En mai de l’année en cours, des populations de Gao (ville du nord du Mali) ont manifesté contre la présence de groupes armés islamistes dans cette partie du pays et ont été violemment réprimées par les éléments du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao, organisation terroriste, auteur de l’enlèvement de sept diplomates algériens dans la même ville).
Lundi dernier, un élu de la ville a été assassiné. Les populations sortent, de nouveau, et sont réprimées. On dénombre, cette fois, un mort et une dizaine de blessés parmi les manifestants. Des habitants accusent le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) d’être derrière la mort du manifestant. Ce que ce mouvement indépendantiste dément.
Le Mujao dit avoir capturé deux auteurs présumés de l’assassinat. Le MNLA crie à la manipulation. La tension monte entre les deux parties et de violents accrochages ont eu lieu hier entre le MNLA et le Mujao, selon des témoins cités par l’AFP, dont Nina Oumarou, sœur de l’élu de la ville, Idrissa Oumarou, conseiller municipal, enseignant et membre du parti du président malien de transition, assassiné lundi dernier. Citée par des agences de presse, elle dira que «des combattants» du Mujao se sont dirigés vers un camp de la ville tenu par les combattants du MNLA, dans le quartier «Château-d’eau».
Les mêmes sources précisent que le gouvernorat de la ville de Gao, qui servait de quartier-général à la rébellion touareg pour tout le Nord, a été pris hier par les islamistes après plusieurs heures de combats qui ont fait des victimes parmi les combattants touareg. Les islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) sont entrés à l’intérieur du gouvernorat. Les combattants du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA, rébellion touareg) ont fui, d’autres ont été tués, d’autres arrêtés, selon le propriétaire de la station-service qui jouxte le gouvernorat.

Des armes lourdes ont été utilisées dans les affrontements, selon les témoignages recueillis par des agences de presse. C’est dire l’imbroglio régnant en maître au nord du Mali, entraînant trois grandes villes de cette partie du pays, Gao, Tombouctou et Kidal, dont le contrôle est partagé par le MNLA, le Mujao, Al-Qaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) et Ançar Eddine.
Cette situation a, d’abord, été favorisée par l’impuissance du pouvoir central à Bamako de faire face, militairement, aux avancées des mouvements armés ayant pris contrôle du nord du pays, et aggravée par un coup d’Etat qui, le 22 mars, a renversé le président Amadou Toumani Touré.
Crise humanitaire
A cette situation déjà très critique est venue s’ajouter une crise humanitaire inquiétante qui sévit dans la partie nord du Mali où des milliers de personnes ont fui l’insécurité dans cette région sous contrôle de groupes armés depuis le putsch du 22 mars dernier.
«Les habitants de cette région malienne sont confrontés à une situation très mauvaise», a noté, dans un communiqué publié mardi, le président de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CIC-R) pour le Mali et le Niger, Nicolas Marty, a rapporté l’APS. Selon lui, la majorité des activités économiques sont à l’arrêt dans les villes du nord malien, où des milliers de personnes ont besoin d’aides alimentaires, de médicaments et autres moyens de vivre.
Cette crise humanitaire est exacerbée par l’insécurité et les violences armées ayant provoqué aux habitants locaux des conséquences «très inquiétantes», est-il noté. Pour la première fois, des équipes du CICR et du Croissant-Rouge malien
s’étaient déplacées ces dernières semaines dans les régions isolées à Kidal, à Tombouctou ainsi qu’à Gao, où elles se sont enquises de la situation prévalant dans cette partie nord du Mali, la sécheresse et autres phénomènes ainsi que le manque d’eau qui ont eu des conséquences destructrices sur la production céréalière, précise le CICR.
Par Mounir Abi