Pétrole et gaz algériens sous la loupe des experts internationaux, L’Algérie ambitionne les tout premiers rangs mondiaux

Pétrole et gaz algériens sous la loupe des experts internationaux, L’Algérie ambitionne les tout premiers rangs mondiaux
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L’Algérie est au centre de certains enjeux internationaux. Ses hydrocarbures font jaser les experts de prestigieuses revues spécialisées, de l’Agence internationale de l’énergie et de concurrents bien connus sur la scène internationale. La plupart estiment que notre pays est en mesure de jouer les premiers rôles dans l’investissement pétrolier et surtout gazier, alors que certains n’écartent pas de grandes ambitions du groupe Sonatrach, à travers les lourds investissements qu’elle consent. Le Jeune Indépendant se propose de vous en livrer des morceaux choisis.

Le pétrole et le gaz algériens suscitent commentaires et analyses des experts et agences internationales. Le dernier en date est celui du prestigieux Financial Time qui livre une analyse dans son édition du 14 juin sur «les enjeux de l’OPEP et la guerre des prix». Il qualifie l’Algérie de «nouvel hyper-faucon de l’Opep», en estimant que sa position au sein de l’organisation va vers un « durcissement».

Selon le même journal, cette position s’expliquerait par «la faiblesse des investissements de Sonatrach et la perte de la «prime de qualité» du pétrole léger algérien en raison de la concurrence des pétroles de schistes». Une affirmation qui peut être liée à l’évolution de la position l’Algérie, se rapprochant du nouveau front irano-vénézuelien.

En effet, la dernière réunion des 12 ministres de l’OPEP a fait scinder l’organisation en deux parties. D’un côté, les gros producteurs et exportateurs comme l’Arabie Saoudite et ses alliés qui préfèrent augmenter leurs quotas de production en révisant à la baisse les prix et, de l’autre, des pays comme l’Algérie, l’Iran et le Venezuela qui veulent «un respect des quotas et une stabilité du marché international par l’équilibre de l’offre», selon le communiqué de l’Opep.

LG Algérie

Les derniers chiffres communiqués par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime, dans son rapport mensuel «Oil market report», que la production a légèrement baissé de 20 000 barils/jour le mois dernier pour se situer à 31,87 millions de barils/jour. L’Opep évalue, pour sa part, sa production à 31,58 millions de barils/jour alors même que le plafond de production avait été fixé à 30 millions de barils/jours en décembre dernier.

Plusieurs pays de l’Opep attribuent la baisse des prix de près de 25 % en deux mois à un «excès de production» sur le marché mondial, mettant en cause la forte hausse de l’offre saoudienne. C’est ainsi que l’Algérie qui a rejoint le «groupe du refus» prend comme constat de réalité la dernière déclaration de Wilson Pastor-Morris, le ministre équatorien du Pétrole, qui, sans mâcher ses mots, a estimé qu’«il y a actuellement une surproduction sur le marché» du brut.

Même ton chez le ministre libyen Abderrahmane Benyazza qui estime à 1,8 million de barils par jour (mb/j) l’excès d’offre sur le marché, alors que le Vénézuélien Rafael Ramirez avait évoqué une surproduction de 3 mb/j. Ainsi, l’Algérie qui a tenu par le passé à «l’équilibre de l’offre» est comme devenue le pays qui accuse une faiblesse de l’investissement pétrolier.

Or, dans sa dernière déclaration, le P-DG de Sonatrach Abdelhamid Zerguine a souligné  l’amélioration de l’investissement en amont suite à 20 découvertes réalisées avec succès depuis le début de l’année 2012». De même que l’idée selon laquelle «l’Algérie est en butte à des difficultés budgétaires», selon le Financial Time, n’est pas fondée, étant sans doute en relation avec les prises de position de notre pays au sein de l’OPEP.

