Peugeot 3008 et Renault Kangoo en mode Hybrido-électrique

Peugeot 3008 et Renault Kangoo en mode Hybrido-électrique

On ne peut pas imaginer deux chemins si différents. En présentant quasiment le même jour leur Kangoo Be Bop Z. E. (pour Zéro Emission) et 3008 Hybrid4, Renault et Peugeot ont clairement signifié qu’ils choisissaient deux voies presque divergentes dans la conquête de l’électricité.

Le Losange mise sur un véhicule 100% électrique, qui ne comporte même pas de moteur thermique embarqué pour assurer une recharge autonome des batteries, tandis que Peugeot a retenu une solution hybride diesel et électricité.

«Le véhicule électrique est la solution de rupture», dit Renault, qui promet que 2011 verra le début de la commercialisation série de ses véhicules électriques «accessibles à tous».

«L’hybride est une technologie simple et automatique», rétorque Peugeot, qui joue la carte du pragmatisme.

Avant d’examiner les arguments de l’un et de l’autre, parlons des véhicules que nous avons tous les deux essayé dans le nord de la région parisienne, le Renault sur route, le Peugeot sur le circuit de Mortefontaine.

Le Kangoo Be Bop est la version courte du modèle. On retrouve l’intérieur flashy et la haute garde au toit, mais sous le capot réside un moteur électrique de 44 kW (60 ch) délivrant un couple maximum et constant de 190 Nm.

Il est alimenté par une batterie lithium-ion de 48 modules, chacun de la taille d’un PC portable, qui délivre 15 kWh.

D’un poids de 250 kilos, elle est installée sous le plancher de la voiture. Selon Renault, elle assure une autonomie minimale de 100 kilomètres.

Comme tous les véhicules électriques, le Kangoo Be Bop Z. E. s’ébroue ses 1,6 tonnes dans un silence total. L’accélération de ce prototype, correcte, se fonde sur le couple, présent dès le départ.

L’allure maximale, limitée à 130 km/h, nous a semblé atteinte dans les mêmes délais qu’une voiture classique.

Le frein moteur, dont la puissance peut être modulée, est puissant : le Kangoo électrique, comme le TGV, recharge ses batteries au lever de pied. Le tout sans passer aucun rapport, car l’auto se satisfait d’un réducteur en guise de boîte de vitesses.

Le Peugeot 3008 HyBrid4 démarre aussi en silence sur son moteur électrique, placé dans l’essieu arrière. Mais le diesel se met rapidement en marche, toutefois assez discrètement et sans non plus beaucoup vibrer.

Un mode ZEV (Zero Emission Vehicle) décale le seuil de mise en route du moteur thermique vers le haut et permet de rouler assez longtemps en ayant recours uniquement au moteur électrique, d’une puissance de 27 ch (20kW), à la manière d’une Toyota Prius.

Comme sur la Japonaise, un écran permet de suivre le déroulement des opérations. Les deux types de motorisations conjuguent leurs efforts (200 ch au total) jusqu’à 120 km/h, vitesse à laquelle l’électrique s’efface et cède totalement la place au diesel HDi de 2 litres de 163 ch.

Selon Peugeot, le véhicule ne consommerait que 4 litres au 100 en cycle mixte pour des rejets de 109 grammes de CO2 par kilomètre.

Moins de 4 litres au 100 et moins de 100 grammes de rejets de CO2 sont visés pour la commercialisation en 2011.

La transmission mécanique pilotée à six rapports se montre plus douce que sur une auto conventionnelle.

La raison est simple : par sa poussée, le moteur électrique lisse le changement de rapport et évite le désagréable phénomène de «pingouinage» (inclinaison puis relèvement du buste lors du passage des vitesses).

Avec ses deux essieux moteurs, le 3008 HyBrid4 récolte une transmission intégrale à bon compte.

Un mode «4WD» donne du reste pour consigne aux deux motorisations de fonctionner le plus souvent ensemble.

Mais c’est le Grip Control qui bénéficie en premier de ces possibilités en optimisant l’antipatinage des roues : le report du couple de la motorisation électrique (200 Nm) sur une seule des deux roues arrière est possible.

Cette hybridation parallèle (ou «full hybrid») diffère énormément du système de Toyota. Sans entrer dans les détails techniques, l’hybridation du constructeur japonais se révèle plus complexe que celle mise au point par le groupe français, dont le groupe électrique est centralisé sur l’essieu arrière.

Celui-ci compte la standardiser peu à peu à toutes ses gammes, tant Peugeot que Citroën. A quel prix ?

La marque vise un surcoût de 2 000 € entre le diesel et le diesel-hybride, tout en admettant que ce chiffre est encore loin d’être atteint.

Actuellement, on parlerait plutôt d’un différentiel de 3 à 5 000 €. A quoi va s’ajouter la coûteuse dépollution du moteur à huile lourde imposée par la norme Euro 6.

