L’armée pakistanaise a assuré hier avoir héliporté des soldats dans un bastion des talibans dans la vallée de Swat, affirmant que l’ennemi était en fuite face à son offensive lancée il y a plus de deux semaines dans cette vallée du nord-ouest du pays.
Au même moment, l’ONU annonçait que le nombre de personnes ayant fui les combats en 10 jours avait dépassé le demi-million. Les témoignages se multiplient également sur la résistance de ces combattants islamistes liés à El Qaïda, qui se servent des habitants comme boucliers humains et sur la mort de nombreux civils dans les bombardements de l’armée. « L’armée a héliporté des troupes à Peochar avec pour mission de localiser et détruire les positions ennemies », a annoncé le porte-parole de l’armée, le général Athar Abbas.
Peochar, dans les montagnes du nord du district, est l’un des principaux bastions des talibans de Swat. Le général Abbas a affirmé que les militaires avaient tué 751 talibans en 17 jours d’offensive à Swat et ses environs et que l’armée avait perdu seulement 29 soldats. Ces bilans sont impossible à vérifier, les zones de combat étant bouclées par l’armée. Les médias pakistanais parlent d’une « guerre invisible ». Mais l’ONU, qui a évoqué une « crise humanitaire majeure », a annoncé mardi que le flux de civils fuyant les combats depuis dix jours avait dépassé le demi-million. Les talibans s’étaient emparés il y a deux ans de la vallée de Swat et l’armée n’avait jamais réussi à les en déloger durablement.
A la mi-février, Islamabad avait signé un accord de paix en vertu duquel les talibans acceptaient un cessez-le-feu en échange de l’instauration, à Swat et six autres districts, de tribunaux islamiques. Mais, loin de déposer les armes, les combattants islamistes avaient profité du cessez-le-feu pour pousser leur avantage sur le terrain, en s’emparant des districts voisins du Lower Dir et de Buner, à une centaine de kilomètres d’Islamabad. Sous la forte pression de Washington, qui qualifiait l’accord de Swat d’« abdication » face aux islamistes, Islamabad a lancé le 26 avril son armée dans la reconquête des trois districts. « Les opérations se déroulent au mieux, les talibans sont en fuite maintenant », a affirmé le général Abbas.

Cette assurance est toutefois démentie par des témoignages sur place, qui mentionnent également de nombreuses pertes parmi les civils. « Les talibans patrouillent dans les rues » de Mingora, le chef-lieu du district de Swat, que l’armée avait attaqué il y a plus d’une semaine, a assuré au téléphone à l’AFP Ahmad Ali, 24 ans, qui se terre chez lui dans cette ville de 300 000 habitants. « Je n’ai jamais vu un militaire durant les heures de couvre-feu », a-t-il assuré. Des médecins, qui ont réussi à fuir Mingora, ont déclaré à l’AFP que de nombreux civils avaient été tués ou blessés par les talibans ou par l’armée, qui bombardent sans discrimination, selon eux.