Pas de « stress hydrique » cet été en Algérie mais la guerre de l’eau est loin d’être gagnée

Pas de « stress hydrique » cet été en Algérie mais la guerre de l’eau est loin d’être gagnée
pas-de-stress-hydrique-cet-ete-en-algerie-mais-la-guerre-de-leau-est-loin-detre-gagnee.jpg

L’Algérie n’aura pas soif en été. Les ressources superficielles et souterraines « assez confortables » qui ont été mobilisées mettent le pays à l’abri d’un « stress hydrique » a déclaré à l’agence de presse algérienne (APS), Abdelwahab Smati, directeur de la mobilisation des ressources en eau auprès du ministère.

Les eaux des barrages, l’exploitation des eaux souterraines et le dessalement de l’eau de mer permettent, a-t-il dit, de « passer un été loin du spectre du stress hydrique ». L’hiver de cette année a été « très peu pluvieux » mais cela n’aura pas d’impact, selon lui, sur l’alimentation en eau potable.

M.Smati a livré l’état des lieux en chiffres : les ressources en eau conventionnelles « potentielles » sont de 18 milliards de m3 annuellement.

« Ce volume se répartit en ressources en eau potentielles renouvelables qui avoisine les 12,5 Mds m3 dont 95% sont localisées dans le nord du pays. Ce potentiel d’eaux renouvelables se décompose en ressources en eau superficielles (10 Mds m3) et souterraines (2,5 Mds m3), et des ressources en eau non renouvelables totalisant 5 Mds m3, entièrement localisées dans le sud ainsi que 0,5 Md m3 en ressources en eau superficielles. »

LG Algérie

Pour les 65 barrages en exploitation, le taux de remplissage est de 72,44% avec un volume emmagasiné de 4,93 milliards m3, contre environ 6 milliards m3 à la même période de l’année passée, soit un recul de près de 1 milliard m3.

Ce recul ne signifie pas un « déficit réel » et n’impacte par l’alimentation en eau potable, le pays ayant connu l’année passée une pluviométrie « exceptionnelle ». M.Smati s’attend, avec la fin prévu cette d’El Nino qui a touché l’Europe, à un retour à des « hivers plus humides à partir de l’année prochaine », dira M. Smati.

En 2001, l’Algérie envisageait d’importer de l’eau par tankers !

Ce tableau relativement optimiste ne doit pas faire oublier les problèmes structurels. La situation n’a effectivement plus rien à voir avec les fameuses années de grand stress 2001-2002 où les autorités avaient même envisager d’importer de l’eau de l’étranger dans des tankers.

A cette période, l’Algérie disposaient de 48 barrages dont le taux de remplissage avait chuté en aout 2001 à 38 % et des ressources de l’ordre de 1,6 milliard de m3 pour l’ensemble du pays. La course à l’eau, jerricans en main, faisait partie de la vie ordinaire.

Les routes coupées voire des émeutes pour cause de trop longues coupures d’eau étaient monnaie courante. La pluviométrie n’était pas seule en cause. L’absence d’investissement, les barrages envasés et la vétusté du réseau d’alimentation en eau avec des fuites atteignant de grandes proportions pesaient autant, sinon davantage.

Quinze ans plus tard et après des investissements de plus de 40 milliards de dollars, la situation a évolué en mieux, surtout pour les villes. Les réserves disponibles sont suffisantes, bon an mal an, pour deux ans.

Si la mobilisation de la ressource en eau pose moins de problèmes après ces investissements massifs, sa gestion – et notamment le tabou du prix – est entièrement posée. « Il est impossible de gérer correctement si le prix actuel est maintenu », a déclaré un ancien responsable de l’Algérienne des Eaux au journal électronique Maghreb Emergent. « Le bas niveau des prix maintient la gestion à un niveau rudimentaire », dit-il.

Le tabou du tarif de l’eau

La chute des prix du pétrole pourrait cependant casser le tabou du tarif de l’eau cédé au consommateur à 18 DA le mètre cube alors que son coût de production de production se situe entre 60 et 80 DA.

Il y a quelques semaines, le DG de l’Algérienne des eaux (ADE), Merrah Zidane, a estimé nécessaire de réajuster le tarif afin de contribuer à réduire le gaspillage de la ressource.

« Il y a un énorme gaspillage de l’eau » a-t-il souligné en expliquant que seul 42% du volume d’eau potable produit actuellement est facturé, le reste (58%) est réparti en 30% sous forme de pertes dans les réseaux d’alimentation et le vol à travers des branchements illicites.

Il faut faire de l’eau une « priorité nationale » a-t-il déclaré en rappelant que les potentialités hydriques du pays sont limitées.

« Aujourd’hui, nous avons 17 milliards de m3, encore faut-il que le dérèglement climatique ne viendrait pas dérégler le cycle de l’eau. Dans un siècle nous aurons 17 milliards m3, alors que les besoins en eau potable, en irrigation et en industrie vont augmenter », a-t-il dit.