Interrogation également sur les prix chez Renault, qui est très évasif sur le celui de la batterie, mettant en avant d’hypothétiques solutions de financement.

En admettant que tout souci d’ordre financier soit évacué, le rechargement de l’accumulateur du Kangoo Be Bop Z.E. reste un problème de taille. Trois modes sont envisagés par Renault.

Le premier est la charge standard, d’une durée de 4 à 8 heures. A moins de laisser pendre des câbles aux fenêtres, elle exclut les automobilistes urbains, et ne sera réservée qu’à l’habitat individuel.

La seconde est la recharge rapide (20 à 30 mn) pour donner un coup de fouet à la batterie : encore faut-il que des prises soient raisonnablement installées sur tout le territoire.

Enfin, le dernier système est le « QuickDrop », dans lequel les batteries seront remplacées dans des stations ad hoc en quelques minutes.

Là aussi, il faudra mettre en place un coûteux réseau de stations-services spécialisées.

L’autonomie suscite pour sa part quelques questions. Renault annonce 100 km et vise 160 km lors de la commercialisation.

Mais dans quelles conditions d’utilisation? Et en toutes saisons ? Là encore, Renault semble avoir réponse à tout, en avançant que 80% des trajets font moins de 60 kilomètres, chiffre également cité par GM à propos de sa Volt électrique.

Il faut enfin prendre en compte la fourniture supplémentaire d’électricité qui sera nécessaire pour faire tourner un parc public de véhicules électriques.

Certes, ceux-ci ne produisent aucune émission en roulant, mais la production d’électricité devra, si on veut respecter la chaîne écologique, se réaliser également de manière propre, ce qui est loin d’être le cas dans de nombreuses parties du monde.

Cette production devra être enfin parfaitement régulée, ce à quoi Renault rétorque que les recharges auront essentiellement lieu la nuit, période de faible charge du réseau.

En proposant à l’orée 2011 un véhicule électrique pour tous, Renault se lance un défi d’envergure qui dépasse le simple cadre de ce type de motorisation.

Outre les questions techniques liées à une auto strictement électrique, se pose la question des infrastructures, qu’il faudra mettre en place de concert.

Sans doute le Losange pourra-t-il appel à des spécialistes du service de proximité, tels les fournisseurs d’énergie ou de téléphone, qui seront peut-être heureux d’entrer dans ce projet.

Reste tout de même à savoir quelle sera l’importance des ventes de tels véhicules, que leur prix et leur fonctionnement destineront en premier à des utilisateurs fortunés et avertis.

Ce pari du tout électrique plaît aux pouvoirs publics, toujours avides de voir reconnaître leur fibre verte.

Reste, de tous les côtés, à ne pas décevoir une population d’automobilistes qui, aujourd’hui, cherche avant tout à rouler pour pas trop cher.

Dans les couloirs du Technocentre, on dit travailler encore beaucoup sur le brave moteur à explosion, qui n’a pas encore tout à fait dit son dernier mot.

Face au projet de Renault, l’hybride-diesel de Peugeot peut paraître modeste.

Il n’empêche que, sous réserve de diminuer son coût de fabrication, cette double motorisation apparaît ingénieuse et apte à faire chute la consommation d’énergie fossile.

Quoi qu’il en soit, chez Renault comme chez Peugeot, un rendez-vous technologique à deux ans a été pris. Un délai qui pourrait paraître très court.

La technique des Renault Kangoo Be Bop Z.E.

• Moteurs : Electrique

• Puissance : 44 kW (60 ch)

• Couple : 190 Nm

• Transmission : directe avec réducteur

• Type de batteries : lithium-ion (15 kW)

• 0-100 km/h : N. C.

• Vitesse : limitée à 130 km/h

• Consommation carburant : 0

• CO2 : 0

• Prix : N.C. (sortie prévue : 2011)

La technique des Peugeot 3008 HyBrid4

• Moteurs : Thermique – (traction) : diesel 4 cyl.1 998 cm3.

Electrique (propulsion) : synchrone à aimants permanents.

• Puissance : Thermique : 163 ch à 3 750 tr/mn.

Electrique : 20 kW (27 ch) en continu, 27 kW (37 ch) maxi.

• Couple : Thermique : 300 Nm à 1 580 tr/mn.

Electrique : 100 Nm en continu, 200 Nm maxi.

• Transmission : mécanique, pilotée à 6 rapports

• Type de batteries : Ni-Mh (Nickel Métal Hydrure).

• 0-100 km/h : 8, 8 s.

• Vitesse : 209 km/h

• Consommation carburant : 4, 1 l (mode électrique : 0)

• CO2 : 109 g/km

• Prix : N.C. (sortie prévue : 2011)

N.C. = non communiqué.