L’ALGÉRIE POUR UN ÉQUILIBRE DE L’OFFRE PÉTROLIÈRE

Le marché mondial connaît une chute des prix qui affole les pays exportateurs. Selon les spécialistes, «c’est un déséquilibre entre offre et demande imputé surtout à un excès d’offre». Dans le collimateur, tout le monde pointe du doigt l’Arabie saoudite qui a fortement augmenté son offre depuis décembre, passant de 9,45 mb/j à plus de 10 mb/j en mai, en arguant les difficultés de l’économie mondiale et la forte contraction de la production iranienne tombée à son plus bas niveau depuis 20 ans».

Depuis quelques années, les exportateurs de l’OPEP n’arrivent pas à faire plier certains membres quant à respecter les quotas de production et à limiter l’offre selon un panier établi par un consensus de tous les membres.

L’Algérie fait partie des pays qui plaident pour «une offre équilibrée» tenant compte des perspectives du FMI qui estime pour le cas de notre pays que «les prix du pétrole devraient s’élever à 100 dollars le baril pour équilibrer le budget – à l’exclusion des paiements rétroactifs de salaires -, soit plus du double du niveau de 44 dollars le baril en 2006». Selon le rapport du FMI « l’Algérie a enregistré l’an dernier le deuxième plus important déficit budgétaire des pays producteurs de pétrole au Moyen-Orient et en Afrique du Nord avec un solde négatif égal à 3,6  % du PIB.

Le Financial Times souligne dans son analyse que «la hausse du seuil de rentabilité budgétaire du prix du pétrole a incité l’Algérie à rompre avec ses anciens alliés, l’Arabie saoudite, le Koweït et les Emirats arabes unis, et à défendre les prix en compagnie du Venezuela et de l’Iran».

Même si le niveau de production actuel de l’Algérie se situe à 1,5 millions b/j, rien n’empêche que les capacités de production soient relancées pour le moyen terme, contrairement aux prédictions sombres du Financial Time qui ne prévoit pas d’augmentation de ces capacités à l’horizon 2016. D’ailleurs, c’est le ministre de l’Energie algérien qui l’a précisé dans une déclaration à Kuala Lampur (Malaisie) lors du 25e Sommet international du gaz. «Nous produisons 1,2 million de barils/jour.

Nos capacités sont de 1,4 million que nous allons augmenter jusqu’à 1,5 mbj dans quelques mois», a-t-il indiqué en marge de ce sommet. Dans ce sillage, la compagnie nationale devrait conforter sa production avec les nouveaux gisements qui vont entrer en production en 2013-2014, a ajouté le ministre. Le P-DG de Sonatrach vient d’ailleurs, la semaine dernière, d’annoncer un bilan intéressant où il parle d’un bilan «d’explorations qui dépassent les 15 découvertes en moyenne par le seul effort de Sonatrach».

Côté partenariat, Sonatrach veut mettre un terme à tout conflit ou contentieux qui freinerait ses projets. La revue Pétrole et gaz arabe (PGA) a souligné dans son numéro de mai 2012 que «l’Algérie veut aller vite pour faire avancer certains de ses projets pétroliers et gaziers», en aboutissant à un compromis avec Maersk et Anadarko.

«C’est la conclusion que l’on peut tirer du délai extrêmement court qu’il a fallu aux autorités algériennes pour approuver indirectement le compromis entre la Sonatrach et deux de ses partenaires sur les blocs 404 et 208 dans le bassin de Berkine, Anadarko Petroleum Corporation (Etats-Unis) et Maersk (Danemark).»

LE GAZ, PROCHAINE BATAILLE À L’INTERNATIONAL

L’Algérie dispose des capacités de production pour augmenter ses exportations de gaz vers l’Europe du Sud, avec la reprise économique dans ce continent qui va soutenir la demande gazière, a estimé, dernièrement, Torstein Indrebo, secrétaire général de l’Union internationale du gaz (UIG), cité par la revue Petroleum économiste.

Il faut rappeler que l’Algérie exporte vers l’Europe via trois gazoducs que sont Enrico Mattei ou le GME, reliant l’Algérie à l’Italie via la Tunisie, Pedro Duran Farell (GME), la reliant à l’Espagne via le Maroc, et Medgaz qui fait transiter du gaz directement de Beni Saf vers Almeria, sur la côte espagnole.

