La prolifération des scandales de corruption a sérieusement ébranlé le sommet de l’Etat et a terriblement choqué des Algériens, déjà désarçonnés par une situation politique et sociale de plus en plus étouffante.
Face à cette ambiance plutôt inquiétante, l’Assemblée populaire nationale ne semblait pas secouée, avant que ne vienne l’initiative du député Ali Brahimi, bousculer le silence que s’est imposé la chambre basse du Parlement.
La requête du député de Bouira va-t-elle susciter l’intérêt des parlementaires ? Une virée dans les travées de l’hémicycle pour se rendre compte de la suite qui lui sera réservée est obligatoire. Même si les avis sont un peu partagés, les sensibilités politiques majoritaires à l’APN affichent comme un certain scepticisme à l’égard de cette initiative.
Sedik Chihab, député RND, a estimé que « si les commissions d’enquête parlementaires sont un instrument de contrôle qui entre dans les prérogatives de l’APN, il reste que le recours à cette procédure prend souvent des allures politiciennes, voire même de surenchère », ajoutant qu’« il existe une volonté affichée de tous les groupes parlementaires pour faire face à ce fléau qui gangrène toute la société ». Il a jugé qu’« au lieu d’avoir recours à une commission d’enquête sur un sujet aussi sensible, aux ramifications profondes, il est important de réclamer l’application des lois votées par l’APN ».
Pour ce qui est de l’initiative du député de Bouira, M. Chihab estime « important qu’un député prenne une telle initiative, car cela ferait prendre conscience davantage aux pouvoirs publics afin de se dresser contre le phénomène de la corruption qui déstabilise les actions de redressement du gouvernement et décrédibilise aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur le pays ». La tendance n’est pas tout à fait favorable également chez les parlementaires du FLN.
Pour Abdelhamid Si Affif, la lutte contre la corruption est « l’affaire de la société et de l’Etat. Le président de la République a pris le courage politique de lutter contre la corruption en mettant en place un dispositif juridique et institutionnel, qui peut-être n’a pas eu les résultats escomptés compte tenu d’un passé rempli de pratiques irrégulières. Cette accumulation a fait que cette tâche est difficile mais pas impossible ».
Le parlementaire du FLN a considéré que « seul un Etat fort peut permettre une lutte réelle contre la corruption. Après les années d’instabilité et d’insécurité, l’Etat s’est renforcé, ce qui a permis au pouvoir de mettre à nu des scandales ».
S’agissant de la mise en place d’une commission d’enquête, il souligne que « si le Parlement dispose de mécanismes de contrôle, ils ne doivent pas faire l’objet d’une instrumentalisation politique ». L’initiative de M. Brahimi semble peu intéresser les parlementaires du RCD qui, par le biais de Tahar Besbas, estiment qu’un débat général à l’APN « est plus important qu’une commission d’enquête ». Cependant, d’autres parlementaires ont affiché leur soutien total à la démarche du député de Ali Brahimi.
C’est le cas de Tarik Mira, un des signataires, qui a indiqué que « si la commission d’enquête aboutit, elle aurait accompli deux missions : dévoiler les mécanismes et l’ampleur de la corruption et rehausser le rôle du Parlement » terni par le déséquilibre constitutionnel et la fraude électorale.
Non sans rappeler que « si les tentatives de mettre en place une commission d’enquête ont échoué, cela ne doit pas nous empêcher de faire triompher la légalité, quand bien même la marge est réduite ». Le député du parti El Islah, Rachid Yaichi, s’est prononcé aussi en faveur d’une enquête parlementaire : « Nous soutenons toute initiative allant dans le sens de la lutte contre la corruption. »
Par Hacen Ouali