Aujourd’hui, l’Algérie ne fait aucun reproche aux harkis pour ce choix, mais ne s’attend également pas à ce qu’ils viennent revendiquer des droits qu’ils ont perdus, de facto, à leur départ. Et il ne s’agit pas là pour la mère patrie de renier ses enfants car le pays a toujours su reconnaître les siens.
Un faux débat fait à nouveau surface et crée la polémique entre Alger et Paris. Il s’agit d’un éventuel retour des harkis et pieds-noirs en Algérie et d’une supposée possibilité de restitution des prétendus biens des colons et des pieds-noirs. En Algérie, la question n’avait pas encore fini de faire le tour des réseaux publics que l’Organisation nationale des Moudjahidine avait déjà réagi pour dénoncer ce qu’elle a qualifié de «moyens de pression et de chantage» exercés par la France contre l’Etat algérien. Une réplique tranchante qui n’a pas manqué de provoquer, à son tour, un éclaircissement de la part de l’ambassade de France à Alger.
La représentation diplomatique a commencé par démentir l’existence de pressions visant à imposer un retour des harkis «Il n’a jamais été question, contrairement à ce qui a été écrit dans la presse, d’exercer quelque «pression» ou «chantage» que ce soit sur les autorités algériennes». Elle a ensuite fait un rappel des déclarations de Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, à l’origine de cette polémique. Pour l’ambassade, le chef de la diplomatie française «s’est exprimé le 29 mai dernier sur la situation des anciens harkis et leur libre circulation entre la France et l’Algérie, en réponse à une question écrite de M. Damien Adam, député de La République En Marche». «Pour autant, le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères n’a pas dit que la question du retour des anciens harkis en Algérie était au «centre des discussions» avec les autorités algériennes, pas plus qu’il n’a déclaré que la France «fera tout pour préserver le droit des harkis à retourner dans leur pays», a précisé la légation. Et d’ajouter qu’«il s’agit simplement de proposer un dialogue sur une question très sensible.
Le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères a d’ailleurs rappelé dans sa réponse «qu’il convenait de ne pas sous-estimer la sensibilité de ces questions dans l’opinion et pour les autorités» tant en France qu’en Algérie». Pour l’Algérie, le dossier des pieds-noirs et des harkis «a été clos définitivement et, par conséquent, il ne fera en aucun cas l’objet de chantage. C’est une question qui concerne la France seule et n’a aucune relation avec notre État», comme l’a clairement rappelé le communiqué de l’ONM. Mais il semble bien que ce n’est pas le cas pour l’Etat français qui évoque une proposition de dialogue sur ce qu’il qualifie de «question très sensible». Or, pour l’Algérie, il s’agit là d’un problème franco-français où le pays n’a ni à débattre ni à intervenir. Les harkis ont fait un choix. Ils se sont engagés, en 1962, pour défendre leur «Algérie-française». Une fois la guerre perdue, il était tout à fait normal que ces derniers rejoignent leur «patrie de coeur». Et ce n’est pas 56 ans après qu’il y a lieu de remettre en cause ce choix ou d’évoquer une quelconque nostalgie pour l’Algérie car, l’Algérie indépendante est loin d’être le département français tant souhaité par les harkis. Ce département, faut-il le dire explicitement, n’existe pas.
Si aujourd’hui les harkis se sentent mal dans leur peau ce n’est sûrement pas parce qu’ils ont été «abandonnés à leur sort» par l’Algérie. Parce qu’ils avaient eux-mêmes abandonné ce pays, optant pour un nouveau pays d’accueil: la France.
Aujourd’hui, l’Algérie ne leur fait aucun reproche pour ce choix, mais ne s’attend également pas à ce qu’ils viennent revendiquer des droits qu’ils ont perdus, de facto, à leur départ. Et il ne s’agit pas là pour la mère patrie de renier ses enfants car le pays a toujours su reconnaître les siens.
Le pays n’a-t-il pas reconnu fièrement l’algériennité de tous ceux qui ont porté la patrie dans le coeur quelles que soient leurs origines? En fait, l’équation est très simple: lorsque vous aimez l’Algérie, l’Algérie vous le rend bien.
Par Hasna YACOUB