Selon les données actuelles du ministère de l’Energie et des Mines, les exportations algériennes de gaz par gazoducs ont atteint 35,7 milliards de m3, soit 69 % de ses exportations gazières globales.

En 2011, elle a exporté 27,3 milliards de m3 de gaz sous forme liquéfié, portant ses ventes globales de gaz vers l’étranger à 52 milliards m3. Environ 90 % de ses ventes de GNL sont destinées à la France, la Turquie, l’Italie et l’Espagne. Ce qui place l’Algérie dans un rôle éminent pour jouer dans la cour des grands exportateurs tels que le Qatar et la Russie.

Le P-DG de Sonatrach avait révélé, lors du Sommet du gaz en Malaisie, que « Sonatrach a prouvé sa fiabilité dans la fourniture de plus de 1 000 milliards de m3 de gaz vers l’Europe sans aucune interruption depuis qu’elle a commencé à exporter vers ce continent». Un indice qui fait que l’un des experts de la revue Petroleum Economist avait relevé «l’importance des gisements gaziers que l’Algérie va exploiter avec le maximum d’investissement à l’horizon 2020». De même que l’AIEA estime que le coût des investissements sera revu à la hausse pour les principaux pays exportateurs gaziers.

«La compagnie nationale des hydrocarbures, qui a mis la main à la poche (68 milliards de dollars pour les 5 années à venir), dans le but d’assurer la demande des pays consommateurs, attend à ce que ses partenaires lui renvoient l’ascenseur», indique le patron de Sonatrach. Et d’ajouter : «Nous estimons que le meilleur moyen de sécuriser aussi bien l’offre que la demande est d’encourager le partenariat, qui a donné des résultats tangibles pour tous les acteurs du marché gazier».

Cependant, les spécialistes soulignent l’avènement d’une guerre des prix qui va préfigurer la prochaine bataille d’approvisionnement des pays consommateurs. «Une hausse juste du prix du gaz est une condition minimale pour satisfaire les pays consommateurs», souligne encore le boss de Sonatrach. La directrice de l’AIEA, Maria Van Der Hoeven, explicite bien les enjeux à venir en prévoyant que «sur le long terme, nos perspectives sur l’énergie mondiale tablent sur une hausse de la demande de gaz plus forte que n’importe quelle énergie fossile jusqu’en 2035».

Confortée par son quatrième rang mondial d’exportateur de GNL, «l’Algérie devrait conforter davantage sa place de premier fournisseur de l’Union européenne en GNL dans les années à venir, d’autant plus que la montée en flèche de la demande sur le GNL est largement tirée, notamment, par l’Union européenne, où la production locale de gaz est en déclin», souligne dans son rapport d’avril dernier le Cedigaz (association internationale chargée de l’information sur le gaz naturel).

Cette association prévoit que «l’Algérie convoite la deuxième position pour le GNL à partir de 2012, avec un investissement orienté à long terme». L’autre atout réside dans les gaz non conventionnels inclus dans le portefeuille de l’investissement gazier national. Sonatrach vient de forer son premier puits de gaz de schiste dans le bassin d’Ahnet, situé au sud d’In Salah, qui sera suivi de deux autres, selon le directeur central des associations de Sonatrach, Kamel Eddine Chikhi.

«Nous venons d’entamer le forage du premier puits de gaz schiste en Algérie, baptisé Ahnet 1, qui va nous permettre d’approfondir davantage nos données sur nos réserves gazières non conventionnelles et d’établir les techniques de forage adéquates à ce type d’extraction de gaz», a-t-il précisé. Sur 180 000 km2, c’est la plus grosse superficie africaine, avec, selon Sonatrach, 600 millions de mètres cubes par kilomètre carré, soit plus de 2 000 milliards de mètres cubes qui peuvent être récupérés.

Dossier de Faycal Abdelghani