La Zone industrielle de Rouiba, qui abrite une soixantaine d’entreprises publiques, privées et étrangères, est plongée dans une instabilité chronique faute de prise en charge réelle des problèmes des travailleurs. Les délégués syndicaux préviennent qu’ils ne resteront pas les bras croisés et rappellent que rien n’a changé depuis qu’ils ont arraché au gouvernement, il y a un an, la promesse d’améliorer les conditions de travail des salariés et de mettre fin aux nominations de cadres à la retraite à la tête des unités de production.
Grâce à un imposant rassemblement qu’ils ont tenu, le 26 décembre 2011, devant le siège central de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), les travailleurs de la Zone Industrielle de Rouiba (Alger) ont pu arracher à Mohamed Benmeradi, alors ministre de l’Industrie, de la PME et de la Promotion des investissements, l’engagement de se pencher sur leurs problèmes, notamment celui de leurs mauvaises conditions de travail. Une année après, les choses n’ont pas changé. « Le seul problème qui a été réglé est celui du licenciement de 18 travailleurs ; ils ont été réintégrés », témoigne à Maghreb Emergent, Mokdad Messaoudi, secrétaire général de l’union locale UGTA de Rouiba.
Pourtant les travailleurs de cette importante zone d’activité économique n’arrêtent pas d’enchaîner, depuis la fin de l’année dernière, les actions de protestation (grèves, sit-in, marches et rassemblements). Ils relèguent la revendication salariale au second plan dans la pluparts des cas et s’insurgent, le plus souvent, contre leurs mauvaises conditions de travail et les abus des employeurs qui « piétinent la législation ».
Le mal des « vieux » DG des entreprises publiques
Les travailleurs des entreprises publiques de la zone industrielle de Rouiba sont convaincus que leur problème réside principalement dans la nomination de retraités à des postes de cadres dirigeants au niveau des entreprises mais aussi des sociétés de gestion des participations (SGP), les holdings publiques qui les coiffent. A chaque mouvement de protestation, ils réclament le départ des « vieux DG, responsables du climat malsain qui règne au sein des unités de production », selon les termes de Mokdad Messaoudi.
« Le problème des retraités qui touchent un double salaire n’est pas encore réglé. Pis encore, malgré les promesses, d’autres ont été recrutés ! Depuis notre rencontre avec le ministre en décembre 2011, je peux même dire que leur nombre a été doublé », regrette le secrétaire général de l’union locale UGTA de Rouiba.
Pourquoi nomme-t-on des personnes qui ont atteint l’âge de la retraite à la tête des unités de production ? À cette question les travailleurs ne trouvent pas de réponse évidente sinon, peut-être, la volonté de maintenir le tissu industriel public dans la déliquescence. De plus, ces cadres ayant atteint l’âge de la retraite se rendent responsables, selon les travailleurs, de décisions de « licenciement abusif » et autres « sanctions disciplinaire » injustifiées.
Transgression de la législation du travail
Le tableau n’est pas plus rose du côté des entreprises privées de la zone industrielle dont les travailleurs font face également à l’abus de l’employeur. Le droit syndical y est le plus souvent bafoué et certaines entreprises n’hésitent pas à sanctionner par le licenciement toute velléité de constituer une section syndicale.
Des manifestations sporadiques, mais à forte mobilisation, sont organisées dans la zone industrielle ou devant l’inspection du travail pour dénoncer les violations de la législation du travail par certaines entreprises privées et étrangères, mais rien n’y fait. Ces entreprises semblent être dans l’impunité.
Début décembre, les travailleurs de la Zone industrielle de Rouiba ont annoncé l’organisation d’une marche depuis le siège de l’UGTA jusqu’au siège du ministère du Travail avant de faire marche arrière, la Centrale syndicale ayant décidé de prendre les choses en main avant d’en arriver à cette forme de protestation. « Nous attendons la réaction de la Centrale avant d’arrêter une action d’envergure sous peu », prévient le responsable de l’union locale UGTA.