Les importations de l’Algérie connaissent une tendance haussière inquiétante, depuis le début de l’année. Une hausse qui concerne notamment les produits de consommation et ceux de la construction. Si les raisons de cet accroissement sont bien claires, les méthodes et mécanismes pour y remédier ne constituent plus une priorité pour les autorités publiques.
Du moins, pour l’instant. Et pour cause, des facteurs dont les incidences politiques et sociales sont tellement » préoccupantes » qu’elles pèsent lourd et finissent par forcer la main au gouvernement. La volonté de stabiliser les prix à l’approche des présidentielles et dans une conjoncture régionale explosive en est l’un des facteurs principaux.
A cela, faut-il ajouter le mois de Ramadhan et le souci d’éviter aux ménages des prix astronomiques qui mettront, encore davantage, à rude épreuve, les petites bourses. Cela d’autant que l’inondation du marché est la seule solution en mesure de faire baisser les prix et casser le monopole des spéculateurs.
Mais en Algérie, il n’y a pas que le front intérieur à nourrir. Depuis le début du printemps Arabe et de la guerre au Sahel, bien de pays voisins ont été déstabilisés. En conséquence, la situation humanitaire y a souvent été dramatique et des millions de bouches cherchent désespérément à manger. L’Algérie, perçu comme pays riche, bénéficiant d’une embellie financière exceptionnelle, s’est mis volontairement à nourrir deux ou trois peuples voisins.
L’on se demande d’ailleurs, si les autorités publiques ne font pas exprès de fermer les yeux sur les quantités importantes de produits de diverses natures qui traversent les frontières, au grand bonheur des réseaux de contrebande qui en tirent profit. En chiffre, les importations algériennes de produits alimentaires se sont établies à 4,17 milliards de dollars durant les cinq premiers mois de l’année en cours, en hausse de 15,6 % par rapport à la même période de l’année dernière.
Manger à moindre frais
Les importations algériennes de sucre ont atteint 469,03 millions de dollars durant les cinq premiers mois de l’année, contre 343,67 millions de dollars à la même période de 2012, en hausse de 36,47 %, selon les Douanes algériennes. Les quantités importées ont totalisé 883.005 tonnes à fin mai 2013 contre 545.755 tonnes à la même période en 2012, en hausse également de plus de 61,7 %, précise le Centre national de l’informatique et des statistiques des Douanes (Cnis).
Cette augmentation des importations de sucre s’explique essentiellement par la hausse de la demande intérieure qui précède le mois de Ramadhan, période qui connaît traditionnellement un »pic » de la demande. Pour le mois de mai dernier, par contre, les importations des sucres (sucres de betterave et de canne) ont reculé de 12,09 %, passant de 85,71 millions de dollars en mai 2012 à 75,35 millions le même mois en 2013.
L’Algérie a exporté ces dernières années, du sucre, même si elle n’est pas un pays producteur (canne ou betterave), la matière première étant totalement importée par des opérateurs privés qui la conditionnent et la réexportent. Un point certes positif, mais les autorités publiques, elles, semblent entretenir la phobie de la hausse des prix ou d’éventuelle pénurie. Concernant le blé, les importations algériennes ont, à leur tour, augmenté de 8,48 % durant les cinq premiers mois de 2013, malgré une baisse de plus de 5,22 % des quantités importées, indique un bilan des Douanes.
La facture des importations de blé a atteint 913,34 millions de dollars au cours des cinq premiers mois de cette année contre 841,88 millions de dollars à la même période en 2012, indique le Centre national de l’informatique et des statistiques (Cnis) des Douanes. En volume, les importations de blé tendre et dur, ont atteint 2,451 millions de tonnes les cinq premiers mois de 2013, contre 2,586 millions de tonnes à la même période 2012, en baisse de 5,22 %, selon les chiffres obtenus. Mais les quantités importées demeurent très importantes, laissant deviner une situation anormale.
Des logements contre la crise
Confrontée à une véritable crise de logement, l’Algérie ne lésine pas sur les moyens pour rattraper le grand retard enregistré. Alors que le gouvernement projette la réalisation de plus de 1 millions de logements à l’horizon 2014, les capacités de production de matériaux de construction notamment de ciment, se sont avérées insuffisantes.
D’où le recours à l’importation pour répondre à la forte demande et éviter l’arrêt des chantiers. Ainsi, les importations algériennes de ciment ont accentué leur hausse durant les cinq premiers mois de 2013, enregistrant une hausse de plus de 100 % en termes de valeur et de quantité, selon les Douanes. Cette hausse entamée depuis 2012, où les importations ont presque doublé, a été de près de 102 % évaluées à 159,39 millions de dollars les cinq premiers mois de 2013, contre 78,90 millions à la même période de 2012, selon les chiffres du Centre national de l’informatique et des statistiques (Cnis) des Douanes, obtenus par l’APS.
Les quantités importées ont connu également une « forte augmentation » de plus de 105 %, passant de 870.127 tonnes à 1,791 million de tonnes durant la même période, indique la même source. Par ailleurs, les exportations de l’Algérie ont atteint 29,85 milliards de dollars (mds usd) durant les cinq premiers mois 2013, contre 32,54 mds à la même période de l’année écoulée, en baisse de 8,26 %
Les importations, elles, ont totalisé 23,58 mds usd durant la même période de 2013, contre 20,07 mds en 2012, en hausse de 17,52 %, précise un bilan du Centre national de l’informatique et des statistiques des Douanes (Cnis). Certes, un excédent commercial a été enregistré, mais il est loin de rassurer quant à la santé économique du pays. D’où l’urgence de trouver des solutions appropriées et faire en sorte, d’alléger la pression sur le budget de l’Etat, dont la santé artificielle est maintenue par les rentes des hydrocarbures, dont toute chute risque de s’avérer des plus graves, devant la logique dépensière prédominante.
Par Aomar Fekrache