Les banques publiques font de la prudence une règle dans l’octroi des crédits, sauf que, dans certains cas, cette «mère de sûreté» sert plutôt de frein à l’économie. D’où, sans doute, les récentes mesures de soutien à l’investissement privé. Le ministre s’en est d’ailleurs expliqué en en disant à la fois trop et pas assez.
Les banques sont pleines de ressources. La demande en crédits reste croissante en attendant de les injecter dans le cadre des nouveaux projets. Mais cet argent va-t-il servir d’apport sous forme de crédits à l’investissement ?
Les banques algériennes ont énormémement de surliquidités. La manne est estimée à 800 milliards de dinars, selon certaines sources financières. Des liquidités qui restent disponibles au niveau de toutes les banques. Résultat : trop d’argent pour peu de projets orientés vers l’investissement productif.
C’est le ministre des Finances Karim Djoudi qui a, dernièrement, annoncé les chiffres de la situation excédentaire des banques. Le premier argentier considère, en effet, que «les capacités d’engagements des banques seront rehaussées par cette incidence financière dans les banques ». D’autres éléments favorisent de plus l’augmentation de ces ressources comme l’illustrent la baisse des taux d’intérêts et de réescompte et la revalorisation des seuils de taux d’épargne.
A ce niveau, la baisse des taux d’intérêts, selon Karim Djoudi, «permettrait d’accompagner les demandes de projets solvables». Autrement dit, la sphère réelle de l’économie sera davantage relancée par l’offre des crédits à l’investissement. Pour rassurer les opérateurs et les futurs promoteurs, le ministre a délibérément plaidé pour l’avantage que recèle la création de la caisse des grands crédits à l’investissement, dont l’enveloppe allouée est de 30 milliards de dinars.
Une forte hausse de la demande en crédits situerait le taux de croissance des crédits à 16 %. Ces indices, certes rassurants, ne sont-ils pas des facteurs qui permettraient de relancer la machine de l’investissement ? Pour le ministre, en tout cas, le crédit alloué dépendra de la qualité du projet, ce qui lui donnera plus de visibilité.
Une récurrence de propos qui a longtemps caché le peu de motivation à viabiliser l’investissement à travers une ventilation juste et équitable des crédits à l’investissement.
Le ministre des Finances, qui tient à rassurer les opérateurs sur le bien-fondé de sa feuille de route, plaide pour les retombées de cette politique au niveau microéconomique.
Mais, certains experts financiers considèrent que le gouvernement manque d’imagination au niveau de la consolidation de certains projets, même si les enveloppes faramineuses se chiffrent à des milliards de dinars. La décision dépasserait le cadre bancaire et reste du ressort du politique.
Ce qui est à noter, c’est la prudence dans l’allocation des ressources sans céder au gaspillage et aux surcoûts. «La liquidité doit être employée avec énormément de prudence», a insisté le ministre. Il y a donc un risque potentiel à gérer ces ressources en les affectant là où les projets d’investissements ne sont pas réellement viables.
«L’offre bancaire a ses contraintes internes. Mais d’autres formules, telles que le leasing qui doit être développé dans ce cadre, sont souhaitables», estime le ministre.
Ainsi donc, le paysage financier doit s’enrichir de nouveaux cadres parmi lesquels les sociétés d’investissement doivent impérativement prendre corps pour compenser le déficit de financement de l’investissement. Des structures qui ont tardé jusque-là alors que les sociétés de leasing tentent de se frayer un chemin pour redonner souffle à un marché financier qui dort sur des actifs mal utilisés.
Sur le volet de la traçabilité financière des banques, le règlement de Bâle 3, qui est déjà opérationnel, va aider, à coup sûr, le contrôle en amont et en aval des comptes avec en prime un droit à la clause de confidentialité pour les comptes particuliers en les protégeant de leur divulgation à de tierces personnes.
Toutefois, comme plusieurs pays soucieux de connaître des sources occultes de financement (blanchiment d’argent, placement douteux en off-shore, lutte anti-terroriste..), les banques sont autorisées à la levée du secret bancaire dans ces cas précis. L’Algérie ne fait pas l’exception d’autant qu’elle a consacré des lois pour accompagner cette lutte au niveau international.
Un premier pas a été franchi à travers la déclaration de soupçon sur des comptes bancaires (particuliers et entreprises) lorsque les flux de transferts sont suspects ou par des décaissements en devises qui n’obéissent pas aux procédures en vigueur par la Banque d’Algérie.