Pénurie de carburant, augmentation du prix du lait, des communications et du transport: Les parrains de la rumeur

Pénurie de carburant, augmentation du prix du lait, des communications et du transport: Les parrains de la rumeur

Il n’est pas recommandé ces jours-ci d’avoir une ouïe fine pour capter ces flux de fausses nouvelles rajoutant une couche au pessimisme ambiant.

«Les agents de Naftal au niveau des stations d’essence vont entamer une grève qui durera au moins trois jours.» En un quart de tour, la «nouvelle» s’est répandue, avant-hier, dans plusieurs quartiers de la capitale créant en quelques heures, un rush d’automobilistes voulant s’approvisionner en carburant.

La semaine dernière, c’était le quartier populaire de Bachdjerrah qui a été largement infecté par une imminente augmentation du prix du sachet de lait qui passera de 25 à 45 DA. Ce nouveau prix circulait chez les commerçants du coin, alors que les distributeurs de lait étaient en grève. Durant la même semaine, la Toile pullulait de démonstrations «confirmant que les opérateurs de la téléphonie mobile ont effectivement augmenté les prix des communications mais avec beaucoup de ruse». Au lait, aux carburants, aux télécommunications, s’ajoutent de multiples pénuries préfabriquées et les réseaux sociaux s’occupent du rôle d’accélérer la rumeur. Il s’ensuit une tornade de pessimisme charriant un flot d’incertitudes qui se saisit du pays au point de mettre tout le moral de la société en berne. Il n’est pas recommandé ces jours-ci d’avoir une ouie fine pour capter ces flux de fausses nouvelles annonçant des grèves, des augmentations de prix sans préalable rajoutant une couche au pessimisme ambiant. Qui sont les parrains de ces rumeurs? Dans quel but sont-elles diffusées en ces moments précis?

Dans ce remue-ménage, il y a un rapport direct avec la polémique qui occupe actuellement la scène politico-médiatique, à savoir les tiraillements entre des généraux à la retraite. Il est de notoriété publique que la rumeur prolifère lorsque les voies habituelles de communication sont perturbées.

Le citoyen a besoin de décrypter, de comprendre et de donner un sens à ce qui se passe autour de lui. Quand il manque d’infos, la nature ayant horreur du vide, il assaisonne son «ragot» avec des faits fantasmés. Une version relookée du fait original est née, elle se répand, avec quelques rajouts, quelques ouï dire…ainsi naît une rumeur incontrôlable. La polémique opposant des généraux à la retraite, Khaled Nezzar et Mohamed Betchine n’apporte aucun fait nouveau au débat de société. Pis encore, elle déstabilise le citoyen. «Tant que nos généraux font la guerre au terrorisme, c’est bien. Tant qu’ils font des affaires, c’est mieux. Mais dès qu’ils ne font ni la guerre ni les affaires, cela devient un problème de société»,fait remarquer un citoyen avant de lancer un cri en guise d’appel: «Occupez nos généraux, laissez-les faire des affaires!». N’ y a-t-il pas une prétention par ces mêmes parrains de la rumeur à distiller ce défaitisme, et à fabriquer des crises à répétition et les entretenir? Chez de nombreux sociologues, spécialistes des mouvements sociaux, le déterminisme économique n’est pas le seul facteur du «changement» social. Les attitudes face aux événements sont, pour ces spécialistes, des éléments importants dans la transformation des sociétés. Et quand les généraux s’y mettent… Surtout que le terrain s’y prête. La situation n’est pas reluisante avec les cours du pétrole qui se rapprochaient, hier, du plancher des 30 dollars, le baril sous lequel ils n’ont plus chuté depuis 12 ans.

Une dégringolade qui provoque de très sérieux remous dans le budget du pays établi sur la base du prix de référence de 37 dollars. C’est un réel motif d’inquiétude certes, mais qui n’est pas spécifique à l’Algérie. Tous les pays producteurs de pétrole subissent les contrecoups de la chute du prix du baril. L’Arabie saoudite, pour ne citer que ce géant du baril, est dans l’oeil du cyclone. Riyadh voit ses réserves financières sérieusement menacées et se trouve obligée de faire des coupes budgétaires et doubler les prix de l’eau et de l’électricité. En Algérie, cette situation est accentuée par une coulée de rumeurs et succession de polémiques à même de destabiliser le citoyen.