Oran n’est plus la ville tranquille d’antan
Le bureau d’Oran de la Ligue algérienne des droits de l’homme est sur l’affaire.
«Il y a eu un viol perpétré contre une Camerounaise, cette dernière, qui a été examinée par un psychologue, se trouve dans un état mental très fragile», apprend-on auprès des proches de la victime, ajoutant que «faute de preuves, le mis en cause, originaire de Mascara, a été relâché, tandis que la victime a été incarcérée pour séjour illégal avant d’être relâchée deux jours plus tard».
L’ignoble acte a été perpétré dans le quartier populaire appelé les Amandiers. «On lui a constitué une avocate», apprend-on auprès de la Ligue des droits de l’homme, bureau d’Oran.

Une telle affaire n’est pas aussi simple, elle remonte à la fin de la semaine dernière? lorsque la gendarmerie a, après intervention, arrêté un individu dont le signalement a été donné par la victime. Il a été présenté à la justice, le procureur a jugé utile de le libérer faute de preuves pouvant l’accabler.
La victime, elle, a été par contre incarcérée en compagnie de sa soeur pour séjour clandestin en Algérie. Aux dernières nouvelles, les deux Camerounaises ont été libérées deux jours après.
Le bureau d’Oran de la Ligue algérienne des droits de l’homme est sur l’affaire. Ce n’est pas tout.
Alerte à la xénophobie
Une jeune ressortissante malienne, âgée de 17 ans, aurait été victime d’un viol collectif commis, en fin de semaine dernière, par quatre jeunes individus.
Ces derniers n’ont rien trouvé de mieux à faire que d’accoster la victime à son retour à son domicile situé à Hassi Bouamama et ce, aux environs de 17h. L’information difficile à confirmer, a vite fait le tour dans la ville d’Oran.
Les suspects auraient guidé leur victime en la menaçant avec des armes blanches tout en la sommant de partir avec eux vers un lieu isolé où ils auraient assouvi leur acte bestial et abject.
Selon des informations difficiles à vérifier, la victime aurait été blessée au visage et au coude. Les mêmes sources indiquent que «les services de sécurité auraient évacué la victime vers l’hôpital universitaire d’Oran où elle aurait été prise en charge».
Le médecin légiste aurait même confirmé les sévices sexuels commis sur la victime par les quatre suspects tandis que les services de sécurité seraient parvenus, en un laps de temps record, à mettre fin à la cavale des agresseurs qui auraient été présentés au parquet.
Un tel crime n’est pas le premier dans son genre. Tout récemment, une jeune femme enceinte aurait été victime d’un viol qui lui a provoqué un avortement.
La xénophobie et le racisme sont-ils ces deux phénomènes qui commencent à gagner du terrain et prendre de l’ampleur dans une ville qui a, depuis la nuit des temps, été la terre d’asile et de refuge des sans-abri, El Bahia-Oran?
Des Africains, notamment ceux venus des pays du Sahel malgré eux, sont de plus en plus victimes des actes, aussi bien xénophobes que racistes. Le dernier en date remonte à la fin du mois de septembre de l’année dernière.
Le quartier populaire d’El Hassi (Ouest de la ville) a été le théâtre d’une grave bataille qui a opposé des Africains subsahariens se défendant après qu’ils aient fait l’objet d’une violente agression orchestrée par plusieurs autres voyous résidents du bidonville géant en question.
Le bilan: plusieurs habitations des immigrants subsahariens ont été saccagées et incendiées, plusieurs blessés et plusieurs autres arrestations opérées ont été enregistrés dans les deux camps.
La situation était sur le point de dégénérer n’était l’intervention musclée et en force des éléments de la gendarmerie d’Oran.
«Ces derniers sont, selon des témoignages d’alors, allés jusqu’à des tirs de sommation», a indiqué un témoin oculaire, ajoutant qu’«une boucherie a été évitée».
«Au départ, nous avons cru qu’il s’agissait d’une incursion terroriste». Tout a commencé lorsqu’une bande de voyous a pris d’assaut le quartier abritant les immigrants subsahariens, ces derniers sont, pour la plupart, venus en quête de jours meilleurs comparativement à leur vécu dans leur pays respectif.
