Selon les spécialistes, ce sont les hommes qui sont le plus touchés par ces problèmes d’infertilité, plus de 60%. Les raisons de ce phénomène encore taboues…
«Un bébé, si je veux, quand je veux.» Il semble bien loin le temps où les jeunes couples algériens pouvait se vanter d’une telle affirmation. Désormais, c’est «un bébé, si possible»… pour au moins 15% d’entre eux! En effet, l’infertilité est un grave problème de santé publique qui est en train de «ronger» la société algérienne. «Quand j’ai commencé ma carrière il y a 30 ans, les consultations pour les problèmes de fertilité étaient minimes, désormais elles sont presque majoritaires», affirme le Dr Farid Djender, gynécologue obstétricien. Pour le directeur du centre de fertilité Ahlem à Aïn Taya, Alger, les chiffres parlent d’eux-mêmes: «Plus de 15% des nouveaux couples algériens souffrent de stérilité.»
Dans un couple, c’est généralement la femme qui réalise qu’il y a un problème et qui réagit. Néanmoins, le plus difficile pour elle est de convaincre son conjoint d’aller consulter un spécialiste. Mais contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les femmes qui souffrent le plus de cette maladie, mais bien les hommes. «Il y a une dizaine d’années, sur 10 consultations pour l’infertilité il y avait un homme contre neuf femmes. Ces dernières années, c’est sept hommes pour trois femmes», affirme-t-il en se basant sur son expérience personnelle et les échanges qu’il a avec ses collègues. «Le taux des hommes présentant des anomalies de leur spermogramme et spermocytogramme, (examens révélant l’état de santé des spermatozoïdes) est en augmentation», a-t-il expliqué.
Ce spécialiste assure dans ce sens que «l’infertilité masculine représente 60%» contre 40% en moyenne au niveau mondial. Les raisons de ce phénomène? «En fait, il n y a pas de causes directes, mais c’est un ensemble de facteurs qui font qu’il y a une régression de la fertilité de l’humain», souligne-t-il avant d’énumérer ces facteurs.
Parmi les causes principales que cite le Dr Djender, celles liés à l’environnement notamment en ce qui concerne l’alimentation. «Les hormones que l’on donne par exemple aux poulets sont très dangereux pour la fertilité.
Tout comme le surdosage de pesticides dans l’agriculture. Et je tiens à le signaler, ce sont deux phénomènes très présents chez nous», dit-il. «Il y a également les graves problèmes de pollutions qui empoisonnent notre quotidien, mais aussi le retard de l’âge du mariage», ajoute-t-il non sans citer l’influence de l’alcool, de la drogue et de la cigarette surtout, mais aussi par d’autres facteurs tels que la pollution.
Il cite aussi les maladies chroniques, à l’instar du diabète qui causent la stérilité bien que le diabète ne soit pas forcément la cause directe, ainsi que d’autres maladies telles que les infections urinaires ou encore les maladies sexuellement transmissibles (MST). «Chez nous, les MST sont un sujet encore tabou. On tarde avant d’aller les soigner, or si elle ne sont pas soignées à temps, elles rendent infertils», tient-il à informer. Le mal du XXIème siècle, à savoir le stress, «joue aussi un rôle très important dans ce type de problèmes de santé». Ce spécialiste met en avant le fait que l’enfant est un élément important dans le couple algérien, «ce qui n’est pas forcément le cas dans un couple européen ou même chez nos voisins tunisiens et marocains», certifie -t-il. «Chez nous, c’est vécu comme un véritable drame qui a souvent raison des couples…», rétorque le directeur du centre de fertilité Ahlem. «Les gens dépensent plusieurs millions de centimes pour pouvoir se faire soigner.
Certains vont jusqu’à vendre leurs voitures et même les bijoux des dames…», poursuit-il. Ce spécialiste tient à rassurer les malades sur l’existence de traitement efficace. Cependant, il insiste sur la prise en charge précoce des patients. «Plus c’est pris en charge rapidement, plus les chances d’avoir un enfant augmentent», précise-t-il. Si beaucoup de spécialistes affirment qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter avant deux ans de vie conjugale sans enfants, le docteur Djender ne partage pas cet avis.
Il appelle les couples qui veulent avoir des enfants, à demander l’avis d’un spécialiste après six mois seulement de vie conjugale, avec des rapports sexuels réguliers. Pour lui, deux ans peuvent réduire à néant les chances d’avoir des enfants pour une femme de 40 ans par exemple, soulignant que seuls les couples jeunes peuvent se permettre d’attendre aussi longtemps. Enfin, il souligne que «certaines stérilités sont plus difficiles que d’autres à traiter. Et que l’efficacité du traitement n’est pas garantie à 100%». Mais il ne faut jamais perdre espoir, en cas d’échec la solution pour devenir parents est peut-être d’adopter un enfant…Le début d’un grand bonheur!