Les rebelles ont réinvesti samedi les villes stratégiques de Ajdabiya et Brega. Hier, le terminal pétrolier de Ras Lanouf est tombé aux mains des insurgés.
Les insurgés libyens avançaient vite hier vers l’ouest, en direction de Syrte, la ville natale de Mouamar El Gueddafi, profitant de la débandade de ses forces affaiblies par les frappes de la coalition internationale.
Hier matin, le terminal pétrolier de Ras Lanouf, dans l’est, était aux mains des rebelles, selon des journalistes de l’AFP. Ce bourg est situé à 210 km à l’ouest d’Ajdabiya, carrefour stratégique repris samedi par la rébellion. «Il y a eu un peu de résistance à l’aube mais ils se sont retirés», a raconté un rebelle de 35 ans, Attia Hamad. Les insurgés ont ensuite pris la localité de Ben Jawad, à 30 km à l’ouest de Ras Lanouf. Les forces pro-El Gueddafi se replient en direction de Syrte, à 200 km plus à l’ouest, le long d’une côte plate et désertique difficile à défendre sans aviation ni artillerie lourde. Selon une habitante de Syrte jointe par téléphone, la ville a été pilonnée toute la nuit par des frappes aériennes qui ont provoqué des dégâts considérables. «La ville est devenue une boule de feu», a-t-elle déclaré, précisant que la plupart des habitants, terrifiés, avaient fui dans le désert.
Réunion sur la Libye à Londres: plus de 35 pays déjà inscrits
Les ministres des Affaires étrangères de plus de 35 pays ont déjà confirmé leur participation à la réunion mardi à Londres du groupe de contact politique sur l’opération militaire en Libye, a annoncé hier le ministère britannique des Affaires étrangères dans un communiqué.
«Les ministres des Affaires étrangères de plus de 35 autres pays ont déjà confirmé leur présence», aux côtés de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton et du secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon dont la venue avait été annoncée dernièrement, a précisé le Foreign Office. Le président de la Commission de l’Union africaine Jean Ping assistera également à cette réunion, a indiqué le ministère. Samedi, le gouvernement britannique avait également fait état de la présence du Premier ministre qatari Hamad ben Jassem.
La coalition a aussi mené des raids aériens intensifs sur la route côtière entre Ajdabiya et Syrte. «Les frappes aériennes (sur Syrte) ont continué pendant des heures et des heures, sans arrêt», a déclaré dans la nuit un porte-parole du régime. Plus à l’ouest, Misrata, troisième ville du pays à mi-chemin entre Tripoli et Syrte, était toujours soumise samedi à un «pilonnage intensif» des forces pro-El Gueddafi, selon un porte-parole des rebelles à leur siège à Benghazi qui a appelé à l’aide.
Un médecin de Misrata a déclaré que 117 personnes avaient été tuées depuis le 18 mars dans cette ville aux mains des rebelles mais assiégée par les pro-El Gueddafi. Samedi, la reprise d’Ajdabiya, à 160 km au sud de Benghazi, et du site pétrolier de Brega, à 80 km plus à l’ouest, avait constitué la première victoire des rebelles depuis le début de l’intervention militaire de la coalition internationale le 19 mars, inversant la tendance après une longue reculade et une semaine de stagnation.
Alors que les craintes de voir les combats ou des sabotages des infrastructures pétrolières avaient fait grimper les cours du brut, les journalistes de l’AFP n’ont vu aucun signe de dégâts importants sur les terminaux de Brega et de Ras Lanouf. Depuis jeudi, les raids ont «préparé le champ de bataille» et des officiers et soldats ayant rejoint la rébellion ont joué un rôle majeur, coordonnant leurs attaques avec la coalition, a expliqué un porte-parole des insurgés à Benghazi, Chamsiddin Abdoul-molah.
Le président américain Barack Obama s’est réjoui de l’évolution de la situation, déclarant que la mission internationale en Libye était «ciblée et en train de réussir». Son secrétaire à la Défense, Robert Gates, a accusé les forces du colonel El Gueddafi de «déplacer les corps des gens qu’il a tués pour les mettre sur les sites que nous avons attaqués», pour faire croire qu’il s’agit de civils tués par les alliés.
Le département d’Etat américain a de son côté loué les efforts de l’Union africaine (UA) pour tenter de trouver une solution négociée à la crise libyenne.
Le régime libyen s’est d’ailleurs dit prêt à accepter le plan de l’organisation panafricaine prévoyant la cessation des combats et un dialogue en vue d’une «transition» démocratique. Mais les rebelles ont rejeté cette initiative, exigeant le départ du colonel El Gueddafi. Sur la conduite des opérations, des négociations se poursuivaient hier pour que l’Otan prenne toutes les opérations en main.
A l’approche d’une première réunion du groupe de contact demain à Londres, le président français Nicolas Sarkozy a annoncé une initiative franco-britannique en vue d’une solution politique. L’Italie, ancienne puissance coloniale, a annoncé qu’elle présenterait elle aussi un plan, qui prévoit un exil du colonel El Gueddafi.
«Même à l’intérieur du régime, il y a des gens qui travaillent à cette solution», a affirmé le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini. Le pape Benoît XVI a lancé un appel hier à la communauté internationale et à toutes les parties en présence pour l’ouverture «immédiate d’un dialogue» afin d’aboutir à un cessez-le-feu en Libye. Un bateau transportant près de 300 migrants africains est arrivé dans la nuit de samedi à dimanche dans le sud de l’Italie, la première embarcation en provenance de Libye depuis le début de la rébellion. D’autres étaient en route, et le pays, déjà confronté à un afflux massif passant par la Tunisie, redoutait une nouvelle vague encore plus importante.
R.I