Pour Benbitour, le pouvoir est dans une impasse : « L’achat de la paix sociale sera difficile voire impossible à l’avenir »

Pour Benbitour, le pouvoir est dans une impasse : « L’achat de la paix sociale sera difficile voire impossible à l’avenir »

La politique « d’achat de la paix sociale » va devenir difficile voire « impossible » au cours de prochaines années, estime l’ancien chef du gouvernement et membre de la CNLTD, Ahmed Benbitour.

Le pouvoir qui a fait exploser les dépenses du fonctionnement est aujourd’hui dans une « impasse » du fait de la baisse des prix du baril qui vient s’ajouter à une chute des volumes d’hydrocarbures exportés.

« Le volume des exportations hydrocarbures de 2013 ne représente que 63% des exportations de l’année 2006. Le recul des exportations a été de 37% entre 2006 et 2013. Durant cette période les prix – élevés – ont permis de couvrir la réduction du volume des exportations » a-t-il déclaré au journal Echourouk.

L’Algérie a abandonné la « règle d’or » fixée par la président Houari Boumediene d’affecter les recettes de la fiscalité pétrolière au seul budget d’équipement. Actuellement, fait-il observer, le 2/3 des dépenses du budget de fonctionnement sont financées par la fiscalité pétrolière alors que les quantités d’hydrocarbures exportées sont en baisse continue même si les prix fort au cours de la décennie 2000 ont eu tendance à le masquer

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En 2011, dans un contexte d’émeutes et du début du printemps arabe, les « dépenses publiques ont augmenté de 50% par rapport à 2010″ et l’Algérie a continué par la suite sur ce rythme.  »

Actuellement, il y a une double baisse des exportations hydrocarbures et des prix du pétrole avec en face un accroissement des dépenses » et le Fonds de régulation des recettes (FRR) ne pourra pas tenir longtemps dans une telle situation.

« Combien de temps tiendra le Fonds de régulation, deux ou trois ans au mieux » et à partir de 2017, l’Algérie va se retrouver devant des difficultés réelles à couvrir les dépenses de l’Etat. Or, note-t-il, le régime est incapable de mener une autre politique.

« Comment l’Etat va-t-il faire face à cette crise, comment réduire les dépenses? En réduisant les subventions, en baissant les salaires et les transferts sociaux ? » s’interroge Benbitour qui s’attend à de grandes turbulences sociales dans un pays « où la violence est devenu un moyen de règlement des conflits entre les gens et le gouvernement ».

Le changement par la rue?

« S’il était à la tête du gouvernement », l’austérité serait de mise avec une réduction des dépenses et une lutte contre le pillage et la corruption liés à la rente et la récupération des richesses qui sont dilapidées.

Pour lui, il n’existe pas de stratégie à un horizon raisonnable, ni de modalité de la gérer et cela découle de la « nature du pouvoir » et de la manière dont est produite et redistribuée la richesse.

Le gouvernement est incapable de trouver une « alternative » car l’Etat est devenu « déliquescent ». C’est la « corruption qui mène l’Etat » a-t-il dénoncé, et elle rend toute réforme inapplicable. « Les décisions sont prise par un groupe restreint de personnes et non par des institutions ».

Pour Benbitour, les assurances données par le gouvernement relève de l’ignorance. En 2013, les transferts vers l’étranger pour le compte des importations des biens et des services ainsi que les bénéficies des sociétés étrangères ont atteint le montant de 73 milliards de dollars.

Le gouvernement peut geler le financement public des projets et réduire le budget d’équipement mais, assure-t-il, cela ne sera pas suffisant car le budget de fonctionnement est financé en totalité par la fiscalité pétrolière.

Si la situation perdure, le gouvernement pourrait être amené à augmenter les prix des carburants et de l’énergie et faire une révision de la politique de subventions. La poursuite de la « politique d’achat de la paix sociale sera difficile voire impossible à l’avenir ».

Et, dit-il, il ne faut pas trop compter sur le gaz de schiste qui peut, dans le meilleur de cas et dans la mesure d’une acquisition des technologies de forage, alimenter le marché intérieur.

En matière de changement politique, Benbitour ne croit pas qu’il puisse venir du pouvoir, ni d’un accord entre l’opposition et le pouvoir. Le scénario qui lui parait le plus « probable » est une contestation par la rue.