Le ministre de l’Agriculture, en déplacement à Aïn Defla, où il accompagnait hier le Premier ministre, a reconnu que cette perturbation est liée à une «offre insuffisante sur les marchés internationaux ».
Àvoir, et à revoir surtout, la réaction du ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Abdelwahab Nouri, aux énormes perturbations dans la disponibilité du lait en sachet à l’échelle nationale, il semble bien qu’il faille s’en accommoder, car celle-ci risque en effet de s’installer dans le temps.
Selon ce responsable, qui répondait à des questions de journalistes en marge de la visite du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, à Aïn Defla, «les perturbations dans la disponibilité du lait en Algérie seraient essentiellement dues à une offre insuffisante de cette matière sur les marchés internationaux ».
Le même responsable ajoute que « l’Algérie est un pays grand consommateur de la poudre de lait dont la disponibilité connaît des perturbations dans les marchés internationaux en raison des conditions climatiques survenues dans les pays exportateurs de cette matière». Parmi ces pays, le ministre a cité la Nouvelle-Zélande, l’Argentine et la France. Il a également expliqué cette situation par l’émergence de nouveaux pays consommateurs à l’instar de la Chine et de l’Inde.
En clair, cette explication sous-entend en filigrane que la perturbation dans la distribution de lait en poudre, qui avait commencé au début de cette année, risque de se prolonger encore dans le temps, étant donné qu’elle est liée, ne serait-ce qu’en partie, à des facteurs exogènes, sur lesquels l’Algérie n’a donc que peu de prise, pour ne pas dire aucune. Il n’en demeure pas moins que cette explication paraît pour le moins tout aussi oiseuse que boiteuse.
En effet, et au regard du caractère «hautement stratégique » que revêt la poudre de lait en Algérie (et pour s’en convaincre, il suffit juste de rappeler les fameuses sanglantes émeutes dites de l’huile et du sucre de fin- 2010 et début-2011), il est pour le moins étonnant de constater que l’Algérie ne s’était pas constituée un stock de réserve. En effet, la crise a pratiquement commencé dès le premier jour du mois de janvier de l’année en cours.
Les usines chargées de transformer la poudre de lait en produit liquide conditionné dans des sachets en plastique devaient elles aussi disposer d’un stock suffisant pour au moins plusieurs semaines. La forte demande sur le marché mondial, alliée à l’émergence de nouveaux pays consommateurs et une hausse du prix de ce produit ne peuvent donc expliquer cette perturbation.
Car, si tel avait vraiment été le cas, il ne fait aucun doute que la crise se serait manifestée par à coups, montant crescendo, mais pas de manière spontanée, brusque, et tout à fait ininterrompue. La piste liée au détournement de la poudre de lait (dont le prix d’achat est très largement subventionné par le Trésor public) pour d’autres types d’industries agroalimentaires à base de produits lactés, et même la contrebande de ce produit vers plusieurs pays voisins, à commencer par le Maroc, ne doit très certainement pas être occultée. Reste à conclure pour dire que l’État est tenu d’en finir avec ces perturbations qui, à la longue, risquent de compromettre très sérieusement cette fragile stabilité sociale, à quelques semaines à peine de l’élection présidentielle.
Wassim Benrabah