La plus grande enquête du monde relative aux nombres de patients atteints de polyarthrite rhumatoïde et leur prise en charge a été réalisée sur un échantillon de 10.171 personnes durant la période s’étalant du 14 février au 11 avril 2013, au niveau de 42 pays dont la région du Maghreb. 102 patients furent interrogés et diagnostiqués.
Les résultats d’un enquête sur les personnes atteintes de polyarthrite ont fait ressortir que pour la région du Maghreb, des patients représentaient les symptômes de cette pathologie pendant deux ans avant d’être diagnostiquées par un professionnel de la santé. 57% d’entre elles affirment que la polyarthrite nuit à leurs capacités physiques, 38% déclarent que leur carrière est impactée négativement par cette maladie. 93% affirment qu’ils comprennent l’importance de la gestion de la polyarthrite et 71% disent gérer et ont la douleur sous contrôle. 63% ont une connaissance sur leur maladie alors que 69% ignorent que les dommages articulaires sont irréversibles. 87% reconnaissent que c’est une maladie grave alors 54% ont bénéficié d’un plan de gestion de leur maladie avec un spécialiste.
La même enquête au Maghreb a également fait ressortir que 99% des patients comptent sur des sources d’informations pour les aider à mieux comprendre leur maladie (professionnels de la santé, autres patients atteints, associations et autres groupes de soutien). 48% des patients ont eu plus de mauvais jours que de bons, 46% sont inquiets alors que 26% se disent confiants. La présentation du professeur Aïcha Ladjouz Rezig, service rhumatologie EHS Ben Aknoun et présidente de la Ligue algérienne rhumatismale (LAR), à l’occasion d’une rencontre portant sur la polyarthrite, tenue jeudi dernier à l’hôtel Sofitel, a également fait part que l’Algérie compte actuellement 100.000 cas de polyarthrite, soit une prévalence de 15%, 0,18% en Tunisie et 0,17% en France, sans oublier que beaucoup de patients ne sont pas identifiés.
Un problème de santé publique
Selon la spécialiste, 8 femmes contre deux hommes sont touchées par la polyarthrite, soit 0,15 d’hommes et 0,20% de femmes atteintes. C’est dire aussi que sur un échantillon de 100.000 patients, 80% sont des femmes âgées de 50 ans alors que la prédominance est entre 30 et 50 ans. Les enfants ne sont pas épargnés car la maladie touche également des nourrissons de 6 mois. « C’est une maladie chronique inflammatoire qui touche l’articulation et peut être sévère sur le plan fonctionnel », a expliqué le professeur Ladjouz. « C’est un problème de santé publique qui n’a pas été pris au sérieux en Algérie et dont les répercussions socio-économiques, à savoir dépenses, examens, soins et arrêts de travail, nécessitent un dépistage précoce », a-t-elle ajouté.
La spécialiste reproche qu’en l’absence d’un traitement curatif, peu de patients sont diagnostiqués et suivis. Ces derniers, faut-il le rappeler, souffrent, se plaignent de douleurs, leurs membres sont déformés, ils éprouvent des problèmes relationnels avec famille et conjoint parce que leur diagnostic est tardif. « Les personnes atteintes sont sujettes à la déprime, au handicap et l’autonomie perdue », a noté le professeur. Elle explique que par le passé, le traitement était basé sur les calmants symptomatiques, corticoïdes et antalgiques, soit un traitement de fond très lent et incomplet suivi d’une rééducation fonctionnelle pas toujours possible. Actuellement, dira-t-elle, il est impératif de se baser sur la précocité du diagnostic et de la prise en charge, l’appui du partenariat entre les médecins et spécialistes ainsi que la mise en route d’un traitement efficace tout en facilitant l’orientation par des consultations spécialisées. « Beaucoup de progrès ont été réalisés en matière d’études cliniques, examens complémentaires, imageries en plus de la découverte de la biothérapie », s’est félicitée la spécialiste. « Actuellement, il y a une meilleure couverture sanitaire et une meilleure utilisation du traitement ce qui fait que le patient souffre moins », a-t-elle ajouté.
Le dépistage précoce préconisé
Les habitants des régions est, à savoir Batna, El Bordj, Sétif, Yakouren et Tizi Ouzou, sont les plus touchés par la polyarthrite rhumatoïde. En effet, 52% des patients atteints habitent les Hauts-Plateaux, 46% les zones côtières alors que 1% le Sud. Selon la conférencière, les données démographiques de 2005 font ressortir que sur 300 cas de polyarthrite, 78,40% sont des femmes âgées de 43 ans, 4% souffrent d’un début d’infection alors que 5,66% d’une irritation tardive. 60% des femmes atteintes sont des mères au foyer, 24,3% exercent une activité professionnelle et 51% souffrent de douleurs articulaires. Les même données indiquent également que 83% des patients ont une situation économique moyenne et 54% sont analphabètes. « Il faut renforcer la formation médicale continue et disposer de moyens d’investigations pour un dépistage précoce et pour orienter et améliorer la qualité de la prise en charge des personnes malades », a recommandé le professeur Ladjouz. Dans ce contexte, elle a rappelé que 40 rhumatologues libéraux de santé publique ont été formés à Ben Aknoun pour le traitement et la prise en charge des patients souffrant de polyarthrite. « La polyarthrite n’est pas une fatalité, mais il est urgent de renforcer la lutte et l’accès aux soins pour permettre au patients de garder leur autonomie et faire de l’éducation thérapeutique un point fort en plus des échanges d’expériences avec d’autres associations internationales, sans compter la disponibilité des médicaments », a préconisé la spécialiste.
Rym Harhoura