«C’est un groupe de voyous qui est venu déposséder ces Africains de leurs biens en les subtilisant de force, ils les ont encerclés et les Africains qui sont sortis pour se défendre farouchement ont tenté de repousser leurs assaillants en utilisant tous les moyens en leur possession», a indiqué un témoin oculaire.
Ces Africains chassés de chez eux
La bataille fut alors déclenchée. Elle aurait duré plus d’une heure avec des heurts violents. «Au final, plusieurs habitations de fortune abritant ces gueux des temps modernes ont été embrasées», ont indiqué nos sources.
Graves ont été les scènes vécues par ces Africains chassés de chez eux par la misère et la pauvreté. Elles rappellent celles perpétrées par des extrémistes européens contre des Africains en position de faiblesse, notamment les immigrants traités de tous les noms d’oiseaux comme les bougnouls et nègres pour les Subsahariens et blédards pour les Algériens, Tunisiens et Marocains. L’acte barbare lâchement exécuté par des xénophobes n’est pas premier en son genre.
Oran des temps modernes chavire dans la xénophobie. Cette ville est, contre toute attente, devenue tout à fait semblable au quartier français de Nanterre des années 1960 et 1970!
A cette époque, des milliers d’Africains, dont plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines étaient constitués d’Algériens, ont été persécutés, d’autres ont été assassinés pour le seul «tort» d’être étrangers à la France.
«Ce n’était pas facile de vivre en France les années 1960 et 1970», se souvient encore Mohamed Kaddour, ancien émigré algérien ayant résidé à Paris.
Présentement, le même phénomène s’est reproduit un peu partout dans les villes algériennes, notamment dans la deuxième capitale du pays, à savoir Oran.
En 2013, plusieurs cas ont été signalés et traités par la gendarmerie d’Oran.
Le plus célèbre remonte aux débuts de l’année en cours: deux Maliennes, Icha et Myriam, ont été sauvagement violentées et violées dans la gigantesque favela d’El Hassi.
«C’est une histoire connue dans les endroits comme El Hassi, le manque de moyens, d’infrastructures et d’horizon (ce qui est considéré comme une violence) va pousser une partie des jeunes à retourner la violence contre d’autres, en particulier les plus fragiles (c’est-à-dire les immigrés)», nous a indiqué, à cette époque, le président de la Ligue des droits de l’homme de la wilaya d’Oran, Kaddour Chouicha.
A qui se plaindre?
Et d’expliquer: «Est-ce que tu as vu des fils de familles riches se constituer en bandes et faire ce type d’action? Je crois qu’on ne peut pas se permettre de cacher le fait que les Algériens peuvent être racistes comme d’autres populations», a-t-il ajouté. Le calvaire des Africains est également commis à l’université aussi bien par des étudiants que par des professeurs. «Deux étudiants à l’Université de Mostaganem ont, en 2010, été renvoyés par leur professeur pour la seule raison qu’ils sont de la même nationalité que Kofi Kojia, l’arbitre béninois qui a arbitré le match de qualification à la Coupe du Monde 2010 ayant opposé l’Algérie à l’Egypte à Khartoum», a affirmé Arrouche Kheïra, déplorant que «de tels agissements aient été orchestrés à base des pensées tout simplement racistes».
«Notre unique et seule institution où l’on peut s’exprimer se trouve au centre-ville d’Oran, dans les locaux de la Ligue des droits de l’homme, on peut parler de nos malheurs sans risque de nous prendre au mal», a affirmé une Africaine, ajoutant qu’«aucun des Oranais ne peut occulter le calvaire que nous subissons le jour et la peur qui nous gagne la nuit lorsque nous gagnons nos taudis».
De telles inquiétudes reviennent dans les bouches de ceux qui ont quitté leur pays en quête de pain dans d’autres pays.
A cela s’ajoute «l’esclavage» dont ils font l’objet dès qu’ils quémandent un petit job pour subsister.
En attendant de ressusciter les valeurs humaines dans les sociétés qui avancent vers… l’arrière, les Subsahariens subissent autant que nous subissons en Europe…
A méditer!