«Ces gardiens, appelés communément parkingueurs, n’hésitent pas à recourir à la menace, essentiellement envers la gente féminine, qui se voit obligée de payer des tarifs exorbitants, en l’absence totale des agents de l’ordre. Armés de gourdins, ils font tout pour être obéis d’autant qu’ils agissent, le plus souvent, en groupe.
Matraques en main, ils imposent leur diktat. Leur nombre et leurs manières intimidant leur victime, celle-ci est souvent délestée de… cent (100) dinars pour les droits de stationnement. En effet, il faut dire que depuis quelques années, posséder une voiture n’est nullement une sinécure, d’abord vu la cherté de la vie, mais aussi face à l’impossibilité d’utiliser son véhicule en ville, et pouvoir le garer facilement et en toute sécurité. Avec l’incroyable accroissement du Parc automobile algérien, le nombre de parkings et de places est insuffisant dans la Capitale.
C’est ici, où est née la problématique de «pénurie» de places de stationnement à Alger. De ce fait, les moindres espaces sont exploités par de petits débrouillards. Des commerçants mettent des bacs, ou tout autre objet, pour empêcher les automobilistes de se garer devant leurs magasins.
Des habitants posent des piquets équipés de chaînes, tout le long des trottoirs de leurs quartiers, pour le même motif. Ainsi, les quelques places libres restantes sont exploitées par des jeunes chômeurs qui les proclament «Parkings gardés» et forcent les malheureux automobilistes à payer des sommes rondelettes pour des durées bien déterminées, au risque de retrouver un véhicule vandalisé ou pire volés. GOURDINS ET ARMES BLANCHES Ces derniers mois, les scènes de violence se sont multipliées et aggravées dans les lieux-dits «parkings». À Alger- Centre, trouver un endroit où stationner est synonyme d’un vrai miracle.
Et pour cause, de jeunes «parkingueurs» viennent à la rescousse de l’automobiliste, le guidant et le dirigeant contre monnaie sonnante et trébuchante. «Ils sont très agressifs avec les jeunes, de plus, ils exigent des tarifs très élevés, allant de 100 DA jusqu’à 200 DA. Ils portent, même, des armes blanches tels que des bâtons et des couteaux », témoigne Hamza, avant de poursuivre, «je suis contraint de payer, je n’ai pas vraiment le choix».
Notre interlocuteur nous explique, avec ironie, «je vais tenter de faire passer l’argent, donné au gardien du parking, dans les frais de mon déplacement». Mission impossible, puisque le parking se limite à un espace public et que son gardien ne peut nullement justifier son statut ou offrir un reçu à ses «victimes». Un riverain nous dira : «Ce sont généralement les voleurs notoires du quartier qui s’autoproclament gardiens de parkings. Ils mettent, ainsi, les conducteurs devant un choix cornélien, soit ils payent et retrouvent leur véhicule intact, ou font la forte tête et risquent, ainsi, gros».
LA POLICE COMMENCE À BOUGER ?
Selon notre confrère El-Watan, la semaine dernière, les services de la police ont pris l’initiative de sévir dans plusieurs quartiers. L’opération s’est soldée par l’interpellation de 120 «gardiens de parkings sauvages», déférés devant la justice. Seraitelle la fin du diktat des parkingueurs ou, juste, une opération coup-de-poing ? Il faut dire que le laisser-faire des forces de l’ordre a encouragé la prolifération du phénomène. Pourquoi les policiers sont-ils restés indifférents à l’«utilisation des armes blanches ?, se sont interrogés les automobilistes rencontrés à proximité de la maison de la presse de Kouba.
L’autre témoignage poignant est celui de Mounir, dont le pare-brise de sa voiture a été détruit pour non-payement de parking. «En stationnant, j’ai refusé de payer le parking, car ce n’est pas un lieu de stationnement légal. À mon retour, j’ai retrouvé le pare-brise de ma voiture en miettes», nous a-t-il fait part de son expérience.
Pour rappel, les services de la wilaya d’Alger avaient annoncé la réception, au cours de cette année 2015, de cinq nouveaux parkings, en attendant le lancement de dix (10) autres à étages de 700 à 1 500 places qui seront réalisés par la société Cosider et des opérateurs privés. La wilaya avait fait savoir que cette démarche « permettra à l’avenir d’atténuer le problème de stationnement à Alger ». Mais ces derniers sont insuffisants, vu que la Capitale avait dénombré, en 2014, plus de 900 parkings sauvages. Répartis sur 55 communes de la Capitale, ces parkings seraient gérés par près de 1 200 jeunes chômeurs.
Pour Mohamed, ce travail est une aubaine. «Mon père est à la retraite, et j’ai 6 frères et soeurs. Je gagne dans les 20 000 DA par mois. Ça aide !», confie-t-il, comme pour se dédouaner d’exercer cette activité illégale qui contraint des millions d’automobilistes à mettre, quotidiennement et plusieurs fois par jour, la main à la poche sans pouvoir contester. Mais il faut dire que 20 000 DA est un chiffre revu à la baisse, par Mohamed.
Lamia Boufassa