Yebda talent et discrétion
Les Algériens l’ont enfin vu à l’œuvre ! Après un petit quart d’heure dans des conditions de jeu tendues contre le Rwanda (il fallait inscrire d’autres buts tout en luttant contre l’adversaire et contre l’arbitre), Hassan Yebda a joué l’intégralité du match de Khartoum face à l’Egypte, suite à la suspension de Khaled Lemmouchia.
A quelque chose malheur est bon : les supporters algériens ont pu, ainsi, voir évoluer un joueur nouvellement arrivé en sélection et que la majorité d’entre eux ne connaissaient pas trop et n’avaient même jamais vu sur un terrain. Yebda a rempli sa tâche doublement : réussir son match (à l’instar de tous ses coéquipiers) et séduire les Algériens. Désormais, ces derniers savent que la sélection peut compter sur un milieu récupérateur de classe internationale.
«Yebda par-ci, Yebda par-là, Yebda partout !»
Il a tout à fait le profil du milieu défensif moderne : occupé tout le match à ratisser, travailleur, discret, mais capable de coups de génie imprévisibles. Hassan Yebda a le gabarit et le mental de l’emploi : grand, agile, adroit balle au pied et, surtout, toujours calme et maître de ses nerfs. C’est ce joueur que le public pourtant très difficile du Benfica Lisbonne a découvert et fortement apprécié la saison passée. Pourtant, les supporters lisboètes en ont vu, des stars et des bons joueurs, et c’est ce qui valorise davantage le titre de meilleur joueur du club décroché la saison passée par Yebda, lui qui débarquait dans un quasi-anonymat d’un modeste club de Ligue 1, Le Mans.
«Yebda par-ci, Yebda par-là, Yebda partout !» : ainsi nous avait résumé, un jour, un journaliste portugais le rendement du joueur algérien au sein du Benfica.
Benfica tenait à le prêter, pas à le vendre
Comment, dès lors, expliquer tout le tohu-bohu ayant entouré son transfert l’été dernier ? Un joueur de valeur, ayant fait ses preuves dans un grand club d’Europe, devrait trouver preneur rapidement. Or, ce n’était pas si simple que cela. Benfica demandait trop d’argent aux clubs intéressés par l’acquisition du joueur, notamment Everton, Tottenham et Blackburn. Le seul cas où le club lisboète acceptait de faire des concessions financières était celui de l’option du prêt. Or, ni le joueur ni les clubs qui le convoitaient n’étaient intéressés par cette option. C’est pour cela que les choses ont traîné tout au long de la période des transferts. Pour lui signifier qu’il était sur la liste des départs, le club ne faisait pas participer Yebda aux matches de préparation. Ayant compris que Benfica, pour des considérations financières, tenait absolument à le vendre chèrement ou à le prêter pour le récupérer plus tard, le joueur a finalement accepté le prêt d’un an à Portsmouth, club qui s’était manifesté lors de la dernière semaine de la période des transferts.
Hart ne le connaissait même pas !
Le plus drôle dans cette histoire est qu’il y avait une personne importante au sein du club qui ne connaissait pas du tout le joueur. C’était… l’entraîneur, Paul Hart. C’est lui-même qui l’a reconnu après la victoire de Portsmouth à Wolverhampton sur un but de l’international algérien : «En vérité, je ne connaissais pas Yebda. Ceux qui l’ont ramené m’ont assuré qu’il a des qualités. Là, je constate qu’ils n’ont pas eu tort dans leur jugement.» Drôle de club où l’entraîneur qui, de surcroît, est manager, c’est-à-dire qu’il chapeaute tous les joueurs professionnels du club, ne connaît pas une nouvelle recrue ! Qu’à cela ne tienne : Yebda a fait ses preuves et gagné, dès lors, une place de titulaire indiscutable. Les supporters de Pompey (surnom de Portsmouth) adoptent leur nouveau chouchou.
Meilleur joueur du Benfica grâce à son apport offensif
Il y a de quoi : depuis que l’ancien joueur du Mans est titulaire, c’est l’un des rares au sein de l’équipe qui sont épargnés par les critiques d’après-match. Ayant été victime d’une succession de blessures en 2007, il avait disparu de la circulation footballistique. Patiemment, il est revenu sur le-devant de la scène en effectuant une excellente saison avec Le Mans, si bien qu’il s’était attiré l’intérêt de nombreux clubs en France et ailleurs. Son ambition l’a amené à signer à Benfica où, arrivé en quasi-inconnu, il s’est hissé au niveau de ses coéquipiers et même plus, jusqu’à être élu meilleur joueur du club pour la saison. En général, ce n’est guère évident pour un milieu récupérateur, au rôle ingrat, de se distinguer dans un match ou au cours de la saison, mais Yebda l’a fait pour ses qualités de milieu défensif et aussi pour ses qualités offensives lorsqu’il prend l’initiative de monter avec le ballon. C’est que ce joueur au gabarit appréciable est aussi habile des deux pieds que de la tête, ce qui fait qu’il n’est pas du tout maladroit lors des situations offensives.
Le Mondial, ça le connaît
A présent qu’il a un destin «mondialiste», nul doute que l’international algérien nourrit légitimement de grandes ambitions. Une fois la saison avec Portsmouth terminée, il est fort possible qu’il retournera à Benfica, club auquel il appartient toujours, à moins qu’un grand club, conscient du potentiel du joueur, fasse une proposition financière que le club portugais ne pourra pas refuser. La clef de cet important virage dans sa carrière sera la Coupe du monde en Afrique du Sud. Ayant déjà été sacré au plan mondial avec la France U18 en 2001, il connaît déjà la manière de gérer les grands tournois. Il sait comment gérer les grands matches tout court, comme il l’a démontré contre l’Egypte où il a fait montre d’une application et d’un sang-froid extraordinaire. C’est tout ça, Yebda : talent et discrétion.
F. A-S.