Sitôt arrêté, un chef de réseau de trafic de cannabis est remplacé par un autre, parfois un baron de la drogue est arrêté à partir d’une simple information fournie par un ex-toxicomane qui a décidé d’arrêter la consommation de drogue.
Pour cette raison, les services de sécurité, et pour mieux lutter contre les nouveaux chefs de la drogue, ont adopté une nouvelle technique permettant, ainsi, d’identifier les véritables têtes de trafic de cannabis. En effet, les services de sécurité procèdent, depuis quelque temps, à la collecte d’informations auprès des jeunes toxicomanes, qui, à un moment donné, ont consommé le cannabis, et côtoyaient les vendeurs de drogue. Ces informations seront, par la suite, exploitées pour arriver à identifier les nouveaux chefs de réseaux de trafic de résine de cannabis.
Cela dit, plusieurs réseaux de drogue ont été démantelés grâce à cette nouvelle technique. A Alger, et durant l’an dernier, plusieurs centaines de kilos de cannabis ont été récupérés et plusieurs trafiquants, notamment des personnes notoires (des barons), ont été identifiées, puis arrêtées, toujours suivant ce nouveau mode de lutte contre les stupéfiants. Farid, jeune toxicomane de Bab El Oued, est un exemple parfait de cette récente lutte. Cet ex-consommateur de cannabis, avait côtoyé les «passeurs» de drogue dans ce quartier.
Profitant de cette donnée, la brigade mobile de la police judiciaire (BMPJ) de cette commune, a pu récolter d’importants renseignements auprès de ce jeune toxicomane. Avec ces informations très précieuses, la BMPJ de Bab El Oued, a pu démanteler un dangereux réseau de trafic de cannabis qui sévissait dans ce quartier de la banlieue algéroise. Ici, les services de la police sont, quotidiennement, mobilisés pour traquer les trafiquants de drogue, assez présents dans ce quartier populaire de la capitale. La collecte d’informations auprès des toxicomanes s’est avérée très précieuse. Mieux, elle a permis aux policiers de mieux lutter contre les «passeurs» de cannabis. Cet ancien habitué de cannabis a d’autre part, trouvé un travail, qui, aujourd’hui, lui permet d’être recasé une nouvelle fois dans la société. «Je n’avais jamais ressenti cela avant, mais hamdoulah, aujourd’hui, je me sens très bien. Cela dit, aujourd’hui j’ai trouvé un travail chez un menuisier, que demander de plus», dira Farid âgé de 32 ans. Soignez un toxicomane coûte beaucoup plus que de l’envoyer en prison, affirment les spécialistes.
Chaque année, l’Algérie enregistre entre 35 et 70 tonnes de résine de cannabis saisies. Un chiffre qui donne froid dans le dos. Les autorités marocaines disent qu’elles font des efforts pour contrôler l’entrée de cannabis en Algérie, mais en réalité, ces dernières ferment les yeux sur le grand trafic qui sévit à la frontière. Du coup, la consommation du cannabis a beaucoup augmenté en Algérie. Aujourd’hui, le pays est passé de pays transitaire à pays consommateur de drogue douce. Toutefois, beaucoup d’efforts sont faits par les autorités algériennes pour stopper cette hémorragie. Sur le terrain, les brigades de la Gendarmerie nationale composées des GGF récupèrent, chaque mois, près de 6,5 tonnes de cannabis. En matière de prise en charge, les efforts sont déployés par les autorités algériennes pour aider les toxicomanes à réintégrer la société. Pour cela, des cellules d’écoute ont été créées spécialement pour aider les jeunes toxicomanes à retrouver leur place dans la société.
Entre la drogue douce et la drogue dure, l’autre crainte
En 2010, plus de 70 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les GGF, à la frontière algéro-marocaine. Toujours durant la même période, plus de 5 kilos de drogue dure (héroïne et cocaïne) ont été également récupérés. L’alerte est au rouge. Aujourd’hui, une véritable crainte est installée, car entre la drogue douce et la drogue dure, la consommation commence à inquiéter sérieusement le pays, affirment plusieurs experts. Une inquiétude partagée également par les services de sécurité, qui, de leur côté, affirment qu’en 2010, la quantité de drogue, douce ou dure, a dépassé tous les records durant des décennies. Aujourd’hui, le marché algérien est «otage» des trafiquants de drogue en tous genres. Dans la capitale, des réseaux africains, spécialisés dans le commerce de la drogue dure (cocaïne et héroïne) s’intéressent de plus en plus à l’Algérie, du fait de son positionnement géographique très proche du Vieux Continent. Véritable porte de transit de drogue, l’Algérie est devenue le nouvel eldorado des trafiquants subsahariens. De sa part, le Maroc, ce pays producteur de cannabis par excellence compte, à son tour, inonder le marché algérien par dizaines de tonnes de drogue douce. Du coup, une augmentation, voire une explosion de consommation de cannabis frappe plus fort l’Algérie. Le Maroc, le pays du cannabis est allé même jusqu’à armer les trafiquants de cannabis. En effet, ces derniers tentent, chaque semaine qui passe, d’infiltrer des tonnes de cannabis via les villes frontalières, telles que Béchar, Tindouf et El Bayadh. La guerre est loin d’être gagnée, mais la détermination des GGF est entière et le contrôle de la frontière est hautement sécurisé.
Par Sofiane Abi