’exception pour juger des civils, soulève de sérieux problèmes quant à l’équité, l’impartialité et l’indépendance de l’appareil de justice», avait déclaré le 19 février 2013 lors d’un point de presse le porte-parole du Haut Commissariat de l’Organisation des Nations unies aux droits de l’homme.
Le Hcdh est très «préoccupé par le recours des autorités marocaines à un tribunal militaire, pour juger et condamner les 24 civils sahraouis» arrêtés après l’assaut lancé le 8 novembre 2010 par les forces de répression marocaines contre le «camp de la dignité» de Gdeim Izik à Laâyoune, avait indiqué le communiqué de l’agence onusienne dont le rôle est de promouvoir, de veiller au respect du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans le monde.