L’attention accordée par les pouvoirs publics au secteur des textiles et les différentes décisions prises pour la relance de l’activité semblent ne pas satisfaire les travailleurs.
Leur représentant au sein de l’Ugta, le secrétaire général de la Fédération des textiles et cuirs, Amar Takjout, estime que la dépénalisation de l’acte de gestion pose toujours problème. La rémunération des cadres dirigeants des usines reste, selon lui, insuffisante. “Continuer à payer un directeur d’une usine qui emploie près de 2 000 personnes à 60 000 DA, ira à contresens de ce qui a été décidé par le gouvernement pour développer le secteur”, argue-t-il.
M. Takjout soulève une problématique plus profonde : “Le gouvernement a-t-il opté réellement pour une économie productive ?”, s’interroge-t-il. Car, explique-t-il, entre les intentions et les actes, il existe beaucoup de nuances, voire de contradictions. “On ouvre le marché, on accélère l’adhésion à la Zone arabe de libre-échange alors qu’on ne dispose pas d’une économie forte et durable.” Il en veut pour preuve les différentes rencontres régionales programmées par le ministre de l’Industrie pour rencontrer et écouter les opérateurs économiques afin de donner un second souffle au secteur industriel alors qu’en parallèle l’Exécutif poursuit le processus d’adhésion à la Zone arabe de libre-échange (Zale). Et d’ajouter : “Nous sommes à 95% dépendant des marchés extérieurs. Depuis 10 ans, on n’a exporté qu’un milliard de dollars en dehors des hydrocarbures.” Le premier responsable de cette organisation pense que faire partie de cet espace d’échanges arabe et celui avec l’UE risque de porter préjudice à l’économie nationale. Car, l’entreprise algérienne n’est, avoue-t-il, pas encore prête pour affronter ses concurrentes sur ce terrain où la compétition bat son plein. Le mieux, suggère-t-il, c’est de reconstruire d’abord l’économie nationale et de réinventer l’entreprise nationale. Cela étant, le plan de relance décidé en 2011 pour lequel l’État a dégagé une enveloppe de 2 milliards de dollars commence à connaître un début de mise en œuvre.
Le travail effectué par la SGP Industries manufacturières vise à traduire l’ensemble des décisions prises par les pouvoirs publics en mars 2011. Il s’agit en fait de la réouverture de deux usines, une à Meskiana et une autre à Chéraga. Plus de 180 ingénieurs ont été recrutés et envoyés en formation de master dans un institut à Alger. Outre l’assainissement des entreprises, une opération de partenariat avec les Turcs pour une prise de participation dans le capital des deux usines (Béjaïa et Relizane) selon le mode 49-51% a été également réalisée. D’ici à 2014, il est prévu la création de quelque 4 000 postes d’emploi dans ces deux wilayas. Des accords de bonne intention pour la fabrication de chaussures ont été, en outre, paraphés avec des Italiens et des Espagnols. Toutefois, le SG de la fédération reste insatisfait. “Je ne ressens pas de l’enthousiasme. Ça va lentement”, lance-t-il. Depuis les années 1990, plus de 50 usines ont été fermées et 35 000 postes d’emploi perdus. Actuellement, la production nationale ne couvre que 5% des besoins. Avec une meilleure exploitation des potentialités recensées, la demande nationale peut être satisfaite, affirme M. Takjout, au moins de 20%.
Ce qui va doubler, précise-t-il, le nombre des effectifs qui passeront de 20 000 à 40 000. De ce lot d’unités fermées, une vingtaine d’entre elles peuvent être reprises et rouvertes, souligne le syndicaliste. Par ailleurs, ce dernier exhorte les pouvoirs publics à importer utile. C’est de n’introduire sur le marché national que les produits qui ne sont pas fabriqués en Algérie afin d’encourager les fabricants locaux et préserver l’économie nationale. M. Takjout soulève aussi des problèmes liés à la contrebande des matières premières, telles que les peaux et cuirs vers l’Italie, des tanneries qui ne respectent pas les normes et des ateliers clandestins qui échappent au fisc.
B K