Les députés ont mis à profit les débats sur le rapport annuel de la Banque d’Algérie pour demander l’ouverture des bureaux de change.
L’ampleur prise par le marché informel de devises et le laisser-faire des pouvoirs publics pousse les députés à réagir.
Les débats sur le rapport annuel de la Banque d’Algérie, présenté hier à l’APN, étaient une occasion pour les parlementaires de dénoncer l’incapacité de l’Etat à ouvrir des bureaux de change et à mettre fin à ce phénomène.
Le premier à ouvrir le bal est Lakhdar Benkhelaf du Front pour la justice et le développement (FJD).
Il a dénoncé la «normalisation du marché parallèle de devises» qui est, a-t-il estimé, «un feu vert à la maffia du blanchiment d’argent et une reconnaissance des réseaux de la contrebande».
Le député du FJD fait allusion aux récentes déclarations du ministre de l’Intérieur selon lesquelles l’Etat tolérera les activités du marché noir de devises, sous prétexte que les citoyens y trouvent leur compte.
Cette déclaration d’Ould Kablia n’a pas suscité uniquement le courroux des banquiers et l’étonnement des observateurs, elle a aussi poussé un membre du gouvernement (Karim Djoudi) à apporter la contradiction en affirmant que l’Etat luttera contre toutes sortes de l’informel.
Regrettant l’incapacité de l’Etat à ouvrir des bureaux de change malgré l’existence d’un texte de loi qui date du 23 décembre 1995, Lakhdar Benkhelaf a demandé à la Banque d’Algérie de prendre des décisions à même d’encourager l’ouverture de ces bureaux et d’en faire une activité lucrative.
Les interventions des députés se suivaient et le sujet n’est occulté que rarement. La demande reste inchangée: lutte contre les marchés informels de devises et ouverture des bureaux de change. Djelloul Djoudi du Parti des travailleurs (PT) a demandé l’institution d’une loi pour mettre fin au marché informel de devises. La conjoncture est d’autant plus adéquate pour les parlementaires qu’elle coïncide avec la bataille engagée par le gouvernement contre les marchés informels, excepté ceux de devises.
Si en 2012, l’Algérie ne dispose pas de bureaux de change officiels, livrant les citoyens au marché noir, c’est que la situation est grave. Cela a généré un écart entre le taux de change officiel et dans les marchés informels. C’est dire toute la précarité de l’économie nationale.
Mesure encourageante pour le recours au marché noir, le plafonnement de l’allocation touristique à laquelle ouvre droit chaque citoyen une fois par an, à 140 euros a été déploré par les députés.
Ces derniers ont demandé l’augmentation de cette allocation, dépassée par le temps, pour limiter le recours à l’informel.
Certains locataires de la chambre basse du Parlement ont posé cette autre question préoccupante: qui contrôle la Banque d’Algérie après avoir retiré la prérogative de la Cour des comptes?
Le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Laksaci, serait certainement gêné par ces questions, lui qui a esquivé les journalistes après la fin de la séance matinale; notamment celle relative au marché informel de devises qui a montré l’incohérence du gouvernement.
Dans son exposé, M.Laksaci a consacré un passage à l’inflation qui ne cesse d’augmenter ces deux dernières années, atteignant 7,9% à fin juin 2012.
Selon lui, trois facteurs internes expliquent cette tendance haussière de l’inflation. Il s’agit des perturbations fréquentes au niveau des prix des produits, le monopole et la spéculation.
M.Laksaci a, en outre, mis en garde contre la fragilité de l’économie algérienne peu diversifiée et fortement dépendante de l’exportation des hydrocarbures.
«L’Algérie risque de subir de plein fouet les répliques des crises économiques internationales si elle ne diversifie pas ses ressources financières», a-t-il dit.