Paysage carte postale de la kabylie maritime : 48 heures dans le berceau de l’art

Paysage carte postale de la kabylie maritime : 48 heures dans le berceau de l’art

Montagne, forêt, mer et terre sont regroupées en un seul endroit. On a d’un côté des montagnes avec de belles forêts et des villages perchés, et de l’autre, un horizon sur la grande bleue. Cette belle carte postale est toutefois gâchée par les détritus qui jonchent ces panoramas merveilleux à couper le souffle…

La nature fait bien les choses: un temps radieux a marqué la première semaine de l’année qui coïncide avec la dernière semaine des vacances d’hiver. Les «réveillonneurs», particulièrement les jeunes, ne se sont donc pas fait prier pour en profiter. La tendance était certes au sud du pays, mais pas seulement! Le magnifique soleil qui règne sur la partie nord du pays a remis la mer au goût du jour! Certains ont donc préféré prendre leurs voitures et aller à la conquête de la Méditerranée… C’est en direction de la Kabylie maritime que ces jeunes aventuriers ont mis les voiles. «Ces dernières années, la Kabylie est devenue une destination touristique à la mode. En été, on y vient des quatre coins du pays pour profiter des paysages uniques qu’offre cette région», nous confie Akli, commerçant dans la ville côtière de Tigzirt (wilaya de Tizi Ouzou). «Néanmoins, d’habitude, dès que l’été se termine, la région replonge dans l’oubli. Ce qui n’est pas le cas cette année puisque on a été surpris de voir débarquer durant ces vacances scolaires, des familles et surtout des groupes de jeunes», souligne cet épicier dont la «survie» dépend beaucoup de ces touristes. Les dires de Akli se confirment dés que l’on sort de son magasin. Des matricules de plusieurs wilayas du pays sont visibles dans les ruelles de la ville, grouillantes de monde. Les vacanciers profitent d’un centre-ville unique en son genre, enchâssé entre mer, plages, promontoire et collines…Ils «goûtent» également au patrimoine archéologique notoire, dont les vestiges de la cité romaine et la basilique byzantine. Mais le chemin de ses voyageurs ne s’arrête pas qu’au niveau de cette ville millénaire! Les voitures aux matricules cosmopolites s’engouffrent dans la sublime route du littoral serpentant entre mer et montagne boisée pour rejoindre les villes avoisinantes, tout aussi paradisiaques que Tigzirt. «Mer, montagne, forêt, artisanat, infrastructures touristiques… Le tourisme en Kabylie, il y en a pour tous les goûts et surtout pour toutes les bourses», se réjouit Amine, un jeune Algérois venu avec ses amis pour passer la Saint-Sylvestre dans le petit village de Beni K’sila qui est la frontière entre les wilayas de Tizi Ouzou et Béjaïa. «Depuis que j’ai découvert la région, je suis devenu un habitué. Dès que j’ai l’occasion je m’offre une escapade avec des amis», assure-t-il. «C’est vraiment paradisiaque comme endroit. Les paysages sont uniques, et ce n’est qu’à deux heures d’Alger (Tigzirt, qui est le début de ce qu’on appelle la Kabylie maritime.

Un autre esprit…

Il faut compter près de 3 heures pour Beni K’sila, ndlr)», soutient-il. «C’est un vrai dépaysement. Juste le fait de faire cette route montagneuse bordée d’un côté par la mer et de l’autre par une magnifique forêt cela suffit pour se reposer», ajoute-t-il avec des yeux qui brillent de bonheur. Il faut dire que ceux qui empruntent ces routes escarpées aux mille et une facettes savourent des instants magiques avec des points de vue souvent vertigineux et superbes. D’un côté, on a des montagnes avec de belles forêts et des villages perchés et de l’autre un horizon sur la grande bleue. C’est la magie de cette route qui offre tout autant d’attraits que son pendant méditerranéen. Un «Petit Paradis» ensorcelant…

