La campagne menée contre des hommes d’affaires depuis l’intronisation du nouveau Premier ministre est perçue par des partis de l’opposition comme une «opération de toilettage, ciblée et conjoncturelle» dans la perspective des élections présidentielles d’avril 2019.
Mohamed Kebci – Alger (Le Soir) – Le froid installé entre le nouvel exécutif qui dit obéir à une feuille de route tracée par le président de la République et des membres des plus en vue de la plus puissante organisation patronale du pays suscite moult interprétations. S’agit-il d’une volonté sincère en haut lieu décidé, enfin, à mettre le holà à l’hydre que constitue la corruption qui a gangréné les institutions du pays jusqu’à les menacer dans leur existence même ou d’un simple lifting en vue du rendez-vous électoral d’avril 2019 ?
Si grand monde souhaite la première hypothèse, l’appréhension est de mise tant le scénario d’une opération ponctuelle dictée par une échéance politique à même de pérenniser le système en place est là, ancré dans les esprits.
Ce que, d’ailleurs, nombre d’acteurs politiques reprennent dans leur appréciation de cette nouvelle donne sur la scène politique nationale, avec, il est vrai, quelques nuances, manière de ne pas insulter l’avenir et ainsi cultiver l’espoir et ne pas paraître encore «négativistes» tels qu’ils sont accusés.
C’est ainsi que le parti des Avant-gardes des libertés ne nourrit aucune illusion quant à la sincérité du pouvoir en place de lutter contre la corruption. «C’est une pièce de théâtre. Nous ne pouvons tout de même croire à ce que le pouvoir en place, bâti sur la corruption, puisse combattre sa raison d’être. Haddad n’existait pas il y a dix ans. C’est eux qui lui ont ouvert les vannes. Et il leur a rendu l’ascenseur en finançant la campagne électorale pour les élections présidentielles d’avril 2014», soutient le chargé de la communication du parti.
Et à Ahmed Adhimi de défier le système d’«aller au-delà de ses éléments périphériques comme le patron du FCE pour toucher à son cœur». Pour notre interlocuteur, «le système en place n’a agi que suite à la gifle qu’il a reçue le 4 mai dernier, convaincu que le taux de participation aux élections législatives de ce jour ne dépassait pas les 20%». Adhimi dit s’attendre à ce que une «vingtaine d’hommes d’affaires seront sacrifiés pour se donner une nouvelle virginité en vue des élections présidentielles de 2019».
Un avis que partage ou presque le FFS. Le chargé de la communication du doyen des partis de l’opposition soutient «ne pas croire en une guerre contre la corruption tant que le système en place est encore là». Pour Hacène Ferli, la véritable lutte contre ce fléau passe inéluctablement par «un changement de régime dans sa totalité et pas celui de personnes». Du côté du RCD, on exprime des appréhensions que «cette campagne ressemble aux précédentes.
Comme les campagnes d’assainissement menées du temps du parti unique», affirme le secrétaire national à l’économie au sein du parti pour qui il y a crainte que cette campagne ne ressemble à une opération mains propres à la «sauce algérienne», avec les grands risques sur les institutions du pays au vu de la peur que cela prenne l’allure de «rendements de comptes». Ouamer Saoudi avoue «ne pas encore cerner» l’objectif ou les objectifs courus par les promoteurs de cette campagne dont les premiers dégâts révélés quotidiennement par les médias sont «énormes», estimant qu’en tout état de cause, «le pouvoir ne peut pas sortir grandi de cette campagne».
Une campagne dont le nouveau président du MSP craint le caractère de «ciblage». «La lutte contre la corruption ne doit pas être sélective», affirmait, hier, Abdelmadjid Ménasra, s’interrogeant si elle était «durable ou simplement conjoncturelle», répondant à un objectif ou à des objectifs politiques», allusion aux élections présidentielles prévues en en 2019.
M. K.