“Plus de la moitié des entreprises algériennes souhaitent établir des relations de partenariat avec des entreprises étrangères.”
Il s’agit là d’une des conclusions d’une enquête de la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française (Cciaf) sur “l’entreprise algérienne et le partenariat : entre volonté, attentes et appréhensions”. L’enquête, précise la Cciaf, a été réalisée par le Cabinet Surveys & Consulting Institute, du 1er au 18 avril 2013, sur un échantillon composé de 195 entreprises privées algériennes, réparties sur les quatre régions du pays (Nord, Est, Ouest et sud) ; issues du recensement effectué par l’Office national de statistique en 2011 pour 9 wilayas du pays. Elle a pour but d’évaluer les potentialités existantes en matière d’établissement de relations de partenariat entre les entreprises algériennes et étrangères ainsi que l’identification des types de partenariat souhaités ainsi que les modalités de leur mise en œuvre. L’étude consiste en particulier à effectuer un recensement, le plus exhaustif possible, des besoins et des objectifs des entreprises algériennes en termes de partenariat, mettre en évidence les opportunités de création de relations d’affaires dans une perspective de rapprochement et évaluer le potentiel existant pour chaque secteur d’activité.
Sur les 195 entreprises questionnées, “face-à-face et par téléphone”, 64 sont des grandes entreprises, 111 des PME et 20 sont de très petites entreprises (TPE). Pour le président de la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française, Jean-Marie Pinel, l’enquête-étude révèle que “les entreprises algériennes veulent s’associer avec des entreprises étrangères, pour produire de la haute technologie et de produit de qualité avec du personnel qualifié, ayant un grand savoir-faire. Elles justifient les potentialités sur le marché intérieur mais semblent ne pas croire à l’exportation. Donc, la délocalisation pour fabriquer à bon marché en Algérie, ce n’est pas la peine d’y penser. La recherche de la qualité sur toutes ses formes est souhaitée. L’association, malgré les réticences, ne leur fait pas peur, elles seront vigilantes au respect de leurs intérêts. L’agroalimentaire et les produits de bases sont les secteurs les plus porteurs a priori”.
M. Pinel ajoute que “le chef d’entreprise algérien est très lucide, prêt à sacrifier une partie de sa totale indépendance pour développer une entreprise en partenariat pourvu que l’étranger vienne avec un contrat clair, de la qualification et des produits de qualité. Il se sent malgré tout entravé par l’administration”.
Les cinq secteurs les plus demandeurs de partenariat sont la mécanique, le bâtiment, la chimie, l’agroalimentaire et la pharmacie
Une majorité d’entreprises (52,8%) pensent qu’une association avec un partenaire étranger peut les aider dans leur développement. Mais 47,2% disent non. Pour l’étude, “il s’agit là d’une grande ouverture d’esprit pour le développement futur et une grande attente que les entreprises étrangères doivent s’employer à ne pas décevoir”.
Les entreprises sont en général très favorables à des partenariats, sauf pour les secteurs de la métallurgie, des banques assurances, études et conseils. Ces secteurs, qui ont des modes de fonctionnement différenciés, exigent une forte culture d’entreprise pour se développer. La mécanique (71,4%), chimie et parapharmacie, pharmacie (60%) sont plus demandeurs de partenariats que d’autres.
Si les entreprises algériennes sont volontaires pour s’associer, elles craignent malgré tout l’échec de tels engagements qui les mettraient face à des risques de conflit d’intérêts et d’objectifs (26%), à des risques de dépendance vis-à-vis du partenaire étranger (21%), à des conflits de pouvoir (20%). Les différences culturelles n’entrent qu’à 13%, ce qui prouve que les entreprises interrogées ne ressentent pas un danger sur ce point.
“À cet égard, des contrats d’association, clairs complets et précis devraient rassurer et éviter toute dérive. Le rapport au pouvoir de décision doit à cet égard être clarifié”, souligne l’étude. La détection d’attitudes opportunistes du partenaire étranger est crainte. Par secteur, les appréhensions en termes de conflits de pouvoir et d’intérêts sont relativement limitées sauf pour les secteurs papier, carton et électricité. Les secteurs du transport et du métallurgie craignent le plus la dépendance, c’est sans doute en raison de la lourdeur des investissements demandés au partenaire.
Le textile a peur de travailler pour une entreprise étrangère qui la laissera tomber par la suite. Les entreprises de textile, habillement et chaussures craignent le risque de comportement opportunistes (100%), alors les banques et les assurances ainsi que le secteur de la mécanique, les blocages sont plutôt d’ordre culturel. Selon la taille de l’entreprise, les conflit d’intérêt et d’objectifs est le plus fort dans les entreprises de 50 à 100 salariés (46,2%). Leurs dirigeants maîtrisent sans doute mieux la technologie et craignent d’y perdre leur indépendance.