Néanmoins, cette beauté sauvage n’est pas la seule chose qui fait le charme de la Kabylie maritime! C’est ce que nous «avoue» Celia, une Algéroise habituée elle aussi de la région. «Certes, mon amour pour l’ endroit vient des paysages envoûtants, mais pas seulement», indique t-elle. «Il y a une ouverture d’esprit que l’on ne trouve pas ailleurs. Vous connaissez beaucoup d’autres régions du pays où des jeunes filles seules peuvent louer sans problème une maison pour un week-end?», souligne cette trentenaire qui, avec des copines, a pris pour quelques jours un petit appartement au niveau du village touristique de Saket. «Ce sont pourtant des petites bourgades perdues, mais les gens sont plus ouverts que ceux des grandes villes, pour preuve, regardez toutes les jeunes filles au volant de leurs voitures qui traversent des petits villages à toute heure de la journée sans aucun problème», argumente-t-elle. Chose que confirme Adel, un Blidéen venu lui aussi réveillonner dans la région avec ses amis. «Si vous n’êtes pas en famille, dans les autres régions du pays, il ne faut surtout pas espérer que l’on vous loue un logement pour un court séjour. Les jeunes sont persona non grata. Alors si c’est des groupes mixtes, il ne faut même pas rêver!», atteste-t-il. «Ce qui n’est pas le cas ici, où l’on peut louer, sans problème, en groupe de petits bungalows. Cela nous permet de se partager les frais et pouvoir s’offrir ainsi de belles petites escapades entre amis», avoue-t-il. «On ne fait pas de mal, il y a des règles à respecter que nous annonce le proprio à l’avance. Tout le monde est satisfait…», résume-t-il les choses. «En fait, ici je redécouvre mon pays. L’Algérie que j’ai connue durant les années 1970 ave des gens sympathiques et chaleureux.

Un paradis sous les…ordures

Des jeunes ouverts, libérés et tolérants, loin des clichés qui nous collent à la peau», réplique de son côté Farid, un sexagénaire originaire de Oum El Bouaghi qui ne rate pas une occasion pour se donner à nouveau des «forces» comme il le dit si bien. «C’est une Algérie ou l’on vit ensemble, en totale harmonie, comme de vrais frères, malgré les différences idéologiques qui nous séparent!», décrit-il. «Une Algérie plurielle où se côtoient laïcs, athées ou religieux sans aucun problème. Une Algérie où se côtoient, au bord de l’eau, des Algériennes en bikini et des Algériennes en hidjab. Une Algérie où on voit des jeunes, comme tous les jeunes du monde qui ne demandent qu’à s’amuser, et s’épanouir! C’est l’Algérie que l’on aime quoi!», poursuit-il.

Voilà donc un petit aperçu des innombrables potentialités touristiques dont dispose la Kabylie. Montagne, forêt, mer et terre sont regroupées en un seul endroit, avec en prime une ouverture d’esprit que l’on ne trouve presque pas ailleurs. Cette belle carte postale est toutefois gâchée par les détritus qui jonchent ces panoramas d’une merveille à couper le souffle. En effet, les problèmes de l’environnement sont un véritable fléau qui saborde une région qui a tout pour être touristique. On est véritablement agressé par des fossés et des bas-côtés transformés en véritables dépotoirs à ciel ouvert. Toutes sortes de déchets jonchent ces routes qui, pourtant, n’ont rien à envier aux paysages de la Côte d’Azur. La responsabilité est partagée entre des autorités locales qui n’arrivent pas à assurer le ramassage des ordures, voire n’arrivent même pas à déterminer un endroit clair avec des bacs à ordures où les citoyens doivent jeter leurs poubelles. Ce qui contraint les habitants à «improviser» des décharges sauvages où les poubelles sont brûlées une fois par mois. Il y a aussi l’incivisme des riverains, où même des touristes qui jettent leurs détritus directement par les fenêtres de leurs véhicules ou ne ramassant pas leurs déchets après s’être arrêtés pour profiter d’un endroit qui se transforme après leur départ en véritable décharge. Accôtements, fossés, caniveaux, tous les espaces ont leur lot de détritus, particulièrement de bouteilles en plastique ou canettes de bière et autres boissons alcoolisées. Une incivilité qui noie ce paradis sous les ordures en le transformant en véritable enfer avec un décor apocalyptique aux odeurs des plus nauséabondes. Il y a également les constructions anarchiques qui pullulent à travers les quatre coins de ce littoral, agressant ainsi la nature et la vue des riverains. Ces constructions anarchiques font face à d’autres moins anarchiques, mais qui se retrouvent isolés faute de routes dignes de ce nom. Ce qui empêche aussi un véritable tourisme d’éclore. Pourtant, les autorités locales de ces villages aux moyens très limités auraient beaucoup à gagner en mettant de l’ordre dans ce «souk» qui se vaut être du tourisme. En construisant des routes, nettoyant ces villes, obligeant les propriétaires des maisons non achevées à terminer au moins leurs façades, ils pourraient y «soutirer» diverses taxes et impôt qui redonneront vie à ces paradis qui ne demandent qu’à être exploités…

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