Selon des rapports de police et de la gendarmerie nationale, des centaines de citoyens ont été agressés depuis le début de l’année en cours, pour être délestés de leurs portables. Le vol de portables est devenu, ces derniers temps l’une des formes de délinquance les plus répandues en milieu urbain. Lieux de prédilection pour les pickpockets : les espaces publics et les arrêts de bus.
Que ce soit au niveau de la rue Asselah-Hocine, à Alger-Centre, la place des Martyrs ou celle du 1er-Mai les voleurs guettent généralement les voyageurs à l’heure de pointe au moment de l’arrivée des bus. D’autres guettent les personnes juste à la sortie des points de recharge (Flexy) et des taxiphones.Certains délinquants, la plupart des adolescents, procèdent parfois au su et au vu des citoyens dans les bus. Certaines victimes ont même été agressées dans une totale indifférence. « Le plus grave est que les victimes sont rares à déposer plainte de peur d’affronter leurs agresseurs devant le juge », dira un officier de police qui affirme que les chiffres des vols ne reflètent pas la réalité.
Selon un rapport de la police sur le phénomène, 71% des vols sont commis sur la voie publique, 16% dans des véhicules, 7% dans des locaux commerciaux, 3% dans les arrêts d’autobus et 2% à l’intérieur des bus. Contrairement à une idée reçue, ce sont les hommes qui sont les premières cibles des voleurs de portables. Ainsi, 75% des victimes sont de sexe masculin. Les victimes sont pour la majorité des jeunes : 35% sont âgées entre 20 et 30 ans et 12% de plus de 50 ans. Parmi eux, 24% sont des travailleurs, 23% des fonctionnaires, 11% des commerçants et 10% des étudiants. Tous les modèles de téléphones portables sont ciblés notamment ceux de type Iphone, souligne le rapport.
Autre singularité : les enquêtes des services de sécurité ont déterminé que des jeunes filles sont de plus en plus impliquées dans cette criminalité. Elles optent pour une méthode moins agressive. Ni couteau pointé vers la victime, ni vol à la tire, mais simplement de la ruse. Celle d’aborder des personnes ciblées en leur demandant leurs portables pour contacter un proche en urgence. Elles attirent leurs victimes dans un coin isolé puis prennent leurs jambes à leur cou.
C’est la mésaventure vécue par cette femme qui a été conduite jusqu’à la cage d’un immeuble au niveau de la rue Hassiba-Ben Bouali à Alger par une jeune fille qui a prétexté un appel d’urgence. Une fois le portable en main, la voleuse s’est volatilisée. Selon le rapport de la police, ces délinquantes sont parfois accompagnées par un chef de bande. Reste que cet acte délictueux n’est pas l’apanage des marginalisées : des étudiantes ont été arrêtées en flagrant délit dans les bus et les marchés.
Côté bilan, la cellule de communication de la Gendarmerie nationale fait ressortir que 7 filles ont été arrêtées durant le premier semestre par les gendarmes pour vol de portables. Durant cette période, les unités de la GN ont traité 317 affaires de vol de portables.
DES POLICIERS EN CIVIL DANS LES BUS
Selon la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), les wilayas les plus touchées par le phénomène sont respectivement Alger, Oran, Annaba et Constantine. La sûreté de wilaya d’Alger a mis en place un dispositif spécial pour tenter de contrer ce phénomène.
« Des policiers en civil ont été déployés dans les lieux où l’on enregistre le plus ce genre de délit, mais on préfère cibler les réseaux », souligne un officier à la SWPJ d’Alger. Récemment, un réseau composé de 5 jeunes, âgés entre 17 et 24 ans, a été démantelé par les éléments de la sûreté de Bab El Oued. Les incriminés utilisaient des armes blanches pour déposséder leurs victimes de leurs téléphones.
PLUS DE 60 000 APPAREILS VOLÉS DEPUIS 2008
Durant les quatre dernières années plus de 100 000 appareils ont été volés sur la base des plaintes des victimes, selon les statistiques des services de sécurité (police-gendarmerie). Les bilans communiqués par la DGSN sont alarmants : près de 60 000 appareils ont été dérobés depuis l’année 2008.
Le plus grand nombre des portables volés a été enregistré en 2009 avec une baisse sensible en 2011. Durant les deux premiers mois de l’année 2012, plus de 560 individus ont été arrêtés entre janvier et février derniers à travers le territoire national. Ils étaient impliqués dans le vol de 1880 unités. En 2011, 3 327 individus impliqués dans le vol de 11 542 appareils mobiles ont été présentés au parquet contre 4 291 personnes en 2010 pour les vols de 13 739 téléphones portables, soit une baisse de 16 %.
L’IMEI POUR BLOQUER L’UTILISATION DU PORTABLE
Les services de sécurité insistent sur le dépôt de plainte. « Le facteur temps est important dans l’arrestation de l’auteur et permet la récupération de l’appareil grâce au numéro de série. Ce code est l’identité du portable. Les enquêteurs peuvent même localiser le lieu où se trouve le propriétaire de l’appareil.
Des affaires de crime ont été élucidés grâce à cette technique », souligne cet officier de la gendarmerie. Le code IMEI ou « identité internationale d’équipement mobile » est unique, propre à chaque téléphone. Il permet à l’opérateur de téléphonie d’identifier le mobile appelant et ainsi de l’autoriser ou non à se connecter au réseau.
Son rôle est de pouvoir bloquer un mobile volé (grey list, black list) auprès de l’ensemble des opérateurs ayant souscrit à la base de données IMEI. Lorsque l’on se fait voler son téléphone, on donne son code IMEI à la police lors du dépôt de plainte qui l’inscrit dans cette base de données ce qui rend l’appareil volé inutilisable. Concernant les poursuites judiciaires, le vol de portable est passible de deux à cinq ans de prison. En cas de récidive, la peine peut aller jusqu’à dix ans de prison et le paiement d’une amende de 200 000 DA.
N. B