L’Algérie n’a pas de plan pour l’avenir ni pour l’économie, ni pour la politique ni pour tout autre domaine, on ne sait pas ce qu’il va advenir de notre pays dans les 30 prochaines années, c’est ce qu’ont estimé hier des spécialistes qui animaient une conférence-débat sur le thème « 5 Juillet 2001-5 Juillet 2031 … vision prospective » au Centre des études stratégiques d’Echaâb à Alger.
Décortiquant l’économie algérienne, Bachir Mostefa, professeur d’économie à l’université l’a qualifiée d’économie «mi-keynésienne et rentière». Selon lui «l’économie keynésienne repose sur l’injection des fonds dans une économie industrialisée alors que chez nous il y a injection de fonds dans une économie non industrialisée». «Cet état de faits, a-t-il ajouté, favorise l’inflation». La conférence, a du reste, réfuté le nombre de 400.000 PME-PMI.
«La plupart des patrons ont 2 ou 3 registres de commerce, quand ils sont sous la pression des impôts, ils mettent au placard l’un de leur registre» a-t-il soutenu. Selon lui le nombre réel de PME-PMI se situerait entre une fourchette de 140.000 à 200.000. Le taux de couverture ne dépasse pas 0,8 %, «ce qui très faible» a-t-il dit. Bachir Mostefa tout en plaidant pour des mesures protectionnistes de la production nationale, a tiré la sonnette d’alarme sur le niveau des importations.
«La facture d’importation en 2010 s’est élevée à 40 milliards de dollars dont 6 milliards ont été dépensés pour l’alimentation». Et de déplorer le fait qu’on recoure à l’importation «du raisin, des lentilles, de l’huile, du blé, des oignons, des tomates, amandes, viande et poissons congelées, etc.». «La friperie, a-t-il ajouté, nous a coûtés un million de dollars sans compter les dépenses de la friperie qui nous vient par le biais du marché parallèle (40%).
La tendance aujourd’hui est à la satisfaction tout azimut des besoins internes, ce qui est une erreur» déplore-t-il. Pour lui le secteur public est un «secteur prédateur». Bachir Mostefa soutient qu’il n’y a pas de stratégie industrielle. «On a fait des ateliers pour mettre au point une politique dans ce sens mais aucun ministère ne s’estime compétent pour la mettre en œuvre». Et de plaider pour la création d’un ministère de la Stratégie industrielle.
Le conférencier a accusé même indirectement le gouvernement d’avoir sacrifié la souveraineté. «Il faut que les autorités se rendent compte qu’elles sont souveraines dans leurs décision» a-t-il martelé. Et l’orateur de citer l’exemple de la Malaisie «qui accorde aux investissements étrangers des terrains d’assiette pour leurs projets en contrepartie de l’acceptation de l’exportation des produits malaisiens dans ces pays».
Le conférencier a proposé pour les dix prochaines années «d’interdire l’importation de tous les produits qui se fabriquent en Algérie ainsi que la suppression des taxes qui représentent 70 % des coûts». L’autre étape devrait permettre, selon lui, l’exportation des produits algériens. Bachir Mostefa a critiqué aussi le Cnes (Conseil national économique et social).
«Cette institution doit faire son travail ou disparaître, elle n’a pas à réunir la société civile» juge-t-il. Notons que les autres intervenants, l’avocate Monia Meslem et l’économiste Salim Kelala, ont insisté respectivement, sur la nécessité de renforcer l’indépendance de la justice et sur la nécessité de lancer des études prospectives.
Larbi Graïne