Après près de soixante ans de règne du Code de procédure pénale de 1966, un nouveau texte vient d’entrer en vigueur, mettant à jour le rôle du parquet et redessinant les équilibres entre poursuite, médiation et sanction.
Derrière ses 890 articles, le Code de procédure pénale adopté le 3 août 2025 et publié au Journal officiel ouvre la voie à une justice plus rapide. Mais aussi plus intrusive et plus centralisée autour du procureur de la République.
Nouveau Code de procédure pénale en Algérie : un parquet au cœur du dispositif, avec des pouvoirs élargis
Le nouveau Code confère au procureur de la République une autorité inédite. Il ne se limite plus à déclencher et conduire l’action publique, il dispose désormais d’une latitude importante pour mettre fin aux poursuites ou les orienter vers d’autres voies.
Parmi les prérogatives renforcées :
- La possibilité de proposer au mis en cause un accord pénal fondé sur la reconnaissance de culpabilité en échange d’une réduction de peine.
- Le retour au pouvoir d’émettre un mandat de dépôt, notamment en cas de flagrant délit, avec l’obligation de présenter le dossier au tribunal dans un délai maximal de cinq jours (article 486).
- Le recours accru à la procédure de comparution immédiate pour certaines affaires délictuelles (article 478).
- Le pouvoir de saisir le juge par ordonnance pénale, sans débats préalables, pour prononcer soit une peine, soit un acquittement (article 533).
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La médiation et les alternatives aux poursuites prennent de l’ampleur
Une autre innovation majeure réside dans l’élargissement du champ de la médiation. Le procureur peut désormais initier une procédure de règlement amiable dans plus de vingt délits (article 59). Pour les infractions mineures, il peut se contenter d’un simple avertissement adressé directement à l’auteur ou par l’intermédiaire de la police judiciaire.
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En outre, des accords spécifiques peuvent être conclus avec des personnes morales afin de suspendre temporairement les poursuites, sous certaines conditions (article 106). Cette flexibilité vise à désengorger les tribunaux tout en diversifiant les réponses pénales.
Lutte contre la drogue : transparence renforcée et mesures de rigueur
Le texte marque aussi un tournant dans la communication judiciaire. En vertu de l’article 19, le parquet peut désormais publier l’identité et les photos des mis en cause dans les affaires de drogue, de trafic ou de criminalité grave, si la sécurité publique l’exige. Cette mesure, qui remplace l’ancienne disposition de l’article 11, est présentée comme un outil de dissuasion et de coopération avec la société civile pour accélérer les arrestations.
Le volet répressif se durcit également. Le parquet est habilité à enquêter sur l’origine des biens des suspects, qu’ils soient en Algérie ou à l’étranger, et à prononcer un gel conservatoire sur leurs avoirs. Ces mesures demeurent en vigueur jusqu’à un non-lieu ou une décision définitive d’acquittement. Les interdictions de voyager s’appliquent elles aussi le temps de l’instruction.
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Enfin, le nouveau Code, par ses innovations, met le parquet au centre de la scène judiciaire. Il introduit des outils de souplesse pour désengorger les tribunaux et régler certains litiges à l’amiable. Mais il s’accompagne aussi de leviers coercitifs renforcés, notamment en matière de détention provisoire et de lutte contre la criminalité organisée.
Entre efficacité procédurale et rigueur accrue, le défi sera de trouver l’équilibre entre rapidité de traitement des affaires et respect des garanties des justiciables.