Le métier de boulanger est menacé de disparition d’ici peu de temps, au vu de la cadence des fermetures des boulangeries pour cause de réduction de la marge bénéficiaire, de la multiplication des contrôles et de l’absence de la formation au métier.
Lors d’un point de presse organisé, hier, au siège de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa), à laquelle est affiliée la Fédération des boulangers, M. Khelfate a indiqué, à titre d’exemple, que “dans la wilaya d’Alger, sur les 1 500 boulangeries recensées en 2014, il n’en reste que 930, soit 570 boulangeries qui ont changé d’activité pour d’autres plus lucratives (restauration, fruits et légumes, etc.)”. “Un recensement est aussi lancé pour inventorier d’autres cas de fermeture de boulangeries dans différentes wilayas du pays”, a-t-il ajouté. La ville de Meftah (Blida) qui comptait 23 boulangeries il y a 6 mois, n’en a plus que 17 aujourd’hui. Youcef Khelfate, qui lance l’alerte, argue le fait que l’État ne fait plus cas de cette activité, alors qu’il a intérêt à s’y consacrer avant qu’il ne soit trop tard.
En revenant sur la participation de l’équipe de boulangerie algérienne à un concours du 21 au 24 mars à Casablanca (Maroc), où elle a décroché la quatrième place, après la Tunisie, le Maroc et le Burkina Faso sur les 23 pays participants, le conférencier a déploré qu’en dépit de ce score non négligeable, l’équipe algérienne n’est pas qualifiée pour la Coupe du monde qui aura lieu en janvier 2018 à Lille (France).
En cause : le manque de préparation des boulangers. Et de lancer un appel aux autorités pour mettre à la disposition des boulangers des écoles dédiées à ce métier, ailleurs dénommées “baking center”, ou laboratoires, où seront organisés des démonstrations, des dégustations ou des entraînements, et d’inscrire la filière spécialité boulangerie dans les Centres de formation professionnelle (Cfpa).
Les boulangers d’Algérie souffrent de formation, mais pas seulement. Youcef Khelfate pose, en outre, le problème récurrent de la réduction de la marge bénéficiaire du pain. Il explique la loi d’avril 1996, qui fixe le prix de la baguette à 8, 50 DA, alors que la farine était vendue à 1 500 DA le quintal, la levure 80 DA le kg, l’améliorant 80 DA le kg et le sel à 2 DA, et sans parler de l’électricité qui était à 2,50 DA le kilowatt. Mais, en 2017, “certains de ces produits ont vu leurs prix multipliés par deux, voire par trois, notamment l’électricité, l’essence et le gasoil, les impôts, ainsi que les cotisations à la Casnos, qui étaient de 12 000 DA et qui sont passées à 32 400 da, le Smig qui était à 6 000 DA est passé à 18 000 DA”, dit-il encore.
Et ce, avant de s’interroger : “Comment voulez-vous que la baguette maintienne son prix ?” Il précisera qu’“à chaque augmentation, le boulanger perd un peu plus de sa marge bénéficiaire, jusqu’à arriver aujourd’hui au niveau de zéro bénéfice. Et si le prix de la baguette augmentait de deux centimes seulement, ce serait la guerre.”
Même si, jusque-là, le boulanger vendait la baguette à 10 DA suivant un accord tacite du gouvernement, cette marge ne suffit plus à cause des récentes augmentations des intrants, suggère-t-il, en rappelant que le pain n’a jamais été subventionné. La subvention ne concernerait plus que la farine qui est aussi distribuée aux pâtissiers, aux pizzaïolos et aux fabricants de biscuits, a-t-il soutenu, avant de rappeler la proposition faite à l’ancien ministre et portant sur la subvention de la farine dite “mixée” ou “semoule semi-supérieure”, destinée uniquement au pain à l’exception de tout autre produit. Le dossier aurait été transmis à la chefferie du gouvernement depuis une année et demie.