Les grandes entreprises, plus de 200 travailleurs, ont peur du risque de dépendance vis-à-vis du partenaire étranger (29%). Pour les entreprises qui veulent faire du partenariat, les attentes concernent notamment les ressources technologiques et informationnelles (27%), le savoir-faire dans la production (20%), dans le mangement et dans la commercialisation, la maîtrise des circuits et des pratiques pour l’export, les ressources matérielles (17%) et les ressources financières (14%). “Le savoir-faire est essentiel. Il est ressenti comme la clé de la réussite”, relève l’enquête.
Plus d’un tiers des entreprises interrogées sont prêtes à ouvrir leur capital
L’entreprise algérienne cherche principalement du partenaire une assistance à la maîtrise des procédés et des techniques de production. Pour 18% des entreprises interrogées, l’objectif est l’amélioration de la qualité des produits. 15,5% des entreprises cherchent l’exploitation des technologies matures qui améliorent la productivité.
Les retombées sur l’entreprise de la mise en place d’un partenariat seront l’amélioration des volumes de production et la qualité des produits. 80,7% des entreprises ne voient pas le partenariat comme une solution pour l’exportation. “La conquête de marchés extérieurs n’est pas le but. Sans doute que l’esprit passe davantage par la reconquête ou la satisfaction des marchés intérieurs”, indique l’enquête, qui précise que 80% des entreprises n’exportent pas et 60% n’ont pas l’intention d’essayer à court terme. L’exportation n’est donc pas une priorité pour l’entreprise algérienne.
L’étude montre que 34% des entreprises pensent que les procédures à l’exportation sont complexes, 25% estiment que le marché est trop concurrentiel, 14% avancent le manque de correspondants. Ce qui explique le besoin des entreprises algériennes d’aller comprendre comment fonctionnent les marchés extérieurs. Pour les entreprises qui ont contracté un partenariat (70 entreprises), cela leur a apporté, entre autres, un partage de ressources et de compétence tout en restant autonomes (51%). Les entreprises sont devenues compétentes et vendent des produits de qualité en préservant leur autonomie.
Le plus étonnant, encore, c’est que plus d’un tiers des 105 entreprises interrogées sont prêtes à ouvrir leur capital et perdre une partie de leur indépendance pour une autre forme d’autonomie dans le but de créer de la richesse et satisfaire leur marché. 23,1% sont favorables à une relation de sous-traitance. Par secteur, l’association, excepté pour les banques et les services, est plébiscitée. Les banques et les services cherchent la sous-traitance (66,7%). La pharmacie apprécie la production sous-licence et le textile, la franchise. Les entreprises interrogées, un bon partenaire est une entreprise qui a une bonne notoriété, qui lui apporte une technologie et un savoir-faire. Selon la taille, les entreprises de moins 50 salariés (59,9%) sont plus favorables à l’association que les grandes entreprises de plus de 200 employés.
Les procédures administratives et fiscales sont les principales contraintes auxquelles les entreprises font face.
66% des entreprises interrogées trouvent des contraintes dans l’exercice de leurs activités. “Ce résultat relativise une appréciation généralement repandue de l’existence d’un environnement bloquant pour l’entreprenariat en Algérie”, estime-t-on, en précisant que ce pourcentage se situe dans la moyenne exprimée par des entreprises d’autres pays. Les procédures administratives et fiscales (31%) sont les principales contraintes auxquelles les entreprises font face. Vient ensuite le recrutement de la main-d’œuvre qualifiée (22%), les contraintes financières et les contraintes bancaires (17%) et les matières premières 10%.
Les contraintes douanières ne constituent que 2%. L’ensemble des secteurs est impacté. Mais le bois et papier (77,8%), le bâtiment et travaux publics (72%), l’agroalimentaire (67,4%), les transports (70%), la chimie et pharmacie (62,5%), sont, entre autres, les secteurs les plus sensibles aux contraintes. “Cela montre la difficulté des entreprises à comprendre la nécessité des procédures administratives”, estime l’étude. La perception des contraintes est différente d’un secteur à un autre. Les contraintes administratives impactent plus particulièrement les secteurs du textile et habillement (100%), de la chimie, de la pharmacie, du commerce et distribution, des transports, ainsi que le bâtiment et les travaux publics. Il s’agit de secteurs soumis à des contraintes réglementaires spécifiques notamment pour la protection du client et du consommateur. En revanche, les banques et les assurances, par exemple, le recrutement de main-d’œuvre qualifiée est la principale contrainte (66,7%). Pour le secteur électronique et électricité, les contraintes sont plutôt d’ordre financier (35,7%). La maîtrise du savoir-faire, (savoir-faire dans la production, dans le mangement, dans la commercialisation, maîtrise des circuits et des pratiques pour l’export), est considérée comme le principal levier de développement de l’entreprise puisque l’addition de ces critères s’élève à 52%. Viennent en second lieu, les ressources financières (22%) en raison des besoins d’investissement et de fonds de roulement et les ressources matérielles, en d’autres termes le foncier (20%).
M. R